Pourquoi avec certaines personnes la connexion est immédiate ?

Pourquoi est-on capable de parler des heures durant avec certaines personnes alors qu’avec d’autres s’installe rapidement un silence gênant ? Il est très difficile d’expliquer ce qui fait la magie d’une rencontre. Le langage non verbal nous guiderait à la manière d’un GPS vers des âmes qui partagent nos idées.

Cupidon avec son arc et ses flèches ou encore les chemins insondables du « destin » sont autant de vaines tentatives pour comprendre pourquoi nous « craquons » pour une personne plutôt qu’une autre. Pourquoi la compagnie d’un tel est comme une couverture douillette alors que celle d’un autre met mal à l’aise ? Cela a tout à voir avec le sentiment de sécurité et de familiaritéconfiance ? que l’autre personne éveille en vous. Rika Ponnet, spécialiste des relations interpersonnelles, étudie cette thématique depuis des années. Dans son dernier livre, « Alleen met jou », elle parle de ce qu’elle appelle un ‘contact chorégraphique’. « Lors d’un premier contact harmonieux, on accorde immédiatement la communication non verbale à l’autre », dit-elle. Parce que la façon dont nous disons quelque chose est plus importante que ce que nous disons. 70 % de notre communication passe par des signaux non verbaux: intonation, contact visuel, gestes de la main, posture et expressions faciales. Si vous vous sentez en sécurité sur le plan émotionnel, vous avez le sentiment que vous pouvez être vous-même. Après une rencontre de ce type, beaucoup disent avoir l’impression « de connaître cette personne depuis longtemps ». C’est parce que nous reconnaissons, chez l’autre, des choses qui font partie de nous.

Tout comme ta mère

Nos fondements non verbaux sont ancrés dans notre personnalité. Les intellectualiser n’a pas de sens, tout comme de tenter de diriger ou d’ajuster ses comportements. D’autres les voient malgré nous. « Quand on se dispute, tu ressembles à ta mère » ou encore « Tu ris comme ta soeur » sont des choses qu’on entend parfois.

« Ceux qui nous ont élevés ou ont grandi avec nous ont les mêmes fondements non verbaux et communiquent avec leur corps de façon similaire. Les frères et soeurs bougent, froncent les sourcils et marchent souvent de la même façon. Les personnes avec qui vous avez un contact immédiat montrent des similitudes avec votre langage non verbal’, précise Ponnet. Lors d’une première rencontre, les gens peuvent ressentir immédiatement cette harmonie. Et cette évidence s’ancre encore davantage lorsque la relation s’approfondit. Marcher ensemble, se câliner, faire l’amour… tout se fait sans effort ».

Pourquoi avec certaines personnes la connexion est immédiate ?
© KLAAS VERPLANCKE

Si nous nous sentons bien avec quelqu’un, nous reflétons également, grâce à notre empathie, inconsciemment le langage corporel de l’autre. Ces neurones qui agissent en miroirs créent un sentiment de connexion. L’an dernier, des recherches scientifiques menées à l’Université de Dartmouth ont montré que le cerveau joue un rôle primordial lors d’un match. La recherche montre que les cerveaux de bons amis réagissent de la même façon. Quand ils voient des images vidéo, ce sont les mêmes lobes du cerveau s’illuminent. Au point qu’il a été possible aux chercheurs de relier les gens entre eux par le biais de l’IRM.

L’être humain aurait deux types de souvenirs. La mémoire explicite qui est ce que nous appelons communément la  » mémoire  » et dont nous extrayons des souvenirs. Il y a aussi la mémoire dite implicite qui est déjà active dans l’utérus et a une importante influence sur le fait qu’on se sente à l’aise et en sécurité. L’environnement dans lequel vous avez grandi est à la base de notre langage non verbal. Ce qui nous fait du bien est donc intiment lié à notre passé affectif.

À la recherche d’une connexion

Nous venons tous de familles différentes et pourtant certaines personnes sont sur la même longueur d’onde. « Cela s’explique par un besoin d’attachement », explique Ponnet, qui ne rate jamais une occasion de citer le travail de John Bowlby dans son expertise. Le pédopsychiatre britannique a montré par l’observation et la recherche que vos toutes premières relations, avec vos parents ou d’autres figures paternelle ou maternelle, influencent fortement votre développement futur et donne le ton pour vos futures amitiés et romances.

