Retro 2021: Avec son poignant poème, la poétesse Amanda Gorman fait sensation au Capitole

Lors de l'investiture de Joe Biden en tant que 46e président des Etats-Unis, Amanda Gorman offre cinq minutes envoûtantes avec son texte, The Hill We Climb. © GETTY IMAGES
Lisette Lombé

La jeune Amanda Gorman a marqué l’investiture du président américain en déclamant à la tribune The Hill We Climb, vêtue d’un manteau jaune, couleur de l’espoir. Un texte achevé après la prise du Capitole par les supporters de Donald Trump.

Notre chroniqueuse, la poétesse belge Lisette Lombé, revient sur ce jour lumineux, qui, mettant les mots à l’honneur, a gommé, le temps de sa prise de parole, les maux de l’Amérique.

« Je dois bien avouer que je ne connaissais pas du tout la jeune poétesse Amanda Gorman avant la cérémonie d’investiture du 46e président des Etats-Unis, Joe Biden. J’ai découvert le lyrisme de sa plume et la douceur de sa voix ce jour-là, sur les réseaux sociaux, comme bon nombre de personnes. Je pense que j’ai spontanément utilisé le mot « ange » à l’issue de sa prestation. J’avais l’impression, avec son diadème rouge et son manteau jaune, que la jeune femme était entourée d’une véritable aura durant les presque six minutes qu’avait duré sa prise de parole.

Qu’est-ce que cela faisait du bien d’entendre parler de « ponts », d' »espoir » et d' »amour » après des années de tweets clivants et dénigrants de Donald Trump. Et quelle réponse aux actes délirants et aux propos nauséeux scandés par les partisans de celui-ci, lors de l’attaque du Capitole, quelques jours auparavant! Quel contraste entre la lumière poétique, l’élévation des coeurs et la harangue haineuse. Je dois bien dire aussi qu’en tant que femme métisse, voir cette poétesse racisée, se tenant fièrement debout devant la vice-présidente Kamala Harris, racisée elle aussi, m’a donné l’envie de la gravir cette montagne de la tolérance!

Le temps d’un discours, je ne voulais pas penser à l’impérialisme américain. Je ne voulais pas penser aux violences policières, à George Floyd et aux autres victimes. Je ne voulais pas penser au prix de la tenue de luxe, ni à la gestuelle calculée. Je ne voulais pas me demander si c’est bien le rôle des poètes de soutenir les politiciens de la sorte. Je souhaitais être du côté de la parole sensible qui vient convoquer la meilleure part des humains. Je voulais juste, comme dans un micro ouvert de slam, profiter du moment, unique, lié au lieu, aux personnes en présence et à l’émotion qui se propage de rang en rang, en ondes concentriques.

Quelques jours plus tard, j’ai créé un collage éphémère dans lequel on pouvait apercevoir Donald Trump, le visage cramoisi et défiguré par la colère, gesticulant dans le dos d’une Amanda Gorman rayonnante, solaire et tournée vers un avenir plus solidaire. J’ai commenté mon collage en ces mots: « Tant que la poésie vivra, la langue du crachat restera toujours la langue du crachat. » Une internaute férue de littérature a répondu: « Collage de la grâce et du grotesque. Sa voix… Cette effraction d’enthousiasme. » Je n’aurais pas pu résumer plus poétiquement.

Mais ce que nous ne pouvions pas imaginer ce 20 janvier 2021, c’est la caisse de résonance que cette oraison d’Amanda Gorman allait offrir au monde de la poésie. En Belgique, de nombreuses initiatives étaient déjà nées du premier confinement – cartes postales, vidéos, affiches… – mais avec la profusion des articles de magazines consacrés à la poétesse américaine, c’est toute l’incandescence de notre art qui s’est retrouvée sur la table basse de milliers de foyers. La vie, la poésie! »

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