Les moments majeurs de la Fashion Week la plus importante de l’Histoire

Le défilé Chanel fait partie des temps forts de cette Fashion Week de Paris - Getty Images
Le défilé Chanel fait partie des temps forts de cette Fashion Week de Paris - Getty Images

À Paris s’achève ce soir la Fashion Week, et avec elle la saison de mode la plus importante depuis aussi loin qu’on s’en souvienne. Et non, ce n’est pas une exagération.

Le point d’orgue de cette Fashion Week fut le grand début de Matthieu Blazy chez Chanel, hier soir, dans un Grand Palais transformé en planétarium. Mais ce défilé spectaculaire n’était que la conclusion d’un séisme de trois semaines dans le monde de la mode. Tout a commencé en douceur à New York et à Londres, a pris de l’ampleur à Milan, avant d’exploser à Paris, avec une douzaine de premiers défilés pour de nouveaux directeurs artistiques à la tête des plus grandes maisons.

La « big bang » en résumé: à Milan, Demna a pris les rênes de Gucci, Louise Trotter a imprimé sa marque chez Bottega Veneta, Simone Bellotti a repris Jil Sander, et Dario Vitale a provoqué la controverse chez Versace.

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À Paris, de nouveaux créateurs se sont succédé sur les podiums de Dior (Jonathan Anderson, transfuge de Loewe), Balenciaga (Pier Paolo Piccioli, ancien de Valentino), Celine (Michael Rider, formé chez Polo Ralph Lauren), Loewe (le duo américain de Proenza Schouler, parti de leur propre label), Maison Margiela (Glenn Martens, qui conserve également la direction de Diesel), Mugler (Miguel Castro), Gaultier (le jeune créateur néerlandais Duran Lantink), Chanel (Matthieu Blazy, ex-Bottega Veneta) et Carven (Mark Thomas, bras droit de Louise Trotter dans cette même maison).

Les 9 moments-clés de cette Fashion Week historique

Matthieu Blazy et la renaissance de Chanel

À Paris, tous les regards étaient tournés vers le très attendu début de Matthieu Blazy (un Français aux racines belges, diplômé de La Cambre à Bruxelles) chez Chanel. Il avait la lourde tâche de tourner la page de quarante années d’un règne partagé entre Karl Lagerfeld et son bras droit Virginie Viard. Et, comme on s’y attendait presque unanimement, il a relevé le défi avec brio.

Le défilé s’est tenu, comme le veut la tradition, au Grand Palais — un lieu avec lequel la maison entretient un partenariat de longue date. Sous la verrière monumentale de la nef, une douzaine de planètes, presque grandeur nature, scintillaient doucement dans l’obscurité.

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L’échelle était grandiose, mais l’atmosphère intime. Blazy s’est plongé dans les archives de Chanel, et plus particulièrement dans la personnalité de Gabrielle « Coco » Chanel. La collection regorgeait de références historiques : des brins de paille ondulant sur une robe en toile de jute (un matériau également mis à l’honneur cette semaine par Comme des Garçons), des grues brodées, ou encore des allusions aux flacons minimalistes des parfums Chanel, blancs, bordés de noir.

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Gabrielle Chanel aimait porter les vêtements de son amant Arthur « Boy » Capel. C’est donc par une série de silhouettes résolument masculines, à commencer par un costume gris, que Matthieu Blazy a ouvert le défilé. Il a collaboré avec Charvet, le légendaire chemisier de la place Vendôme, pour une série de chemises classiques. Pas d’inquiétude: la collection comptait aussi de nombreuses tenues ultra-féminines, souvent traversées d’une touche art déco, parfaites pour le tapis rouge (Nicole Kidman, récemment passée de Balenciaga à Chanel en tant que nouvelle ambassadrice, assistait au défilé, aux côtés d’une centaine d’autres célébrités).

En résumé: le nouveau directeur artistique a accompli exactement ce qu’on attendait de lui. Il a signé une collection dans laquelle Chanel reste reconnaissable entre toutes, mais qu’il a su libérer — au sens propre comme au figuré — du poids du passé. La femme Chanel demeure chic, mais elle s’est affranchie de son corset. Elle est libre, donc moderne.

Aperçus au premier rang : Jennie de Blackpink, Tilda Swinton, Angèle, Raf Simons, Vanessa Paradis, Pedro Pascal, Jeff Bezos et Lauren Sanchez, entre autres.

