Enfourcher son vélo est aussi un moyen de s’émanciper
Alors que le printemps et ses beaux jours s’annoncent, l’envie de se déplacer à bicyclette revient en force. Pourtant chaque année, le constat est le même : les femmes sont encore trop peu nombreuses à se déplacer en vélo. A Bruxelles, elles ne représentent, selon la dernière étude, que 36,1% des cyclistes. Cette différence s’explique par une plus grande peur de se déplacer dans la circulation, mais pas que.
Les femmes ne représentent qu’à peine un tiers des cyclistes à Bruxelles. Si la situation s’améliore un peu chaque année, on est encore loin de la parité. Les premiers obstacles qui empêchent les femmes de se mettre en selle sont les distances trop longues, le transport d’enfants ou de charges, la météo, le relief ou encore la tenue vestimentaire selon l’étude de Pro Velo intitulée « Etre femme et cycliste dans les rues de Bruxelles » et menée sur plus de 1200 femmes. Mais ce ne sont là que les motifs donnés par les femmes qui se déplacent à vélo et qui sont en réalité déjà séduites par ce mode de transport.
Pour toutes les autres, celles qui n’envisagent pas réellement de se déplacer à vélo, les raisons sont moins franches. La plupart des femmes évoquent la peur, elles n’osent tout simplement pas. Et effectivement, les femmes ont généralement une perception plus accrue des risques potentiels liés à la pratique du vélo dans un environnement urbain et seraient de ce fait plus prudentes. Néanmoins cela n’explique pas tout.
Pédaler, ce n’est pas féminin : un cliché qui a la vie dure
Il y a aussi ce qu’on appelle un biais genré. Il existe en effet un cliché tenace qui veut que pédaler, ce n’est pas féminin. « Ainsi la représentation du cycliste est essentiellement masculine. Qu’il s’agisse de cyclisme sportif, de mécanique ou de vélo au quotidien, le monde du vélo est sous domination masculine et la femme y reste l’exception », précise l’enquête de Pro Velo.
Une distinction de genre qui remonte aux origines du vélo. Lors des premières années qui ont suivi l’invention de la bicyclette, il était en effet très mal vu pour une femme de faire du vélo. Ce moyen de locomotion démocratique leur permettait de se déplacer plus rapidement et plus loin. Une liberté que craignaient certains maris et pères, car ils y perdaient un certain contrôle sur les femmes de leurs familles. Et puis on pensait que la selle est mauvaise pour les parties génitales de la femme ou au contraire que cela lui procurait du plaisir. Des clichés qui pourraient faire rire, mais qui ont malheureusement la vie dure et il existe encore certains pays où la pratique du vélo par les femmes reste compliquée.
Les femmes ont donc dû conquérir le droit de pédaler et la chose n’est pas encore totalement acquise. Cette même étude de Pro Vélo révèle ainsi que la pratique féminine du vélo est souvent perçue comme « courageuse », quand la pratique masculine, elle, est jugée comme banale. Par ailleurs, à Bruxelles, la pratique reste fortement genrée, d’autant plus dans les quartiers populaires, où le vélo reste une activité plus socialement admise pour les hommes et les enfants que pour les femmes. Enfourcher son vélo, est, pour une femme, donc aussi un moyen de se réapproprier l’espace public. Car les femmes cyclistes y subissent une double marginalisation, la première est liée à leur identité de genre dans un espace public essentiellement masculin et la seconde est due au fait que les cyclistes sont minoritaires dans une circulation dominée par l’automobile.
Un choix de tenue compliqué
Si on est loin du temps où les femmes devaient enfiler un « bloomers », sorte de pantalons bouffants pour faire du vélo, la tenue reste tout de même un problème. Une apparence jugée « féminine » serait difficilement conciliable avec la pratique du vélo. Les désagréments liés à la tenue vestimentaire (tenue pas adaptée, transpiration, vêtements froissés) sont en effet davantage cités par les femmes que par les hommes.
Cette barrière est exacerbée par les images des femmes cyclistes véhiculées dans les médias qui sont souvent trop élégantes. Cette image faussée peut accroître la pression sociale pour les femmes concernant leur image et réduire leur propension à fournir des efforts physiques lors de leurs déplacements.
Ensuite, il n’existe toujours pas ou très peu de vêtements vraiment adaptés aux femmes urbaines et cyclistes. Aujourd’hui, une femme aura donc tendance à porter des habits de « tous les jours » en prévoyant, quand c’est nécessaire, une veste ou un pantalon de pluie.
La répartition des tâches ménagères
Enfin, c’est aussi encore trop souvent la femme qui a la charge des tâches ménagères et familiales et des nombreux déplacements que celles-ci engendrent. Souvent, la femme ne doit pas simplement se rendre à son travail, elle doit aussi faire un détour par l’école ou le supermarché. Or contraintes supplémentaires et arrêts multiples sont deux éléments qui ont un impact dissuasif sur la pratique du vélo. Les enfants sont d’ailleurs cités comme freins par 23 % des femmes cyclistes régulières interrogées. Selon l’étude les femmes effectueraient d’ailleurs davantage de déplacements utilitaires pour les autres que pour elles-mêmes.
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S’émanciper grâce au vélo
Toutes les raisons évoquées ci-dessous ne devraient pas empêcher les femmes de monter sur leur vélo. Ce serait même plutôt le contraire, puisque le faire peut être un facteur d’émancipation, voire de liberté. Convaincre les femmes de faire plus de vélo, c’est aussi donner envie aux autres d’en faire puisque c’est elles qui auraient un rôle « prédictif important en matière de mobilité au sein du foyer ». Les femmes montrent donc l’exemple. Quant à la peur, qui est le principal frein avoué à une pratique régulière, elle peut être vaincue par la pratique, l’expérience et l’apprentissage. En gros, mesdames, il suffirait de s’y mettre pour être convaincue.
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