Nous recherchons tous à établir des liens, à obtenir une certaine reconnaissance ou la liberté et l’espace pour être nous-mêmes. Ces besoins basiques d’attachement se traduisent par : êtes-vous là pour moi ? Ou : me reconnaissez-vous tel que je suis et puis-je être moi-même ? Personne ne reçoit l’éducation parfaite et il y aura toujours des manques. Beaucoup ont l’impression que leurs parents n’étaient pas toujours là pour eux ou qu’ils étaient au contraire trop étouffants. Ces expériences de notre jeunesse nous aident à nous façonner et même à déterminer comment nous nous comportons dans nos relations amoureuses. Dès le début d’une relation, chacun s’installe dans une position où il se sent à l’aise. Si le besoin de liberté est grand, on optera pour une certaine distance. Et, inversement, si vous avez besoin de plus de présence vous montrerez plutôt un comportement anxieux.

Toutes les lumières allumées

Le non verbal nous guide comme un GPS vers des âmes qui partagent nos idées, mais il n’est réellement pertinent que si nous sommes ouverts à une nouvelle rencontre. Parfois, on entend des célibataires se plaindre qu’ils sont seuls depuis des années et qu’ils n’arrivent pas à rencontrer un homme ou une femme bien. « L’ouverture joue un rôle décisif à cet égard », déclare l’expert en relations publiques. Ceux qui parviennent à dévoiler une part d’eux même pourront « expérimenter » complètement l’autre. Cela permet de voir sous toutes ses facettes, et vice versa. Ceux qui n’en sont pas capables se privent de partenaires potentiels.

Pourquoi avec certaines personnes la connexion est immédiate ?
© KLAAS VERPLANCKE

Les dames de la série Sex and the City comparent les hommes à des taxis. Quand ils sont disponibles et que le temps est venu d’entamer quelque chose de sérieux, leur lumière s’allume. Cela n’a rien à voir avec le destin, mais avec le timing et la chance ». Sarah (33 ans) a pu constater par elle-même que la réceptivité peut faire toute la différence. « Quand j’ai rencontré mon chéri à une fête, j’ai eu l’impression qu’un choc de 100 volts traversait mon corps. Nous avons commencé à parler et toute la soirée, les étincelles ont virevolté. Il y avait une telle électricité qu’on aurait pu éclairer toute la ville. J’ai été très étonné quand il m’a dit qu’on s’était déjà croisé et qu’on avait même discuté. Je n’ai aucun souvenir de cette réunion. À l’époque, il m’avait laissé de marbre. Et puis, des années plus tard : « coup de foudre ». Cela montre bien que c’est d’abord l’amour au premier ressenti et non pas l’amour au premier regard.

« Chaque coup de foudre reflète qui nous sommes à ce moment-là et quels sont nos besoins », selon Ponnet. Sans dire un mot, nous attirons des gens qui veulent répondre à ces besoins spécifiques. Par conséquent, chaque choix est le bon, parce que celui sur qui vous tombez reflète votre état émotionnel à ce moment de votre vie. Les gens disent régulièrement :  » Quand je vois mon ex maintenant, je ne comprends pas ce que je lui ai trouvé ».

Certains choisiront de « mauvais » partenaires. Mais des relations destructives peuvent aussi se révéler instructives. Beaucoup ont honte de s’être embarqués dans une telle histoire et décident de muscler leur confiance en soi pour ne plus faire les mêmes erreurs.

Poisson frétillant sur la terre ferme

Qu’en est-il de la « parade de contact » dans un contexte en ligne ? En 2019, Tinder reste le plus gros étang ou pêcher une nouvelle rencontre. « Un jour, sur Tinder, je vois Jonas et je glisse swipe ?? vers la droite », raconte Annelore (28). Pendant trois semaines, nous nous parlons tous les jours lors de discussion-marathon. J’ai tout de suite su que c’était mon type. Les échanges étaient drôles, amusants et bientôt intimes. Nous avons finalement fixé un rendez-vous. La soirée s’est bien passée, il était beau et nous avons parlé de toutes sortes de choses, mais il n’y a rien eu à faire: une fois dans le monde réel, l’étincelle s’est éteinte. Le fait de se voir a tué le lien qui avait commencé à se former.

