Comment lutter contre le manque de contacts physiques ?

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En dehors de sa « bulle » qui n’est d’ailleurs plus une, on ne peut toujours pas s’étreindre ni se donner la main. Dans cette nouvelle normalité, il n’y a que très peu de place pour les contacts physiques. Ces derniers sont pourtant essentiels. Comment y remédier et assouvir notre soif du toucher ?

La peau, notre plus grand organe, crie souvent famine ces derniers temps. Nous sommes nombreux à avoir une forte envie de contact physique. Ceux-ci se font trop rares depuis trop longtemps au goût de certains. Et avec la recrudescence de l’épidémie, cela ne risque pas de s’arranger.

Le contact physique, l’un de nos besoins primaires

Le contact de la peau est un besoin primaire au même titre que boire ou manger, l’être humain étant un animal social qui a besoin de ses semblables pour survivre. Qu’il s’agisse d’une joue effleurée ou d’un tendre câlin, toucher et être touchés nous fait un bien fou sur le plan émotionnel, mais aussi physique. Ce contact physique en dit aussi souvent plus long que des paroles : serrer quelqu’un dans nos bras est la meilleure manière de le consoler et, lorsque nous nous sentons seuls et déboussolés, il suffit parfois qu’un autre nous prenne la main pour nous réconforter. Le contact physique crée en effet un lien, une confiance mutuelle et une impression de sécurité.

L’hormone de l’attachement

Le toucher stimule les terminaisons nerveuses, qui envoient à leur tour des signaux au cerveau et y déclenchent la mise en route d’une multitude de processus. Un simple câlin permet par exemple d’abaisser le taux de cortisol et de réduire ainsi très rapidement la tension et le stress, mais il améliore aussi l’humeur en stimulant aussi la production d’endorphines, les hormones du bien-être. D’autres hormones sont également sécrétées, comme la dopamine et la sérotonine, aux effets apaisants et qui apportent une sensation de calme et de sécurité. Le rôle le plus déterminant revient toutefois à l’ocytocine ou  » hormone de l’attachement « , qui réduit le stress et induit un sentiment de bien-être. Elle abaisse notre tension, favorise la digestion et apaise la douleur.

L’importance du toucher est particulièrement évidente lorsqu’il nous fait défaut, comme en ce moment. On sait de longue date que le fait d’être privé de contacts physiques significatifs peut, à terme, s’avérer lourd de conséquences sur le plan tant émotionnel que physique. Le scientifique Harry Harlow l’a démontré dans les années 1950 dans une étude aussi célèbre que controversée, en retirant des singes nouveau-nés à leur mère pour les élever en laboratoire dans un total isolement social. Conséquence ? Les animaux présentaient un développement anormal, des dépressions et de l’agressivité. Lorsqu’ils étaient réintroduits parmi leurs semblables, ils ne semblaient pas à même de se reproduire.

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Il en va de même chez les enfants humains qui présentent également un risque accru de troubles du développement lorsqu’ils ne sont pas suffisamment câlinés, consolés et bercés. Une absence d’interactions humaines et de contact physique affecte le cerveau de façon bien réelle.

Soudainement beaucoup de personnes se sont senties seules

Mais que faire lorsqu’on ne peut plus s’approcher des autres et encore moins les toucher ? Que faire lorsqu’on n’a personne dans sa bulle ? La solitude est de plus en plus présente dans nos sociétés. Les personnes âgées et les célibataires sont de plus en plus nombreux.

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L’épidémie et surtout le confinement ont rendu cette faim de contact palpable pour tout le monde. Soudainement, beaucoup de gens ont réalisé ce que l’on ressent lorsqu’on manque de contact physique. Et qu’il n’y avait aucune honte à en parler, jusqu’à un certain point. En effet, le tabou demeure et la plupart n’avoueront qu’à contrecoeur être émotionnellement seuls.

Il existe des substituts

Si le besoin de contact n’est plus à prouver, des substituts permettent également d’offrir, en partie, une alternative.

On croit souvent, à tort que ce sentiment est lié au sexe et qu’on peut le satisfaire avec une partie de jambe en l’air. Ce n’est pas si simple. Se toucher, ou le besoin de contact n’a souvent rien à voir avec un acte sexuel. Des séances de massage ou un rendez-vous chez le coiffeur peuvent déjà faire beaucoup de bien. Ainsi Messelis remarque en riant que « les coiffeurs deviennent les nouveaux travailleurs du sexe et qu’un massage du crâne est souvent le point culminant ».

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Un manque d’affection ne doit pas toujours ou nécessairement être comblé par une autre personne. Un contact virtuel et des stimuli extérieurs peuvent également apporter le salut. « La faim de peau est votre corps qui demande un tel stimulus physique. Quelqu’un qui vous touche peut être une façon logique de répondre à ce besoin, mais ce n’est certainement pas la seule. Une musique qui vous touche peut vous donner la chair de poule, une oeuvre d’art peut vous faire sourire. Ce sont aussi des sentiments qui déclenchent une réaction physique, sans impliquer un autre être humain », déclare Van den Bulcke.

Un constat qui ne date pas du Corona, car même avant beaucoup de personnes étaient isolées. C’est donc de tout temps que certains remplissent leur lit d’ours en peluche ou prennent un animal de compagnie.

On notera par contre que la masturbation n’est par contre pas toujours indiquée. Si elle se révèle comme une véritable source de réconfort chez certaines personnes, chez d’autres elle renforce le sentiment de solitude en mettant en avant l’absence de partenaire », conclut le psychologue.

L’autre, source de suspicion

Pourtant, il y en a certains que ce manque de contacts physiques arrange. Ils sont soulagés de ne plus avoir à se faire toucher ou à toucher les autres. Comme l’explique le professeur van Puyvelde dans De Morgen. « La tolérance de chacun pour le toucher est ancrée dans tout un baril d’expérience », explique. « Ce qu’une personne aime est transgressif pour une autre. Chacun devrait pouvoir ressentir la liberté de tracer ces limites ». La culture joue également un rôle puisque par exemple en Chine ou au Japon il n’est pas d’usage de faire des câlins, alors qu’aux États-Unis, on en reçoit beaucoup plus rapidement. Une étude de l’université d’Oxford a démontré que ceux qui donnaient le plus de câlins étaient les Finlandais. Cette même étude a aussi démontré que les hommes étaient plus réticents à donner des calins (on ne parle pas ici de sexe).

Aujourd’hui, Corona oblige, le contact avec l’autre a encore pris une nouvelle dimension et oscille entre la crainte d’être contaminé et la difficulté de garder ses distances. Une certaine distanciation et une nouvelle forme d’hygiénisme social sont devenues un automatisme autant qu’une nouvelle forme de politesse – on montre par ce biais qu’on se soucie de l’autre. Mais cela ne calmera pas la faim.

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