Chanel, Inès de la Fressange, Claudia Schiffer, Paris défile

© Catwalk Pictures

Quelle est cette mélancolie qui semble avoir saisi Karl Lagerfeld, directeur artistique de Chanel, pour qu’il fasse transformer le Grand Palais en un paysage volcanique post-éruption ?

Quelle est cette mélancolie qui semble avoir saisi Karl Lagerfeld, directeur artistique de Chanel, pour qu’il fasse transformer le Grand Palais en un paysage volcanique post-éruption ? Le monde est noir – au sol, du gravier comme du charbon d’où s’échappent des fumerolles ; à l’horizon, une forêt calcinée, floutée par la brume. Une lumière blanche, comme un premier matin du monde, un monde nouveau, coule de la verrière et vient chahuter cette première impression crépusculaire. Deux énormes panneaux griffés des initiales de Coco Chanel s’abaissent, comme des pont-levis, d’un bout et de l’autre du catwalk, « Cure » à l’entame et « A forest », en bande-son mixée par Michel Gaubert. Déboule une armada de jeunes femmes très rock d’abord, puis très maille et puis très dentelle, avec passage de deux ou trois figures mâles dans la même déclinaison. « Nonchalance in couture is very important, twittait l’homme au catogan il y a quatre jours à peine. Because couture without nonchalance is just the drag queen attitude of women of an era past. » Cela étant posé, il est ultra logique que cette collection Chanel automne-hiver 11-12 soit vive, énergique et très couture parfois, avec un magnifique travail de broderie et de perlage. Les pantalons larges sont glissés dans des chaussettes qui tirebouchonnent dans des godillots à lacets et bout rond ; les autres, plus droits, se portent avec revers au-dessus des chevilles mises en valeur par des escarpins monochromes, noirs, années soixante. La laine dévoile les dos et ose même les franger, le cuir joue les prolongations en jumpsuit matelassé. Le vert s’invite en touches d’espoir, en cravate, en boléro de tweed. Tandis que la dentelle part à l’assaut de combinaisons qui n’ont pas froid aux yeux. Et c’est beau. Une évidence pour Inès de la Fressange, jeans blanc et pull over jaune tandis que Karl Lagerfeld un peu plus loin parle de sa « fatigue des couleurs vives » et de son gris qui n’est pas noir, de ce décor de forêt brûlée, si romantique in fine, qui n’est pas celui de la fin du monde, mais celui de ses souvenirs d’enfance, de la poésie de Paul Verlaine et des films de Fritz Lang. Avec lui, pour Chanel, il y a toujours un peu de subliminal.

Claudia Schiffer ne l’ignore pas, qui ne défile plus pour Karl, Chanel ni personne d’autre, mais avait envie de créer quelque chose où elle pourrait s’exprimer. Et tant qu’à faire, que ce soit joli, confortable, magnifiquement réalisé, doux et désirable. Pari tenu. Avec une petite ligne d’indispensables robes, pulls, manteaux en cachemire qui portent son nom, avec ravissante araignée en guise de signe de reconnaissance – elle aime les insectes, elle les trouve si beaux à les regarder de tout près. Le genre de vêtements doudou donc – mais élégants – juste parfaits « pour aller conduire les enfants à l’école puis filer au boulot », en gris chiné ou foncé, bleu nuit, noir, tricotés ultra fin ou ultra gros. Claudia avait choisi aujourd’hui la version robe évasée bleu navy – on a failli être jalouse.

Anne-Françoise Moyson

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