En Chine, un village s’accroche à son rêve maoïste (en images)

© AFP

Chaque année, plus de 500.000 visiteurs affluent dans ce hameau de la province du Henan (centre), devenu une attraction touristique.

A l’heure où le Parti communiste au pouvoir devrait donner dans quelques jours un second mandat à son chef Xi Jinping après un important congrès, Nanjie reste fidèle aux préceptes de Mao, qui a dirigé la Chine d’une main de fer de 1949 à 1976.

Comme en pleine « Révolution culturelle », les 3.700 villageois se réveillent chaque matin au son des hauts-parleurs qui diffusent des slogans louant l’ex-dirigeant. Et ils entament leur journée de travail par des chansons « rouges » du répertoire communiste.

Folklore maoïste, biens partagés et usines en propriété collective: Nanjie suit le modèle des années 1950, celui d’avant les réformes qui ont fait de la Chine la deuxième économie mondiale.

Au pied d’une statue de Mao, les touristes peuvent embarquer dans un petit train rouge et visiter les parcs, les usines et les appartements collectifs du village, où les habitants leur racontent les joies du collectivisme.

Ils habitent dans de modestes appartements, tous similaires, des meubles aux téléviseurs à écran plat. « Je ne trouve rien à redire à ma vie ici », déclare à l’AFP Wang Chunju, une retraitée qui tient dans sa main un iPhone.

– Oreo subventionnés –

Appartement, soins médicaux et nourriture sont gratuits pour les habitants. Ils ont accès à une cantine et bénéficient d’une carte, automatiquement rechargée, pour faire leurs achats alimentaires, des légumes aux biscuits Oreo.

En contrepartie, ils travaillent pour un modeste salaire dans les entreprises villageoises: usines de bière, de nouilles instantanées ou encore d’eau-de-vie, entre autres.

Même « Xi Jinping demande à tous d’étudier le président Mao », se réjouit Wang Hongbing, chef du Parti communiste à Nanjie depuis 1976 — qui participera au congrès la semaine prochaine à Pékin.

Au début des années 1980, lorsque la Chine se détournait du collectivisme, le responsable villageois a choisi de tenir bon.

« A l’époque, beaucoup de gens ne nous ont pas compris, pas soutenus. Certains nous ont même critiqués », expliquait-il récemment à un média d’Etat.

Mais depuis le dernier congrès du Parti en 2012 et l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping, « le discours du gouvernement central est devenu de plus en plus proche de la voie choisie par Nanjie », assurait M. Wang.

Aujourd’hui, fonctionnaires locaux et membres du Parti se mêlent aux touristes pour venir étudier « l’esprit de Nanjie ».

Mais difficile de dire à quel point les préceptes maoïstes sont réellement appliqués.

Dans l’usine de nouilles, les responsables admettent ainsi mettre en scène « quotidiennement » des chorales de chants communistes pour les journalistes en visite.

– ‘Vrais communistes’ –

Plus de 90% des employés des 26 coopératives viennent par ailleurs de l’extérieur du village et ne bénéficient pas des avantages réservés aux habitants de Nanjie.

En 2008, une enquête du quotidien chinois Southern Metropolis révélait que le village avait contracté pour plus de 1,6 milliard de yuans (206 millions d’euros) de prêts bancaires.

Mais les hauts dirigeants chinois ont ordonné à la province du Henan de résoudre le problème, déclare M. Wang à l’AFP. Les dettes ont été annulées.

Le hameau « compte dorénavant sur la force de ses entreprises pour se développer », assure-t-il fièrement, en ajoutant que les bénéfices ont grimpé de 24% sur un an.

Aujourd’hui, Nanjie capitalise sur son image de havre égalitaire face aux écarts de richesse entraînés par l’économie de marché ailleurs en Chine, ce qui lui vaut le soutien des hauts dirigeants et du grand public.

« Ce sont des vrais communistes, là-bas », déclare en riant l’employée d’une boutique d’alcool située juste à l’extérieur du village.

« En comparaison, on peut dire qu’on est des capitalistes ».

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