Génies en herbe: les success stories de 5 kids de la génération Z

Ozan Yenersoy et Adèle Van Eyll © JEF BOES
Isabelle Willot

Les kids de la génération Z sont les premiers véritables natifs de l’ère numérique. Du femtech à la robotique: ces jeunes-ci jonglent avec les technologies depuis le berceau, ou presque.

Un e-shop face à la crise

Passionné de développement informatique et d’infographie, Houdayfa Skhairi a codé la plate-forme MiniHouse. Ce site Internet a été créé par Ozan Yenersoy (18 ans) et Adèle Van Eyll (18 ans), avec six autres membres du collège bruxellois Saint-Michel.

Comme tous les jeunes de la gen Z, Ozan Yenersoy et Adèle Ven Eyll (photo) ont l’habitude de faire leurs achats en ligne. Lorsque l’opportunité s’est présentée pour eux de se lancer dans l’aventure des mini-entreprises, avec six autres élèves de leur école, l’idée leur est venue de proposer un service technologique plutôt qu’un produit comme cela se fait le plus souvent. Et de développer une plate-forme afin que toutes les « minis » qui le souhaitent puissent ainsi commercialiser leurs créations à plus grande échelle. « D’ordinaire, les ventes se font plutôt de manière locale, en mains propres, via des échanges avec les amis, la famille, note le jeune co-administrateur délégué. Mais avec la Covid, toutes ces interactions sont devenues compliquées. Cela risquait même d’avoir des conséquences sur les résultats des entreprises. Qui grâce au site pourraient être moins impactés. »

Pour donner corps à MiniHouse, l’équipe a fait appel à un passionné d’informatique. Houdayfa Skhairi, 17 ans, s’est formé tout seul, en regardant les tutoriels du YouTubeur Anthony Welc. « En suivant ses conseils, je me suis mis à la programmation dès l’âge de 13 ans, rappelle le développeur software. Ensuite, j’ai suivi des formations sur le site openclassrooms.com qui dispense des cours gratuits. J’ai commencé à créer des sites, avec quelques amis. Et maintenant, celui de MiniHouse. » Le jeune homme, qui a déjà lancé sa petite agence digitale, compte bien poursuivre dans cette voie tout en ajoutant un volet business à sa formation.

Le site qui vient d’être mis en ligne n’accueille toutefois pas toutes les mini-entreprises de la promotion 20-21. « Une partie d’entre elles avaient plutôt pour vocation de rester locales », pointe Adèle Van Eyll, co-administratrice. « Comme pour tout projet un peu innovant, on voit aussi que certaines minis sont un peu réticentes et préfèrent voir comment fonctionne le site avant de se lancer », détaille Ozan Yenersoy. Etonnamment sans doute pour cette génération, toutes n’ont pas, dès le départ, intégré un volet « digital » dans leur business plan, ce qui implique la mise en place d’emblée d’une autre logistique.

Alors que la MiniHouse vient à peine d’être mis en ligne, ses fondateurs réfléchissent déjà à son avenir potentiel, une fois que l’année scolaire sera terminée. « C’est un peu frustrant de se dire que l’on a mis tout ce dispositif en place pour quelques mois de service », plaide la jeune femme. Comme le souligne Ozan Yenersoy, la plate-forme pourrait très bien devenir le site officiel de vente en ligne de l’asbl LJE qui encadre ces mini-entreprises lancées chaque année dans le cadre scolaire. « Nous pourrions aussi trouver d’autres types de clients, conclut Adèle Van Eyll. Notamment des petits commerces qui n’ont pas de site propre. » L’aventure ne fait que commencer.

Tant qu’il y a des boutons

Mauro Druwel (12 ans), « le plus jeune inventeur du pays », ne manque pas d’idées. Il a déjà développé entre autres un robot incitant à boire davantage d’eau et un système pour gérer les absences à l’école.

Mauro Druwel
Mauro Druwel© JEF BOES

Depuis tout petit, Mauro s’intéresse à la technologie « et à tout ce qui a des boutons ». Dès sa première primaire, il est devenu membre de Coderdojo, une espèce de club qui apprend aux jeunes de tout le pays à programmer. Sa toute première invention? « Le Coderstorm, un petit robot qui apporte du papier de toilette lorsque vous en avez besoin au petit coin », répond-il. Ensuite, il y a eu l’Ami:go, un robot qui consigne chaque jour la quantité d’eau que vous devez boire, en fonction de la température et de vos activités sportives. « Toutes mes inventions sont conçues pour aider les gens, insiste l’ado passionné. Lorsque je constate un problème, je réfléchis aussitôt à la façon dont je peux le résoudre avec un appareil. J’ai ainsi imaginé un robot qui scanne les voitures pour s’assurer qu’aucun bébé ou animal domestique n’y a été oublié. Quant à mon SafetyShark, il peut détecter si un enfant tombe dans un étang ou une piscine. Pour un ami diabétique, j’ai mis au point un dispositif qui lui permet de lire la puce sur son bras afin que sa mère n’ait pas à se lever au milieu de la nuit pour vérifier son taux de sucre. »

Mauro déborde d’imagination et éprouve une véritable fierté lorsque les gens admirent son travail et viennent lui demander de l’aide. Même sa propre école est venue frapper à sa porte pour créer un système de gestion des absences. « Et pour mon papa, j’ai créé, pendant le confinement, une lampe spéciale qui surveille en permanence votre statut dans Microsoft Teams et qui s’allume en couleur, afin que le reste de la famille puisse voir quand vous vous trouvez en réunion et ne devez pas être dérangé », complète-t-il. De là à savoir comment il se voit plus tard, le môme l’ignore encore. « Je ne sais pas si j’en ferai mon métier, car pour l’instant, je considère cette activité comme un passe-temps ».

