Portrait d’Audrey Contesse, le visage du nouvel Institut culturel d’architecture FWB
Son intérêt pour l’architecture remonte à sa jeunesse. Désormais, elle le partage en tant que directrice du nouvel Institut de la Fédération Wallonie-Bruxelles dédié à cette discipline. Avec passion et conviction.
Il suffit de peu pour sceller une destinée. Alors qu’Audrey Contesse entame des études en histoire de l’art au Palais universitaire de Strasbourg, elle se voit proposer un exercice d’apparence anodin. Elle n’est que depuis une semaine dans ce bâtiment érigé par les Allemands durant l’annexion de l’Alsace-Moselle, au XIXe siècle, quand un des ses professeurs demande à la classe de prendre une feuille et de dessiner le plan de l’endroit. « Il nous a ensuite fait visiter les alentours en nous expliquant chaque façade. J’ai trouvé cela magique: se balader, regarder, prendre conscience du contexte et se l’approprier. » Cette rencontre avec l’édifice néo-Renaissance sera décisive et lui donnera l’envie de se lancer « corps et âme » dans l’architecture. Sa maîtrise sous le bras, elle décide donc de monter à Paris, pour suivre un cursus en art de bâtir, qu’elle termine par un stage à Los Angeles: « Nous étions à LA, les ingénieurs en Allemagne et les projets en Chine. Avec le décalage, les dossiers étaient suivis non-stop. Ce contexte international était captivant », s’enthousiasme cette fille d’un pilote de chasse, habituée à voyager depuis l’enfance.
C’est la reconnaissance de l’architecture comme entitu0026#xE9; culturelle. Nous avions un retard d’une quinzaine d’annu0026#xE9;es par rapport u0026#xE0; la Flandre.
Une fois diplômée, elle débarque à Bruxelles, travaille dans un studio spécialisé dans les concours, s’y épuise à bosser jour et nuit, remet en cause ses choix, hésite à retourner en France… et décide finalement de rester, à condition de réaliser son rêve, « devenir rédactrice en chef d’un magazine d’archi ». Elle contacte A+, titre belge incontournable dans le secteur, y entre comme secrétaire de rédaction, puis prend la tête du média. « Je suis arrivée dans une équipe masculine et flamande. J’ai appris la langue sur le tas et j’ai pris le rôle de débusquer en Belgique francophone, des réalisations intéressantes à publier. » C’est ainsi qu’elle se construit un réseau et se rend compte qu’il y a une culture différente, de part et d’autre de la frontière linguistique: « Les architectes wallons attendent d’être découverts et ne sont pas dans la proactivité en termes de com’. »
Après huit ans, Audrey Contesse quitte le navire éditorial et monte des expos dont Entrer, une scénographie sur la créativité architecturale au sud du pays, présentée à Paris et ailleurs. En janvier dernier, la Fédération Wallonie-Bruxelles lance un appel d’offres pour la mise sur pied d’un opérateur de référence de l’architecture francophone. Elle y répond et devient directrice; le début d’une aventure qui l’emballe, elle ne peut le cacher lorsqu’elle nous reçoit sur la terrasse de Recyclart, le long du canal, à Molenbeek. « C’est la reconnaissance de cette discipline comme entité culturelle. Nous avions un retard d’une quinzaine d’années par rapport à la Flandre », souligne-t-elle. Passionnée par ce chantier, elle en résume les contours, intarissable. « Il y a la volonté de fédérer ce qui existe déjà et de s’inscrire dans la logique des centres culturels qui considèrent que la culture doit venir du citoyen et ne pas s’imposer. Par ailleurs, puisque la Wallonie est morcelée et qu’il y a peu de communication d’une province à l’autre, nous ne créerons pas un lieu mais DES lieux qui reflètent cette diversité. » Dans cette optique, quatre centres culturels, dont Recyclart, sont membres-fondateurs de l’Institut culturel d’architecture Wallonie-Bruxelles(ICA), et l’équipe travaille désormais sur une programmation itinérante, pour les pros et le grand public.
Avant de nous quitter, notre hôte insiste pour qu’on se recontacte en novembre, quand le premier événement sera lancé, au Bomel à Namur, et nous abandonne pour aller poser, décontractée, devant les briques décrépies de ce lieu alternatif qui lui sied, elle qui n’aime pas les « villes-musées » et leur préfère notre capitale. « Parce qu’elle est en mouvement, qu’il y a encore plein de choses à y faire », nous glisse-t-elle entre deux clichés, précisant qu’elle a vécu petite dans une garrigue du sud de la France, sans personne à un kilomètre à la ronde. « Le paysage lunaire de cette ancienne exploitation de lignite m’a beaucoup marquée. C’est un contexte unique qui favorise la réflexion sur l’environnement quotidien. » Et si c’était là que tout avait commencé, finalement?
1976 Naissance à Bonneville, en Haute-Savoie.
1998 Soutient sa maîtrise en histoire de l’art et part à Paris.
2006 Débuts au sein de la revue belge A+.
2015 Inauguration à Paris de son expo Entrer.
2019 Devient directrice de l’ICA.
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