Dolce vita dans les Marches, région d’adoption de la créatrice Ellen Verbeek

Ellen Verbeek devant l'église S. Maria della Misericordia, à Sant'Elpidio a Mare. © DANIEL MEVIS
Nicolas Balmet
Nicolas Balmet Journaliste

La créatrice Ellen Verbeek a déménagé en Italie, dans les Marches, en quête de lumière, mais aussi pour se rapprocher de ses artisans. L’occasion d’un focus sur cette région où règne une douceur méditerranéenne.

Chaque matin, vers 6 heures, 6 h 30, Ellen Verbeek (47 ans) fait ce qu’elle n’a jamais fait. Elle se lève. Peut-être est-ce parce qu’elle vit désormais à la montagne, ou parce qu’en Italie, elle ressent mieux les saisons, mais depuis mars de cette année, la créatrice belge de chaussures est « du matin ». Elle se prépare une tasse de café en regardant par les fenêtres de la cuisine ou sur sa terrasse à Sant’Elpidio a Mare, son village d’adoption, et les collines environnantes. Puis elle monte dans la voiture, parcourt les ruelles historiques, et se gare au bord de l’eau une dizaine de minutes plus tard pour se baigner dans la mer.

Moins connue du côté sud de notre frontière linguistique, Ellen Verbeek n’en est pas moins appréciée de toutes les amatrices de mode belge pour l’utilisation de matériaux naturels et les lignes architecturées de ses souliers. Certains de ses talons sont sculptés à la main dans le bois, ce qui donne de belles formes en arc et démontre l’importance que la quadra accorde au « fait main ». Ce qui explique aussi le déménagement récent de la Belge. La région transalpine des Marches, où se trouve sa nouvelle maison, est en effet située sur la côte Adriatique, sur le mollet de la botte, et abrite depuis des lustres les meilleurs artisans chausseurs d’Europe.

« C’est une région que je connais depuis que j’ai lancé ma marque, en 2000, précise Ellen Verbeek lorsque nous nous rencontrons à Anvers, où elle passe encore régulièrement. Dans les années 70 et 80, cette région s’est imposée comme celle de l’industrie de la chaussure. Presque chaque maison avait un garage à l’arrière où l’on fabriquait des modèles. Les fabricants exportaient dans le monde entier. Comment les Italiens ont-ils fait sans parler un mot d’anglais, je l’ignore. Mais aujourd’hui encore, la plupart des chaussures « made in Italy » sont fabriquées dans les Marches. Je travaille avec des artisans âgés et expérimentés qui savent comment transformer mes idées architecturales en chaussures modernes et portables. J’ai déjà travaillé avec des producteurs portugais et espagnols, mais les chaussures ne sont jamais aussi souples et de qualité qu’ici. »

Lorsqu’elle vivait encore en Belgique, Ellen Verbeek se rendait en Italie environ quatre fois par an pour suivre les productions, visiter les ateliers et concevoir des échantillons. Elle réservait alors un logement à proximité de ses contacts locaux. C’est ainsi qu’elle est peu à peu tombée amoureuse de cette contrée et plus particulièrement de Sant’Elpidio a Mare, où elle vit aujourd’hui: « Le village historique est construit sur le flanc d’une montagne et possède des ruelles pittoresques, des vues magnifiques, des bâtiments du Moyen Age et de grands bars où des concerts de jazz sont régulièrement organisés. »

Dolce vita dans les Marches, région d'adoption de la créatrice Ellen Verbeek
© DANIEL MEVIS

Plus près des producteurs

C’est dans une de ces maisons médiévales à quatre étages, adossées au flanc de la montagne, que la créatrice belge vit désormais. Pendant ses premiers mois dans la Botte, Ellen Verbeek ne s’est toutefois pas sentie très bien. « Par moment, j’avais mal au ventre de stress. Mes racines ne sont pas ici. Comme je n’ai pas d’enfants, partir à l’étranger n’a pas été une décision difficile à prendre, mais je n’aime pas non plus être seule et je dois maintenant apprendre à tout recommencer, sans famille ni amis. Je peux difficilement demander à un de mes fabricants de déjeuner avec moi tous les jours, avec mon italien bancal », rigole-t-elle.

Peu à peu, Ellen Verbeek s’est toutefois faite au changement et a appris à lâcher prise. Désormais, elle peut envisager de profiter de cette nouvelle vie pour améliorer encore ses collections. Elle va pouvoir se rapprocher encore plus de ses producteurs. Et elle s’en réjouit, car après toutes ces années, les chaussures restent sa plus grande passion. Qu’il s’agisse du talon en bois, de la semelle intérieure en cuir ou de la doublure cousue, elle traite chaque aspect du processus de conception avec la même attention et la même précision. « Maintenant que je vis ici, j’ai envie d’explorer encore davantage les possibilités qui s’offrent à moi, explique-t-elle. Je dois d’abord établir un bon contact avec les producteurs, car ici, le client n’est pas roi. Que vous soyez une grande ou une petite marque, les Italiens doivent avoir envie de collaborer avec vous, sinon vous n’arriverez à rien. Je vais donc boire de nombreux cafés, et parler du temps qu’il fait et de l’histoire de Pompéi ou de tout autre point fort de la culture italienne. Nous ne parlerons semelles qu’après. C’est une approche très différente de celle de la Belgique. » Une fois ce cours intensif d’italien terminé, Ellen Verbeek pourra se créer de nouvelles racines… et faire évoluer encore sa marque.

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