La Route des vins d’Alsace, 70 ans de tourisme autour du vin
Elle déroule sur 170 kilomètres ses couleurs, rouge et or à l’automne. Depuis 70 ans qu’elle serpente entre coteaux et villages, la Route des vins d’Alsace, dans l’est de la France, reste une référence de l’oenotourisme, tout en s’adaptant à l’ère du numérique.
La Route des vins d’Alsace est l’une des plus anciennes de l’Hexagone et aussi l’une des plus fréquentées, après les vignobles du Bordelais et de Champagne. Elle a attiré 7,7 millions de visiteurs en 2022, dont 45% d’étrangers si l’on compte les nuitées passées dans le vignoble au sens large.
Dans son village de Goxwiller, Raymond Koenig montre fièrement la cave et les énormes foudres (tonneaux géants de 10.000 litres) qui contiennent la récolte familiale depuis 1889.
La Route des vins, « c’était une bonne idée, c’est certain », raconte celui qui continue à vendanger à 84 ans et se souvient de la création de l’itinéraire touristique en 1953. « C’était une nouveauté qui nous a vraiment plu. C’est quand même une image de l’Alsace la Route des vins, une image touristique qui nous amène du monde, qui fait connaître la région ».
Dans son exploitation reprise par son fils Christophe, un couple de Parisiens s’est arrêté pour sa visite annuelle aux Vins Koenig, d’où il repart habituellement avec quatre à six caisses.
« Le problème de la Route des vins, c’est que c’est immensément long. Il faut choisir: dans n’importe quel village, il y a 10 vignerons qui vous proposent de déguster », commente Jean-Louis Meyer, 69 ans, en reposant son verre. « Alors on va toujours aux mêmes endroits ».
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Yoga dans les vignes
Après la route pour les autos, l’itinéraire s’est doublé d’une véloroute depuis dix ans, et une version pédestre doit voir le jour l’an prochain.
« C’est une grande dame qui n’a pas vieilli: elle se renouvelle sans arrêt », se félicite Nathalie Kaltenbach, présidente d’Alsace destination tourisme (ADT).
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Au chapitre des innovations: des séances de yoga dans le vignoble, des balades en gyropode ou encore des ateliers de peinture au vin, avec l’idée de convaincre les visiteurs de séjourner durablement entre Vosges et Rhin.
Pour les vignerons, la vente au caveau « a beaucoup d’intérêt: on se passe d’intermédiaire », souligne Philippe Bouvet, directeur marketing du Comité interprofessionnel des vins d’Alsace (Civa). « C’est un vecteur de marge très intéressant ».
Selon lui, les viticulteurs alsaciens réalisent environ un quart de leur chiffre d’affaires via la vente directe à leurs visiteurs, un ratio « beaucoup plus élevé » que dans le reste de la France.
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Revers de la médaille: la popularité de la Route des vins a créé « une forme d’attentisme » chez certains vignerons, qui ont tendance « à attendre que le client arrive », observe-t-il.
La folie des pionniers de l’oenotourisme
Ce n’est certes pas le cas de Céline et Yvan Zeyssolff, qui ont transformé leur exploitation de Gertwiller en un musée immersif, devenu quasi incontournable pour les visiteurs d’outre-Atlantique. « Quand on s’est lancés dans l’oenotourisme il y a 25 ans, on nous a pris pour des fous », raconte Yvan.
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Son domaine voit s’arrêter des cars entiers de touristes américains à peine descendus de leur croisière sur le Rhin. Ecouteurs sur les oreilles et verre à la main, ils visitent la cave où un film racontant l’histoire familiale est projeté sur les fûts.
« Les gens n’achètent pas juste une bouteille de vin mais aussi une histoire. On partage avec eux notre vie de tous les jours », observe le vigneron, dont les ventes « ont explosé ».
Outre les 20.000 visites annuelles de la cave avec dégustation (16 euros l’entrée), le domaine propose une épicerie, un salon de thé, un restaurant et un gîte de 28 lits, en cours d’agrandissement.
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Le secret du succès: « On a réussi à se créer une visibilité grâce aux algorithmes », explique Céline Zeyssolff, dont le site internet en français et en anglais permet de réserver sa visite. « Contrairement à il y a 20 ans, les gens ne s’arrêtent plus par hasard ».
A Goxwiller, la famille Koenig entend bien elle-aussi profiter à plein de l’économie numérique: c’est l’ambition de Matéo, 18 ans, le petit-fils de Raymond, étudiant en viticulture. « J’ai le sang viticulteur, je suis prêt à reprendre l’exploitation. »
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