Témoignages: en couple, pas toujours facile de s’accorder sur la déco!

Sébastien Carion & Tine Van Doninck © Marthe Hoet
Fanny Bouvry
Fanny Bouvry Journaliste

Se mettre au diapason de sa moitié, pour ensemble rêver un nid douillet qui plaise à chacun, n’est pas une sinécure. Souvent, les dents grincent et les décisions tardent à être prises. Démonstration avec ces trois couples aux idées bien arrêtées… et pas toujours partagées.

Pendant des années, Tine Van Doninck (38 ans) a arpenté les marchés aux puces. Sébastien Carion (39 ans) décrit, lui, son style comme sobre et épuré. Il y a deux ans, il s’est installé dans l’appartement cosy de Tine.

Tine et Sébastien ont fait connaissance lors de l’assemblée générale de l’immeuble où ils vivaient tous les deux à l’époque. Au bout d’un an, le couple a décidé d’élire domicile temporairement chez Tine. Et c’est à ce moment-là que leurs goûts décoratifs se sont confrontés… « Lors de sa première visite, je suis sûre qu’il s’est dit: « Quel bric-à-brac de vieilleries » », plaisante-t-elle. « J’ai en effet été un peu effrayé, admet-il. Mais depuis, je m’y suis habitué, même si dans mon esprit, c’est toujours son appartement. Le côté spacieux de mon loft me manque. Surtout pendant le confinement, j’ai parfois eu l’impression de manquer d’air. Tout l’espace est rempli. » Tine est consciente que son intérieur déborde, avec ses services Boch des années 50, ses vases vintage, ses disques… Mais c’est dans sa nature, contrairement à son compagnon. « Lorsqu’il a emménagé ici, Seb a laissé son mobilier dans son logement, qu’il loue meublé. Il n’a apporté que deux petites armoires, des plantes et quelques objets, que j’ai intégrés par-ci par-là. »

Lors de sa première visite, je suis sûre qu’il s’est dit: « Quel bric-à-brac de vieilleries

Sébastien, lui, a grandi dans un cadre tout différent. Ses parents sont architectes d’intérieur et sa maison familiale était sobre et privilégiait les meubles design. Un goût pour les lignes pures dont il a hérité. « A mes yeux, le style de Seb est froid et un peu impersonnel, avoue Tine. J’aime les matières naturelles, les objets qui ont une histoire. Une de mes armoires vient de ma grand-mère, un fauteuil, de mon arrière-grand-mère. Je ne pourrais pas m’en défaire, pas même lorsque nous irons « vraiment » vivre ensemble. »

Depuis un an, les tourtereaux cherchent un endroit où emménager ensemble. « Nous avons trouvé un compromis, poursuit Tine. Nous cherchons un grand loft ou une habitation moderne à quatre façades. La base sera sobre pour que nous puissions, ensuite, l’habiller de matériaux chaleureux. En ce qui concerne le mobilier, ce sera un mélange de nos affaires respectives, de mes envies et des siennes. Le design et le vintage peuvent très bien cohabiter. Tout ce qu’il a n’est pas moche. Sa table, je l’ai choisie avec lui au début de notre relation. Bien qu’elle soit épurée, je la trouve belle. Mais je la combinerais à d’autres chaises. »

Et son amoureux d’acquiescer: « Tine a l’oeil. Je suis sûr qu’on trouvera un terrain d’entente et je ne veux certainement pas la bannir avec toutes ses affaires dans une petite pièce », rigole-t-il. Et si l’espace est encore trop envahi, Tine se veut rassurante: elle rangera ses vases dans une armoire!

Cameron Kobzey & Caroline Adriaens. A côté de la cheminée, une lounge chair signée Eames: une pièce classique qui conjugue design et confort cosy.
Cameron Kobzey & Caroline Adriaens. A côté de la cheminée, une lounge chair signée Eames: une pièce classique qui conjugue design et confort cosy.© Marthe Hoet

Elle aime le minimalisme, lui la déco campagnarde classique. Mais ils ont trouvé un juste milieu: Cameron Kobzey (41 ans) et Caroline Adriaens (39 ans) ont acheté une vieille ferme dont ils ont abattu plusieurs murs. Une maison moderne et sobre, mais chapeautée d’un toit de chaume.

