Derrière chaque meuble iconique se cache une saga créative. Cette fois, nous mettons en lumière le fauteuil lounge du designer Gio Ponti.
Nom : D.150.5
Designer : Gio Ponti
Première édition : 1952
Cette chaise longue n’est pas une énième réédition d’un design de Gio Ponti, mais un hommage à l’un des rares meubles d’extérieur qu’il ait jamais conçus. Une création qui repose depuis près de septante ans au fond de l’océan Atlantique, au large de Nantucket.
Le designer a en effet dessiné ce fauteuil pour le pont de la première classe de l’Andrea Doria. Fleuron de la flotte transatlantique italienne, le paquebot est considéré par beaucoup comme l’un des plus beaux navires de l’après-guerre. A l’époque, l’Italie n’a reculé devant aucune dépense pour en faire une vitrine de son savoir-faire. Un concours est organisé pour attirer les meilleurs ingénieurs, designers, artistes et artisans du pays dans le but de créer une opération de relations publiques flottante, mêlant art, technologie et bon goût – avec Ponti parmi eux.
L’Andrea Doria comporte alors trois classes, chacune avec ses propres espaces de détente et de loisirs. On y trouve des restaurants, des salons, une salle de cinéma et de concert, pas moins de trois piscines et une salle de sport. Les intérieurs sont ornés de fresques, de sculptures et de mobilier design. L’ensemble coûte à l’époque entre 40 et 58 millions de dollars. Selon un calculateur d’inflation en ligne, cela équivaudrait aujourd’hui à douze fois cette somme.
Plus d’une centaine de traversées entre Gênes et New York sont réalisées sans encombre. Des dizaines de milliers de passagers y embarquent, parmi lesquels Orson Welles, Tennessee Williams, Cary Grant et Joan Crawford. Jusqu’à ce que le destin s’en mêle dans la nuit du 25 juillet 1956. En raison d’un épais brouillard et d’une mauvaise interprétation radar, l’équipage ne peut éviter une collision avec le Stockholm. Ce navire bien plus petit, conçu pour naviguer dans les mers glacées, transperce le flanc de l’Andrea Doria. A ce moment-là, les passagers dorment, rêvant de leur arrivée à New York.
Une catastrophe à la Titanic est évitée: 1.650 personnes sont secourues, 52 périssent. Le lendemain matin, le navire coule définitivement avec tout son luxe, sous les yeux du monde entier – la télévision, ce nouveau média, vient en effet de faire son apparition.
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