Bouillotte 2.0

Dans le cadre de ses études, Fran Van Labeke (21 ans) a développé Glow, un patch permettant de soulager les douleurs menstruelles. Un bel exemple de femtech, que la jeune femme entend à présent lancer sur le marché.

Fran Van Labeke
Fran Van Labeke© JEF BOES

La femtech, autrement dit la technologie dédiée aux problèmes féminins, a commencé à se développer il y a quelques années seulement. Si des solutions innovantes sont imaginées depuis des décennies pour tout et son contraire, les désagréments que vivent au quotidien les femmes ont longtemps été ignorés. Face à ce constat, Fran a voulu apporter sa « modeste contribution à la révolution »: « Les crampes menstruelles constituent un problème sous-estimé, explique la jeune experte. Un coussin aux noyaux de cerises est efficace, mais peu pratique pour aller travailler. J’ai donc conçu Glow: un patch que l’on porte sur le bas-ventre, là où l’on ressent la douleur. »

L’appareil est composé d’un fin tissu qui dégage de la chaleur, tout en étant transparent sous les vêtements, et est alimenté toute la journée au moyen d’une batterie externe. La température est évaluée en fonction de recherches médicales sur la douleur. « J’ai l’intention de développer une version de luxe, plus sophistiquée sur le plan électronique, qui permettra de régler la température par le biais d’une appli », poursuit Fran, qui a créé Glow dans le cadre d’un projet imposé durant ses études de conception de produits industriels. Mais elle voit déjà plus loin. « Je veux bientôt faire produire mon prototype par une entreprise de travail adapté, après quoi il sera testé par un petit groupe de femmes, se réjouit-elle. Si tout se passe bien, j’espère le mettre sur le marché dès cet été. Je ne me considère pas comme une technophile, mais je veux certainement poursuivre dans la voie de la femtech. C’est un domaine qui me fascine et dans une optique féministe, j’entends aider les femmes de cette manière. Et il reste du pain sur la planche… »

Dompteur de chatbots

Mathis André (21 ans) a quitté l’école à 16 ans et fondé la société Faqbot dans la foulée. Ce jeune entrepreneur a développé une intelligence artificielle capable de guider simplement le consommateur.

Mathis André
Mathis André© JEF BOES

Passionné d’informatique depuis l’adolescence, le jeune codeur programmait déjà des logiciels, des sites Web et des applications à 14 ans. « J’ai fait une sorte de pari avec mon père: j’apprendrais la programmation. Je me suis donc intéressé à cette technique très tôt, avec un prof d’université qui me donnait des cours, se souvient le jeune geek. Je faisais des petits programmes en Python, un langage de paramétrage. Au début, je n’aimais pas, mais j’ai ensuite développé tout seul des sites Internet et là j’ai eu comme une révélation. Au départ, j’ai fait beaucoup de petits projets qui ne m’ont pas rapporté d’argent, c’était juste pour m’amuser. A 15 ans, je consacrais tout mon temps à travailler là-dessus et j’ai donc délaissé l’école. Je me souviens que j’avais contacté une société de taxi qui a accepté que je fasse le design de leur site pour 500 euros. J’avais fait ça en une après-midi et j’avais manqué les cours en faisant croire que j’étais malade. A partir de ce moment-là, j’ai décidé d’abandonner définitivement l’école pour travailler dans une agence Web, que j’ai quittée pour vendre moi-même des sites. ça me rapportait plus. » A 17 ans, Mathis va un cran plus loin dans ses connaissances high-tech et se découvre une véritable passion pour l’intelligence artificielle: « Les sites Web, c’était trop répétitif. Un jour, j’ai vu Facebook lancer des bots et ça m’a donné envie de développer ma propre IA. » C’est le début de sa société Faqbot, qui offre aux entreprises les outils technologiques pour, à partir de questions fréquentes, répondre automatiquement aux visiteurs sur les sites Internet, de quoi réduire la charge de travail. Cette idée, le jeune homme l’a eue après avoir conçu un premier Chatbot avec la société Tablebooker, en 2016. Un an plus tard, lui et son associé ont réussi à lever 400.000 euros auprès d’investisseurs. La société est rentable, emploie trois personnes et compte une trentaine de clients. « Faqbot n’est que le début de mon histoire, je vais m’attaquer à bien plus de projets, avertit l’expert en technologies. Je n’ai pas terminé les secondaires, ni été à l’université, par contre Faqbot, mon entreprise, m’a beaucoup appris. Je considère que c’est elle mon école, l’école dans la vraie vie. »

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