« Tinder est bon pour apprendre à connaître les gens », dit Ponnet, « mais l’essence d’un match réussi est indisponible sur cette application. Le contact non verbal est en ligne. Le bavardage reste un échange de pensées. On ne s’accorde que sur le texte d’une chanson, pas sur la mélodie et la chanson dans son ensemble. Ce n’est que lorsque l’on prend le temps de connaître quelqu’un que l’on sait si le lien est vraiment là. »

« L’été dernier, j’ai rencontré un nouveau client « , raconte Romy (35 ans). « Il n’y avait pas le moindre rayon de soleil, mais il n’a pas enlevé un instant ces lunettes de soleil. J’ai lancé des idées pour son magazine, mais quoi que je dise, il ne mouftait pas. Son ton était sec et froid et la conversation n’a guère duré. Je me sentais comme un poisson frétillant sur la terre ferme. Quand je suis rentré à la maison, je me suis sentie vidée, comme si toute mon énergie s’était évaporée. »

Vous pouvez revenir d’un rendez-vous qui s’est objectivement bien déroulé avec un arrière-goût désagréable. Selon Ponnet,  » les gens cherchent à se connecter aux autres, mais si quelqu’un vous critique, vous dévalorise ou vous rejette par son langage corporel, cela peut vous faire sentir misérable. Et comme ces signes sont parfois très subtils, vous ne parvenez pas toujours directement à mettre le doigt dessus. Or ce sentiment de désapprobation affecte votre système d’attachement. Surtout dans un contexte relationnel qui peut être difficile. Si vos tentatives de contacts ont été vaines, vous pouvez vous sentir nul et épuisé. L’établissement d’un lien est une récompense. Tout le monde cherche cette connexion ».

L’amour se passe dans le cerveau

Dans notre société individualiste, nous osons parfois oublier que nous sommes avant tout des animaux sociaux. De nombreuses études neurologiques ont déjà montré qu’un « coup de foudre » amoureux ou amical libère des substances dans notre cerveau. Cela nous donne un sentiment de bonheur. L’ocytocine provoque des sensations agréables. Plus cette substance est libérée, plus vous vous sentez calme et serein. L’amygdale, qui est liée à notre instinct de survie, joue également un rôle important. Sur le plan de l’évolution, nous sommes plus forts dans un groupe que seuls. Selon la science, le sentiment de protection et de bonheur qu’entraîne avec lui un contact réussi occasionne une baisse de la tension artérielle, une diminution du stress, atténue les risques de dépression et prolonge la durée de vie.

« Ma copine et moi ne sommes ensemble que depuis quelques mois, mais chaque fibre de mon corps me dit qu’elle est la femme qu’il me faut », dit Mo (42). « La semaine dernière, pendant le dîner, elle a lâché qu’elle ne voulait pas se marier. Soudain, je n’ai plus rien pu avaler. Je suis une âme romantique, pour moi un mariage c’était le couronnement de notre amour. »

Même si la parade de contact se fait en souplesse, il reste encore des brouilleurs ponctuels. Parfois, la gêne s’accumule et l’autre finit par se sentir comme un étranger, ce qui brise l’harmonie. « Si votre partenaire dit ou fait quelque chose qui ressemble à un rejet, cela déclenche votre système de protection « , explique l’expert en relation. « Il s’ensuit une réaction d’anxiété et de panique. Aucune émotion ne nous submerge autant que la peur. Elle entraine une réaction de protestation. Un bébé bouleversé commence à pleurer très fort. Un adulte lui optera pour la fuite ou l’attaque. Lorsque les liens avec d’autres personnes sont mis à mal, cela nous touche au plus profond. Ce qui explique qu’au sortir d’une dispute, on se sente souvent vidé.

Apprendre à lire le manuel de l’autre personne et découvrir ses cordes sensibles font aussi partie d’une relation. On fait tous des erreurs. Chaque relation est comme un instrument qui doit sans cesse être accordé « , conclut Ponnet.

L’amour réside donc surtout dans la volonté et la capacité de lire ce manuel, mais aussi, par la communication, de continuer à construire le lien malgré les différends.

Melissa Janssens

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