Rencontre avec l’influenceuse belge Lufy, aux rênes de L’Internet Show (RTBF): « en 2022, s’en prendre au physique des femmes, c’est totalement has been »

© Aaron Lapeirre
Isabelle Willot

La jeune femme aux millions de followers vient de prendre, avec son mari Enzo, les rênes de L’Internet Show, le magazine de la RTBF qui décrypte les phénomènes du Web. Une consécration pour celle qui a posté son premier tuto make-up sur YouTube il y a dix ans. Et qui s’apprête à faire son entrée dans le métavers.

La télévision reste l’un des médias les plus puissants qui soient. Sa force, c’est qu’elle ne cesse jamais de se renouveler. Si j’ai accepté cette collaboration, c’est d’abord parce que j’y prends énormément de plaisir. Cela me permet aussi de toucher une tout autre audience que celle qui me suit sur les réseaux. Et de bénéficier ainsi de la reconnaissance du grand public pour le métier encore méconnu qui est le mien. A la télévision, je peux m’exprimer, ne m’occuper que du contenu, sans avoir à me soucier des contraintes techniques. Sans mes dix années d’expérience sur YouTube, je serais moins à l’aise. Enzo et moi, nous travaillons sans prompteur, juste avec des fiches. L’impro, les échanges spontanés, c’est notre force, notre marque de fabrique.

Je n’ai pas fait ce métier pour être célèbre. Tout a démarré par hasard, j’étais étudiante en traduction, j’aimais les langues mais je savais au fond de moi que je ne bosserais pas dans ce secteur. Pour combler l’ennui entre deux cours, j’ai commencé à faire des tutos make-up toute seule devant ma caméra. J’ai tout appris sur le tas, le maquillage, la prise de vue, le montage. On devait être une vingtaine en francophonie à poster régulièrement des vidéos. J’étais loin d’imaginer que ça me mènerait là où je suis aujourd’hui, moi qui suis en réalité quelqu’un d’introverti. La première fois qu’un de mes abonnés m’a reconnue dans la rue, ça m’a semblé étrange. Mais je me suis habituée. C’est toujours bienveillant. Ça fait du bien même, surtout après les périodes d’isolement que nous venons de traverser, de pouvoir matérialiser les personnes qui me suivent.

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Enzo et moi ne sommes jamais dans la compétition. Ce serait même plus difficile de faire ce métier si nous ne partagions pas cette aventure. Car il faut la vivre de l’intérieur pour comprendre ce que cela implique. L’exposition bien sûr. Mais aussi le travail de l’ombre. Un Reel d’une minute sur Instagram peut demander deux journées de travail. Et je ne vous parle pas des crises de nerfs par lesquelles il nous arrive de passer pour trouver la mise au point parfaite. J’étais déjà dans le game depuis trois ans avant de lui proposer de me rejoindre sur ma chaîne, puis il a développé ses réseaux. Si je suis parfois davantage dans la lumière, il n’en prend jamais ombrage. Mes réussites sont les siennes et réciproquement.

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Il faut une frontière nette entre le privé et l’intime. Comme mes contenus portent sur tout ce qui touche au lifestyle et à la vie de tous les jours, je partage des pans entiers de mon quotidien, cela fait partie du jeu. Pourtant, j’entends parfois dire que je me dévoile peu. Montrer des photos de mon mariage, je l’ai fait volontiers. Mais vous ne nous verrez pas dans notre lit. Je n’expose pas non plus ma famille ou mes amis. Tout ce qui touche à ce que j’appelle l’intimité. Ces instants dont j’ai besoin pour me ressourcer. Il y a un tel déballage sur les réseaux que les gens n’en ont jamais assez. Les images défilent. On regarde vite fait et puis « next »! C’est un modèle à repenser. Moins de flux continu, plus de qualité.

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La liberté d’expression n’est pas sans limite. Il a pu arriver que je me prenne des commentaires si je prenais du poids. Il s’agissait souvent de spéculations sur une éventuelle grossesse. Quand ça se produit, et c’est de plus en plus rare, je ne me gêne pas pour faire une mise au point. Je n’ai pas de modérateur. Certes, des liens de proximité peuvent s’instaurer. Mais je ne permettrai jamais à des inconnus de critiquer mon corps. Les échanges doivent rester corrects et je suis heureusement épargnée par les contenus haineux. J’ai l’impression que les choses évoluent dans le bon sens. En 2022, s’en prendre au physique des femmes, c’est totalement has been.

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Influenceuse? Autant cette dénomination-là plutôt qu’une autre. Par le passé, ça a pu me déranger, sans doute à cause de l’idée que c’était forcément un job de nunuche… Certains préfèrent se définir comme des créateurs de contenu. Mais maintenant qu’il existe enfin un mot connu par le plus grand nombre, gardons-le! Ce qui importe c’est que l’on reconnaisse le travail qui se cache derrière. Chaque jour, nous devons nous remettre en question, apprivoiser le fonctionnement de nouvelles plates-formes. YouTube hier, Instagram et TikTok aujourd’hui. Demain, tout l’univers du métavers que je commence à explorer. L’apprentissage ne s’arrête jamais et la charge mentale est plus lourde qu’on ne le pense. Certes nous créons de belles images. mais nous sommes avant tout des stratèges en communication.

L’Internet Show, chaque jeudi soir sur Tipik.

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