Dans le quartier, on ne peut pas rater l’habitation de Cameron et Caroline: c’est la seule qui a un toit de chaume! Il faut dire que le Canadien, installé en Belgique par amour pour elle, possède une entreprise, North Ridge, réalisant ce type de toiture. « Si cela ne tenait qu’à lui, la maison aurait davantage gardé le caractère d’un presbytère, poursuit la trentenaire. Il voulait des fenêtres et des portes coulissantes en chêne, mais nous avons finalement opté pour l’aluminium, plus pratique et plus harmonieux dans l’ensemble. » « C’est peut-être dû à mes racines canadiennes, répond-il. J’ai grandi au pied des montagnes Rocheuses, entouré de chalets en bois typiques. Mais j’estime qu’une demeure se doit d’être chaleureuse, avec de nombreux éléments authentiques. »

Si cela ne tenait qu’à lui, la maison aurait gardé le caractère d’un presbytère

Pourtant, pendant la rénovation, le couple ne s’est pas disputé et un compromis a vite été trouvé. Aujourd’hui, deux ans plus tard, ils se sentent tous deux totalement chez eux. Cameron a laissé à sa compagne le soin de concevoir l’intérieur: « Je n’y connais pas grand-chose. Mais elle a tenu compte de mes goûts. » Caroline ne désirait d’ailleurs rien imposer: « Avant la rénovation, nous avions composé un moodboard Pinterest, et la différence entre nous était frappante. Mais finalement, nous avons réussi à réaliser un bel ensemble cohérent: une base sobre rehaussée d’accents chaleureux en bois. La cuisine est conforme à mes envies, en laqué blanc, avec un plan de travail blanc, une crédence en marbre et des tabourets hauts noirs. Le coin salon est cosy et campagnard, avec un parquet rustique et le feu ouvert authentique que nous avons restauré. Mais j’avoue que j’ai peut-être obtenu un peu plus souvent ce que je voulais. Il collectionne les petites maisons en porcelaine de Lilliput Lane, des miniatures faites à la main de cottages anglais. Avec des toits en chaume, et tout et tout. Il voulait les exposer mais j’ai refusé. On n’est pas à Bokrijk! »

Jérôme Peteno & Mélanie Manfroid
Jérôme Peteno & Mélanie Manfroid© Marthe Hoet

Pour Open Architectes, Jérôme Peteno (44 ans) dessine des maisons épurées, finalisées dans les moindres détails. Mais chez lui, il a dû accorder ses violons avec Mélanie Manfroid (42 ans), qui avait une vision différente. Le résultat: une demeure en rénovation progressive, aux accents rétro et éclectiques.

Jérôme le savait depuis toujours : bien qu’il soit architecte, il ne désirait pas faire construire. Mais chaque fois qu’il visitait une maison à acheter, avec son épouse, il imaginait les murs à supprimer et les transformations à faire… « J’étais un peu désespérée parce que moi, je me disais que ça ne servait à rien de tout casser », se remémore Mélanie. Après trois ou quatre ans, le couple tombe cependant sur cette ancienne maison d’un ex-directeur de charbonnage, près de Mons. Et c’est le coup de coeur. « Mélanie m’a demandé: « Quel mur on va abattre? » Mais pour moi, il n’y avait rien à changer! On pouvait tout garder, même la cuisine. On était d’accord », se félicite Jérôme.

Mélanie m’a demandé: « Quel mur on va abattre? » Mais pour moi, il n’y avait rien à changer!

L’aménagement ne fut toutefois pas des plus simples et le gestionnaire de chantier dut plus d’une fois faire les tampons, recevant des consignes contradictoires de l’un et l’autre. « Je suis plus pragmatique et Jérôme a une vision idéaliste et plus esthétique », résume Mélanie. « Moi, j’ai tendance à ne rien avoir. Quand j’ai déménagé chez elle, au début de notre relation, toutes mes affaires tenaient dans une petite camionnette. Elle est plutôt conservatrice. Parfois, c’est « intéressant ». Mais bon le grenier est déjà full… », rigole le Montois. Conclusion, chaque étape de lifting qui s’impose, dans ce bâtiment du XIXe siècle, est l’objet d’âpres discussions.  » On doit remplacer les châssis et j’ai dessiné une dizaine de versions avant qu’on tombe d’accord. Et pour les luminaires du séjour, j’ai déjà fait 50 propositions. J’arrive à chaque fois super emballé en disant que j’ai trouvé un truc terrible. Et elle me dit: « Je n’aime pas. » Bref, on a toujours des ampoules provisoires. C’est probablement la cliente la plus compliquée que j’ai eue », plaisante Jérôme, jetant un regard vers sa femme qui avoue… ne pas aimer se laisser faire.

Un débat permanent donc, mais qui est vécu avec complicité, d’autant que Jérôme y trouve un équilibre. « Au bureau, on privilégie les choses réglées au millimètre… Chez moi, c’est différent, il faut que ça vive, qu’il y ait des coups sur la table, un peu de bazar. Ce que je fais au boulot, c’est une forme d’épanouissement personnel. Ici, c’est un épanouissement familial. Il y a du mobilier que je n’aurais jamais mis dans ma maison à moi, mais dans notre maison à nous, oui. Parce que par exemple, ce « superbe » meuble là-bas, c’est celui du grand-père de Mélanie. Esthétiquement, il n’a aucune valeur, on peut même dire qu’il n’est pas beau, mais sentimentalement parlant, c’est important pour elle, donc ça le devient pour moi. »

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