Les thérapies en ligne: la révolution du self-care ?

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Stagiaire

Durant les mois de confinement, les consultations chez le psy sont souvent devenues virtuelles. Plus largement, elles semblent se répandre et répondre aux besoins de nombreux patients. Mais ces thérapies en ligne ont-elles la même efficacité qu’une séance en présentiel?

Les anglophones s’y sont mis avant nous, avec des sites Web tels que TalkSpace (2012) et BetterHelp (2013) par exemple. Mais il est désormais également possible pour des patients en Belgique, France et Suisse de suivre une thérapie exclusivement en ligne. Parmi ces nouvelles plate-formes de psychologie 2.0, on retrouve notamment, depuis fin 2020, la start-up bruxelloise Websie. Fruit d’une collaboration entre Baptiste Michiels, Martin Bragard et Esteban Sastre, la démarche est claire : démocratiser le suivi psychologique en offrant des prix concurrentiels. Une toute nouvelle approche de la consultation, qui passe par une interface à l’esthétique bien stratégique : tons roses, émoticônes, posts Instagram humoristiques, tout est mis en place pour attirer les férus de réseaux sociaux.

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En quelques clics et après quelques questions axées sur les besoins du patient, la plateforme sélectionne un psychologue agréé. Libre à chacun toutefois d’en choisir un autre parmi la sélection faite. Et si ce praticien ne convient pas, il est évidemment possible d’en rencontrer un autre à tout moment, exactement comme dans un suivi « classique ».

Une nouvelle manière de procéder

Mais qu’est-ce qui change vraiment? Premièrement : le prix. La plateforme propose des consultations asynchrones à 34 euros la semaine : cette formule consiste en l’envoi de messages instantanés à son psychologue, du lundi au vendredi. Le praticien, lui, est tenu de répondre au moins une fois par jour au patient. « C’est un modèle assez connu aux Etats-Unis : ici, on donne la possibilité au patient d’écrire à son psychologue quand il le veut. C’est un petit peu moins cher qu’une séance classique, car l’investissement en temps du psychologue n’est pas le même que lors d’une rencontre de 50 minutes », nous dit Martin Bragard, cofondateur de Websie.

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.© Getty Images

D’après les chiffres du site, 80% des patients sont satisfaits par ce fonctionnement et trouvent ce suivi plus efficace et confortable. Et pour l’instant, aucune limite de messages n’est imposée. Il est également possible de profiter d’une consultation par téléphone ou vidéo, à un prix plus commun (49 euros).

Le deuxième élément qui diffère d’une consultation traditionnelle est bien évidemment l’échange par voies numériques : ici, pas de possibilité de se rendre dans un cabinet, mais pour certaines personnes cette option n’est pas un obstacle, bien au contraire. L’approche via écrans interposés en a en effet aidé plus d’un à passer le pas. C’est le cas de Sevan, étudiante de 23 ans, pour qui la thérapie en ligne est devenue une évidence. « Personnellement, je vois plus d’avantages à faire la consultation à distance plutôt qu’en présentiel. Je suis moins intimidée par la personne en face de moi, et dans les moments où je n’ai pas envie de sortir de chez moi à cause de ma dépression, ça me rassure de savoir que je peux continuer ma thérapie. Ça m’a aidé à ne pas rater mes rendez-vous, et globalement mon suivi psy est meilleur. » La thérapie à distance, c’est aussi un choix judicieux pour ceux qui voyagent souvent, poursuit la jeune femme: « Je ne sais pas trop où je serai dans les mois qui arrivent, alors garder le même psychologue sans avoir besoin d’être dans un endroit fixe m’arrange énormément. »

Les thérapies en ligne, une solution idéale ?

Selon les besoins et les suivis conseillés, les thérapies en ligne (qu’elles soient longues ou courtes) peuvent aider à sortir de certains schémas émotionnels limitants, d’une dépression ou d’un burn-out. Cependant, ces plateformes là ne proposent que des suivis psychologiques, à ne pas confondre avec la psychiatrie : « Nous ne travaillons qu’avec des psychologues, qui eux ne peuvent pas prescrire de traitement médicamenteux. Pour des symptômes de pathologies médiquées comme la bipolarité, nous conseillons au patient de se tourner vers un psychiatre, qui pourra l’aider au mieux. »

Avec l’essor des réseaux sociaux et des interactions virtuelles, faut-il dès lors craindre la disparition des thérapies traditionnelles? En tout cas, Websie n’a pas vocation à les remplacer, bien au contraire : « Notre but est de démocratiser le suivi psy : pour toute une partie de la population, la thérapie en ligne peut lever un frein qui l’empêchait de consulter. Mais les psychologues en présentiel restent essentiels pour certains patients. » Rebecca Hiley, psychologue clinicienne basée à Bruxelles, pratique exclusivement les consultations face à face. Pour elle, le contact humain est indispensable. « Dans beaucoup de situations, la thérapie en ligne peut-être efficace : voyage à l’étranger, phobie due à la Covid…, concède-t-elle. Mais de mon côté, j’attache une profonde importance au langage corporel. »Selon la psychologue, tout est une question d’individualité et de confort personnel.

Les thérapies en ligne: la révolution du self-care ?
© istock

« On ne peut pas généraliser les thérapies, et chaque patient est unique. S’il y a possibilité d’être en présentiel, j’encourage toujours à ce que la consultation se fasse au cabinet. Pour moi, c’est un endroit sécurisant qui participe grandement au bon déroulement d’une thérapie. »En ce sens, le cabinet est un endroit où l’on ne risque pas d’être interrompu, que ce soit de la faute d’une connexion Internet lente, ou bien parce que l’on ne peut pas profiter d’une intimité optimale en étant chez soi (conjoint, enfants, colocataires…). « Face à un patient en détresse, mon empathie ne passe pas autant à travers un écran : c’est quelque chose qui me gêne. Notre métier, c’est du relationnel avant tout ! » insiste la professionnelle.

Et puis, se déplacer fait aussi partie de la thérapie : dans certains cas, les tâches de la vie quotidienne demandent un effort considérable. Ces déplacements-là, pas forcément évidents pour les patients, marquent aussi les progrès qu’ils accomplissent. En soi, une thérapie ne doit jamais devenir un calvaire. Pour autant, le confort est parfois trompeur, et Rebecca Hiley encourage ses patients à le dépasser : « Ça peut prendre longtemps pour une personne souffrant de TOC sévères de sortir de chez elle : se laver, prendre les transports et venir au cabinet fait partie des ennuis de la thérapie, mais aussi de l’engagement de la personne. »

Par Sirine El Ansari

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