Escape Games : les jeux pour adultes envahissent les monuments historiques, stades et entreprises
Au parc des Princes, au château de Blois, à l’Opéra Garnier, en entreprise… Gages de cohésion, de rire et de valorisation personnelle, les « escape games », ces jeux d’évasion où les adultes doivent résoudre des énigmes enfermés dans une pièce, font un tabac en France.
« La concurrence est devenue acharnée », plaisante Martine Pick Lakshmanan, fondatrice de l’Happy Hour escape game à Paris. « Fin 2014, quand on a ouvert, on était le quatrième. Aujourd’hui, il y a 450 établissements en France. »
Avec parfois une confusion sur la définition de ce divertissement: « Les jeux de pistes, les rallyes, ils appellent ça des escape games », s’agace la responsable.
Ces jeux, dont certains sont construits autour d’une histoire, consistent en général à parvenir à s’échapper d’une pièce dans une durée limitée. Par petits groupes, les joueurs doivent chercher des indices disséminés dans une pièce, puis les combiner entre eux pour pouvoir avancer dans l’énigme et sortir de la pièce.
Ces contre-la-montre prenants, aux scenarii bien ficelés et aux décors travaillés (trappes, lumières, effets spéciaux) plongent les adultes, contre 25 euros en moyenne, dans une ambiance ludique et stimulante.
« Miroir de nos comportements en société », ces jeux sont, selon Martine Pick Lakshmanan, « intergénérationnels et créent de l’harmonie dans une équipe, une famille ».
Cet après-midi là, un groupe sort victorieux… à une minute du délai fatal : Yannick Baumea, commercial de 25 ans, explique avoir été « pris dedans. Avec la pression du temps, j’avais envie de gagner, mais sans ondes négatives ».
A ses côtés, Laura Mossant, 26 ans, a apprécié l’aspect « participatif: une seule personne ne peut pas y arriver avec ses compétences, il y a parfois besoin de dextérité, de coordination physique ». Quant à sa collègue Marie, 28 ans, elle y a découvert « les personnalités de chacun ».
Un révélateur social, au point que les escape games s’exportent en entreprises, et imaginent des évènements hors les murs, convoités des recruteurs.
Même les monuments historiques s’y mettent pour attirer de nouveaux publics.
Après le château de Blois, le très classique Opéra Garnier se lance dans l’aventure. Jusqu’en septembre, il accueille un escape game bilingue (français-anglais), pour démontrer qu »il ne faut pas un diadème ou un smocking pour aller à l’opéra ». Les participants doivent conjurer la malédiction du fantôme de l’Opéra, en déambulant dans le palais.
Rentable
En décembre, le club du PSG s’est également pris au jeu au Parc des Princes, en ouvrant des lieux d’ordinaire inaccessibles aux supporters (vestiaire, loges VIP, couloir des joueurs menant au terrain), un moyen de rentabiliser le stade.
Interrogés par l’AFP, les organisateurs n’ont pas souhaité communiquer de chiffres à l’issue de l’opération.
L’escape game tente aussi certains Français voulant profiter du « business assez rentable »: Arnaud, qui veut rester anonyme, espère lancer d’ici fin 2018 à Nantes une version de la « Lock Academy » à Paris, tout en gardant son travail actuel. « Une fois investi dans les travaux et le scénario, à raison de sept sessions par jour dans deux salles, ça fait un chiffre d’affaires d’un peu plus de 1.500 euros par jour. Or, pour faire tourner ces deux salles, il faut deux +game master+, ça ne nécessite donc pas de grosses ressources », calcule-t-il.
Des dérivés font leur apparition, comme les « Rage room« , « Anger room » ou « Fury room » dont le principe consiste à casser les objets d’une pièce (verres, imprimantes, écrans, meubles…) avec une batte ou d’un pied de biche.
Derniers-nés: les jeux de réalité virtuelle collaboratifs, comme « Spartrack-Vr » installé depuis mai à La Défense près de Paris.
Plusieurs joueurs, équipés de capteurs et d’un casque les plongeant dans un décor imaginaire évoluent dans une même salle pour se retrouver sous la forme d’avatars. Une manière d’éviter la cabine de jeu individuelle ou d’être derrière un écran d’ordinateur. « Tout ce qui est lié au « gaming » va se développer », prédit Emilie Coutant, sociologue de l’imaginaire au cabinet Tendance sociale. « Il faut être capable de s’engager dans une expérience dans laquelle notre identité va être un peu bousculée », explique la spécialiste, concluant : « on a compris qu’il y avait une autre manière d’accumuler des connaissances et des savoir-faire, et ça passe par le jeu ».
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