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L’ascension (belge) de Julie Kegels

« C’est elle qui a demandé à venir », confie Julie Kegels à propos de la présence de la superstar Rosalía à son défilé, organisé sous la station Passy, là où le métro gronde sur un pont en direction de la tour Eiffel. Faire venir une célébrité en front row représente d’ordinaire un investissement considérable pour une marque ; ici, l’initiative venait de la chanteuse elle-même.

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Rosalía a ensuite assisté aux défilés de Dior et Schiaparelli à Paris — ces deux maisons ayant également pris soin de son séjour.

C’était la quatrième présentation de Julie Kegels, mais son tout premier défilé inscrit au calendrier officiel. Avec ou sans Rosalía, c’était une nouvelle étape franchie avec assurance.

La collection, intitulée « Quick Change », rendait hommage aux femmes toujours en mouvement — celles qui se changent à la hâte entre deux rendez-vous alors qu’elles sont déjà en retard. Kegels y a dévoilé des collaborations avec les marques belges Scapa Sport et Marie-Jo. De cette dernière, elle a récupéré des stocks dormants de lingerie pour créer des soutiens-gorge patchwork.

Autre détail charmant: un ruban adhésif pour la poitrine, imprimé de motifs de dentelle — envoyé aux invités comme accessoire et comme invitation.

Le parti pris de Louis Vuitton

Aucun journaliste du Benelux — pas un seul — n’a été invité au défilé de Louis Vuitton, ni même au « re-see » organisé le lendemain. Ces re-sees, où l’on peut observer les vêtements de près, exposés sur des mannequins ou suspendus sur cintres, servent souvent à offrir une seconde chance à celles et ceux qui n’ont pas eu accès au défilé. En clair : une sorte de lot de consolation.

Depuis plusieurs saisons, et plus que jamais cette fois-ci, les journalistes issus de petits marchés comme la Belgique ou les Pays-Bas se voient exclus des premiers rangs.
La justification officielle? « La salle est très petite cette saison. » En réalité, l’espace est souvent réservé aux VICs — Very Important Clients — autrement dit, les clients les plus lucratifs, jugés plus rentables que la presse.

« Les réseaux sociaux ont transformé la mode en Hunger Games », déclarait Glenn Martens dans un podcast du Business of Fashion. En privilégiant les influenceurs et en écartant les journalistes professionnels, les marques ont elles-mêmes alimenté cette dynamique. Les conversations autour de la mode sur les réseaux peuvent certes être vives et intéressantes, mais elles sont aussi souvent saturées de bruit, d’approximations et de fausses informations.

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L’arrivée remarquée de Dario Vitale chez Versace

Le défilé Versace, orchestré par Dario Vitale, fut sans conteste le plus controversé de Milan. Une épilogue parisienne a pris la forme d’un re-see, oui encore, où la collection complète était présentée sur mannequins dans un ancien atelier de souffleurs de verre.

Vitale a réussi, à l’instar de Matthieu Blazy chez Chanel, à dépoussiérer l’esthétique de Versace et à propulser la maison vers 2025. Reste à voir si cette nouvelle ère de Versace sera un succès commercial lors de sa sortie en boutique au printemps prochain.

En tout cas, c’est notre coup de cœur de la saison.

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L’hommage émouvant de Yohji Yamamoto à Giorgio Armani

Autant qu’on le sache, Yohji Yamamoto fut le seul créateur à rendre hommage publiquement à Giorgio Armani sur un podium. Lors de son défilé, comme toujours dans la salle de bal dorée de l’hôtel de ville, deux mannequins portaient de longues tuniques noires ornées d’une impression noir et blanc d’une ancienne publicité Armani. Sur le devant figurait une réplique de la lettre qu’Armani avait envoyée à Yamamoto peu avant sa mort — une invitation à assister à son défilé milanais, deux semaines plus tôt, célébrant le cinquantième anniversaire de sa maison.

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« Le business de la mode est en train de disparaître », confiait le créateur octogénaire dans Business of Fashion. Ce n’est pas tout à fait exact. Mais il est vrai que la génération de Yohji Yamamoto, celle des pionniers d’une mode poétique et radicale, touche à sa fin — et c’est profondément regrettable.

Le triomphe de la mode belge

La mode belge est-elle encore pertinente ? Plus que jamais. Aujourd’hui, Chanel, Gucci, Saint Laurent, Alaïa, Courrèges, Rabanne et Marni sont dirigés par des anciens élèves des écoles de mode belges (et même chez Prada, où Raf Simons, formé en design à Genk, continue d’imprimer sa marque).

