Luxe, ascèse et politique

Le confort, c’est l’ombre de l’effort. Délicieuse ombre, délicieux repos.

Quand le confort devient beaucoup plus grand que l’effort, c’est-à-dire quand l’ombre devient beaucoup plus étendue que l’objet, cela signifie tout simplement que le soleil est bas, et qu’on est au couchant d’une civilisation. L’accroissement disproportionné du souci de confort ou de la peur de l’inconfort indique la hauteur relative du soleil de son ambition, de sa liberté, de son espérance.

Le luxe, en théorie, veut un soleil très haut dans le ciel, quasiment zénithal, car il est toute brillance, et c’est pourquoi le luxe véritable est presque totalement inconfortable. Souffrir pour être belle. Effort maximal, confort minimal, beauté difficile. On dit généralement : c’est in-mettable. Qui pourrait porter ça ! C’est très beau mais je ne voudrais pas vivre là-dedans. Et les guides n’oublient jamais de dire aux touristes de Versailles que c’était horriblement mal chauffé, qu’il y avait des courants d’air partout, que les courtisans devaient cacher sous leurs vêtements des ajouts de laine et qu’il n’y avait, en somme, rien de moins commode que ce merveilleux palais. Une seule bâtisse fut à Versailles véritablement confortable : le petit Trianon. Juste après : la Révolution française.

Il y a un rapport entre le luxe et l’ascèse, ces deux choses apparemment contradictoires : c’est l’effort et le sacrifice. Et l’on peut dire que l’effort que l’un fait vers l’extérieur, l’autre le fait vers l’intérieur. Mais ils ont en commun cette tension vers la limite, ce désir du zénith.

Et la traduction politique de cette chronique est dans l’analogie entre l’ascèse, le luxe et le courage politique, contre le confort, la peur et le repli.

De tous les peuples de la Gaule… Pardi !

Grégoire Pollet

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