Peut-on à la fois être écolo et rouler en voiture mythique?

L'un des fleurons du club : une Morgan à trois roues, avec moteur de Harley-Davidson. © SDP
Mathieu Nguyen

L’automobile comme passe-temps peut paraître une drôle d’idée à l’heure de la transition énergétique. L’amour des carrosseries de légende est-il compatible avec des convictions écolos? On a posé la question à Thibault Van Dieren, du Garage Club de Louvain-la-Neuve.

C’est peu dire que les voitures ont mauvaise presse, ces temps-ci. Après des décennies de « tout à la bagnole », on a finalement pensé à remettre en cause leur usage individuel intensif pour privilégier des alternatives, transports en commun, covoiturage ou mobilité douce – et il était plus que temps. Du coup, que d’impénitents mordus brûlent du fuel pour le fun, ça pourrait bien en faire tiquer certains: quand on tente de ménager une planète à bout de souffle en ne recourant aux véhicules à combustion fossile que par nécessité, un hobby consistant à user ses gommes sur le bitume a de quoi dérouter.

« On privilégie le plaisir à la puissance »

C’est pourquoi, à l’annonce de l’inauguration du Garage Club de Louvain-la-Neuve, nous avons eu envie de rencontrer le concepteur du projet, Thibault Van Dieren. C’est lui qui a eu le bonheur de composer le parc automobile de cette structure. « Le concept, c’est d’être un club multimarques et multifamilles, qui permette aux gens de venir avec leur propre voiture ou d’en louer une sur place, nous dit-il. L’essentiel de notre activité, ce sont les balades et le partage d’une passion avec d’autres. Côté garage, on a voulu éviter le cliché des supercars et aller vers des voitures « coup de coeur » de quatre familles distinctes: les « barquettes », les petites sportives, les limousines de légende et les cabriolets mythiques. » N’importe qui peut donc participer au volant de n’importe quel auto? Thibault Van Dieren tempère: « A priori, mieux vaut viser une voiture qui entre dans l’une de nos quatre catégories, mais elles sont larges et on n’est pas intégristes. Malgré cela, on souhaite évidemment rester cohérents, on ne va pas aller se balader en Dacia. » Cela va de soi. D’autant que, à voir les rutilants châssis alignés ici, on se dit qu’il va falloir en avoir sous le capot pour soutenir la comparaison. De la quinzaine de voiture que compose la collection, on s’attarde sur une Morgan à trois roues dotée d’un moteur de Harley-Davidson, une Caterham, un concept-car Renault produit à seulement 2.000 exemplaires, une Alfa Spider, une Mercedes SL ou une Rolls cabrio des années 80, ou encore une incroyable Cadillac de 1949, tous chromes dehors. Entre autres. « Avec ces voitures, le bonheur est immédiat, même à 50 km/h, nous confie notre hôte. On privilégie le plaisir à la puissance. » Car, pour rappel, le principe de base, c’est une balade accompagnée, « dont le tempo est maîtrisé », et pas de lâcher les clients dans la nature avec un bolide et un road book. « On essaye d’éviter les dérapages », sourit le gestionnaire, qui organise en outre des événements pour entreprises et particuliers, du genre rallyes sur les petites routes du Brabant wallon.

Avec ces voitures, le bonheur est immédiat, même à 50 km/h.

Le très design intérieur du Garage Club, à Louvain-la-Neuve.
Le très design intérieur du Garage Club, à Louvain-la-Neuve.© SDP

Utilisation plutôt que possession

Et maintenant, la question qui fâche: et l’empreinte écologique dans tout ça? Pour le fondateur du Club, pas question de se cacher: « On assume complètement. On parle beaucoup de pollution liée aux émissions de gaz. Or, les conséquences au niveau du coût écologique des processus de production sont sans commune mesure avec celles de l’usage. Et nous, on veut justement encourager l’utilisation plutôt que la possession – d’autant que l’acquisition de véhicules d’exception est pleine de contraintes et d’incertitudes – la fiscalité, les zones de basses émissions, toutes les réglementations changent souvent. Ces normes existent, on n’est pas contre, on s’inscrit dedans. On peut vivre tout ça de façon consciente. Alors, oui, les ancêtres polluent, il n’y a pas de miracle. Mais nos achats plus récents sont légers, avec de moins gros moteurs, et le moins polluants possible – on envisage d’ailleurs l’acquisition d’une électrique, mais un modèle sportif, dans l’esprit des autres véhicules. Ensuite, nos balades ne comptent finalement pas tellement de kilomètres. Et enfin, on prône le covoiturage, la place du passager a toute son importance. Alors si on fait le compte, en comparaison d’un propriétaire de voiture qui roule seul, notre bilan est plutôt bon, loin d’exploser le CO et donc plutôt conforme à l’air du temps. »

On le concède, dans ce cadre, un amateur de belle mécanique ne pollue certainement pas plus qu’un amoureux de la nature qui passerait ses week-ends à faire des allers-retours entre chez lui et la Côte ou les Ardennes. « L’automobile reste une passion, on ne peut pas interdire aux gens de rêver », conclut Thibault Van Dieren. On ne le contredira pas, préférant laisser chacun maître de son bilan carbone et de ses choix.

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