Milan: Des sculptures organiques chez Jil Sander

La journée de vendredi a vu émerger quatre styles différents, lors de la Fashion Week de Milan.

La journée de vendredi a vu émerger quatre styles différents, lors de la Fashion Week de Milan.

Commençons par celui qui a gagné tous les suffrages à l’applaudimètre : le Belge Raf Simons, pour la maison Jil Sander. Le directeur artistique a conçu une collection très pure et sophistiquée. Le public en est d’ailleurs resté coi, pendant que de douces notes de piano et ensuite des battements de coeur emplissaient la salle, avec en bruit de fond les clics des photographes.

On retiendra de belles matières – drap de cachemire, chinchilla, flanelle fine et crêpe de laine -, ainsi que la justesse extrême dans les coupes. Une beauté sobre et une simplicité ostentatoire : des cols roulés, manteaux sans col, tailleurs sans chemise. Les teintes sont monochromes et, elles aussi, pures (camel, beige, ivoire, blanc, gris anthracite, marine et noir), mais sont fortement rehaussées par les couleurs flashy (orange, fuchsia, jaune) des ballerines pointues et plates.

Dans un second temps, Raf Simons s’est inspiré du travail du sculpteur-céramiste français Pol Chambost, pour construire ses vêtements de façon sculpturale et organique. Les robes prennent du volume. Une couleur acidulée apparaît dans un pli ou dans l’envers d’une jupe évasée. Et les créations, toutes imprégnées d’ondulations et de lignes sensuelles, semblent avoir été moulées directement sur le corps d’une femme.

Plus tôt dans la journée, Giorgio Armani a remonté le temps, jusqu’à l’époque de ses débuts. Place aux années 80, en mode noir et gris. Place aux épaulettes, qui apportent une géométrie angulaire. Aux bérets vernis noirs, calés à la verticale. Dans les baffles, Tina Turner est « simply the best » et Tanita Tikaram « montre ses yeux », dans une version bien plus cadencée. Tout en contrastes, les cardigans de tricot sont mixés à du satin. Mais quand vient la nuit, les tenues et les gants s’allongent, alors que les talons rapetissent jusqu’au sol. On met ses épaules à nu et on se pare d’une texture voilée. En parsemant le tout d’une pluie de strass et brillants.

C’est à un autre type de show que se sont livré Domenico Dolce et Stefano Gabbana, dans le cinéma Metropol. Comme Maria Callas y a enregistré le mémorable Norma de Bellini, le duo s’est inspiré du lieu et de cette atmosphère d’opéra, pour le défilé de D&G. Les robes bustier sont rikiki et bouffantes à l’extrême. Le tout dans des matières piquées à la tapisserie ou dans des versions matelassées, quadrillées de strass. La Callas n’est pas loin, puisque son visage trône sur plusieurs tee-shirts imprimés. Les teintes varient entre l’ocre, le bourgogne, le bleu nuit et le noir. Il y a aussi de beaux noeuds partout, des médailles d’étoffes, de petites vestes cintrées et galonnées, des jeans slim gris strassés, des tutus blancs tombant sur les genoux… Et en guise de ceinture, des tresses de cordes desquelles pendent deux floches, comme celles que l’on noue aux rideaux…

Après le show, la nostalgie, avec l’univers rempli de mélancolie de Burberry Prorsum. Les teintes sont fanées et varient généralement entre le beige, le brun, l’anthracite et le noir. Pour cette collection de l’hiver prochain, Christopher Bailey a voulu des coupes assez loin du corps. Le pantalon est flottant sur les hanches, avant de se resserrer vers le bas ; le trench-coat est oversize et cache des robes de mousseline noires ou blanches ; la jupe s’évase dans de multiples plis, jusqu’en dessous des genoux… La griffe britannique puise dans l’histoire de son pays : ses intellectuels arty des années 20 et 30 ne sont pas très loin, Virginia Woolf en tête. Homme ou femme, on ne sait plus très bien qui flotte dans ces vestes. D’autant que, comme à son habitude, Bruberry a dispersé quelques silhouettes masculines sur les catwalks. Une vraie confusion des genres.

Catherine Pleeck, à Milan

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