Dries Van Noten et Maison Margiela entament, chacun à leur manière, de nouveaux chapitres prometteurs de leur histoire. Et une nouvelle génération d’esprits créatifs prend la relève : Julie Kegels, Marie Adam-Leenaerdt, Meryll Rogge, Stéphanie D’heygere et Façon Jacmin incarnent ce renouveau belge sur la scène internationale.

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L’an prochain, Anvers célébrera les quarante ans des « Six d’Anvers ». Mais le Flanders District of Creativity a tenu à rappeler, lors d’un cocktail organisé dans un café des Grands Boulevards à Paris, que la jeune génération n’est pas oubliée. « À deux heures du matin, les propriétaires du café sont venus nous dire qu’il était vraiment temps d’arrêter », racontait en riant Elke Hoste, l’une des coorganisatrices, le lendemain.

Parmi les invités: la maquilleuse Inge Grognard et Tony Delcampe, directeur de La Cambre et co-hôte de la soirée, mais aussi Luc Tuymans, Nicolas Di Felice, An Vandevorst et Filip Arickx, Florentina Leitner, Marie Adam-Leenaerdt, Julie Kegels, Ségolène Jacmin et Igor Dieryck, entre (beaucoup d’)autres.

Glenn Martens et la renaissance de Margiela

Glenn Martens a ouvert sa première collection de prêt-à-porter pour Maison Margiela avec une scène à la fois tendre et surréaliste: un orchestre d’enfants, habillés de tabliers trop grands, jouant une mélodie de classiques revisités. Une fillette haute comme trois pommes frappait sa caisse claire avec un enthousiasme désarmant, laissant parfois tomber ses baguettes au sol ; à côté d’elle, un garçon d’environ sept ans observait chaque mannequin défiler, les yeux pleins d’admiration.

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Les mannequins portaient des attelles buccales orthopédiques, image troublante et distrayante, mais aussi allusion subtile aux quatre points de couture emblématiques du logo Margiela.

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Les vêtements, eux, se révélaient portables, contemporains et fidèles à l’esprit du fondateur. Martens s’est reconnecté à l’héritage de la maison, là où son prédécesseur, John Galliano, imposait surtout son propre univers.

Au programme: cuir noir, costumes défaits, impressions de papier peint écaillé, denim à profusion, lingerie détournée et bande adhésive transformée en détail couture. Une collection à la fois brute et sensible, mélange d’audace et de mémoire, dans la plus pure tradition margielesque.

Le retour de la provocation

Ce fut une fashion week intense, où beaucoup de grandes maisons jouaient gros. Peu ont pris de véritables risques — et encore moins ont osé l’humour. C’était sans compter sur COUCOU BÉBÉ, un label français totalement obscur, qui a pris tout le monde de court et dont le créateur avait loué un cinéma porno de Pigalle.

Dans deux petites salles de sous-sol, il projetait un film composé d’images détournées de sites web, de scènes explicites tournées dans le Bois de Boulogne, et d’un unboxing d’une starlette d’OnlyFans, Kiki X, lèvres et poitrine retouchées, pour une collection intitulée « Botox ». La jeune femme est brièvement apparue sur scène — dans le noir complet. Puis un message s’est affiché à l’écran : « Regardez à gauche: vous allez assister à une scène de sexe en direct. »

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Quelques minutes plus tard, les lumières se sont rallumées. Le spectacle était étrange, puéril, outrageusement vulgaire, mais aussi, il faut l’avouer, hilarant. On espère simplement qu’un coup de serpillière avait été passé avant la représentation.

Chez Gaultier, maison pourtant marquée par une tradition d’audace, Duran Lantink a tenté une approche similaire — sans vraiment convaincre. Là où Gaultier fut jadis un « enfant terrible » visionnaire, prônant diversité et liberté queer à une époque où cela restait marginal, Lantink a préféré ignorer les archives et construire sa vision à partir de ses propres souvenirs.

Une démarche sincère, mais dépourvue de la dimension sociétale qui faisait la force de son prédécesseur.

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Nouveau départ

Cette saison de la mode s’est clôturée aujourd’hui avec les défilés du duo belge Façon Jacmin et de Meryll Rogge, suivis d’un cocktail où cette dernière a présenté une collaboration avec Wouters & Hendrix. Une fin en douceur mais pleine d’attente: la créatrice fera ses débuts comme directrice artistique de Marni à Milan lors du prochain cycle de défilés.

En somme, la Belgique clôt cette saison comme elle l’a traversée: discrète, exigeante, et essentielle.

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