Décès et réseaux sociaux: que faire du compte Facebook d’un proche après sa mort?

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Que deviennent les profils des morts sur les réseaux sociaux? Depuis 2016, les plateformes doivent proposer des procédures dédiées et Facebook incite même à la création d’un « profil commémoratif », mais les familles endeuillées hésitent souvent entre tout supprimer ou ne rien faire.

Plusieurs estimations circulent sur la date à laquelle le nombre de morts dépassera celui des vivants sur Facebook. Selon de récents travaux de l’Oxford Internet Institute, cela pourrait arriver avant la fin du siècle, en fonction de la croissance des utilisateurs du plus grand des réseaux sociaux –qui n’est lui-même pas forcément éternel.

Aujourd’hui, les plateformes ont généralement un formulaire dans leurs pages d’aide permettant aux familles de « signaler » le compte d’une personne décédée, et ainsi de le supprimer. Google propose de son côté une sorte de « testament numérique » unifié pour l’ensemble de ses services, permettant de supprimer les données personnelles après une période d’inactivité.

Mais la question est plus sensible pour Facebook, dont le modèle repose sur la possibilité de partager avec des proches les grands événements d’une vie, de la naissance à la mort.

Dès 2008, Facebook avait pris des mesures pour permettre aux familles de déclarer, documents officiels à l’appui, le décès d’un de leurs membres, puis de supprimer leurs profils ou de les figer en ajoutant avant leurs noms la mention « en souvenir de ». La même fonctionnalité existe pour Instagram, la filiale dédiée aux images du réseau social.

En 2015, Facebook a permis aux utilisateurs d’anticiper leur décès en désignant de leur vivant un « contact légataire » (informé, par mail, de son nouveau rôle) et leurs dernières volontés numériques. En avril dernier, ce contact a obtenu des attributions supplémentaires, notamment celle d’animer une nouvelle section dédiée aux « hommages ».

Pourtant, ces fonctionnalités demeurent méconnues et les familles reportent souvent les démarches, quitte à voir épisodiquement surgir des rappels indésirés, notamment les anniversaires.

Une jeune femme confie ainsi à l’AFP que le profil Facebook de son compagnon, décédé il y a 4 ans, « lui appartient et permet à ses proches de retrouver des souvenirs ». Bien que disposant des identifiants, elle ne s’est connectée au compte qu’une seule fois, pour supprimer une publication publicitaire après un piratage. La transformation en compte de commémoration ne lui paraît aujourd’hui pas souhaitable: « Facebook n’est pas un cimetière, ce n’est pas le bon endroit pour les hommages », juge-t-elle.

Dans l’éventualité d’une suppression, elle envisage de laisser un délai pour permettre aux amis d’enregistrer les photos et messages qu’ils voudraient conserver.

Des algorithmes pour limiter les notifications

Pour d’autres, le compte du défunt est l’endroit idéal pour annoncer ses funérailles (une pratique « assez répandue » selon un programme de recherche nommé « Éternités numériques » de l’université Paris 3) et laisser des messages de condoléances. « Transformer un profil en mémorial peut être ressenti comme une grande étape que tout le monde n’est pas immédiatement prêt à franchir », a reconnu en avril la numéro deux de Facebook, Sheryl Sandberg, dont le mari, décédé brutalement en 2015, a depuis un compte Facebook mémorial.

Sheryl Sandberg a également annoncé l’utilisation d’algorithmes pour identifier, avant même toute déclaration par les proches, les comptes de personnes décédées et limiter préventivement les notifications.

Le réseau social n’a pas donné suite aux demandes de l’AFP sur le nombre de comptes de commémoration, mais indique que 30 millions de personnes les visitent chaque mois. « Facebook a tout intérêt à ne pas supprimer les comptes des défunts », explique à l’AFP Ludovic Broyer, PDG de la société française iProtego qui propose une assistance aux familles pour clôturer les comptes des réseaux sociaux, mais aussi supprimer les comptes mails et effacer toute trace non désirée sur internet. « Ces comptes font des pages, du clic, de la « data », et Facebook, comme les autres plateformes numériques, vivent avant tout de la qualité de leurs données, tirées de l’observation des comportements de leurs utilisateurs », continue-t-il. Ainsi, « le défunt continue d’apporter sa contribution » à la collecte de données du réseau social.

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