Comfort shows: quand nos séries doudou se font thérapie douce

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© Getty images

Dans un monde incertain marqué par diverses crises – sanitaires, politiques, climatiques – de plus en plus de spectateurs se tournent vers des contenus audiovisuels doux, rassurants, familiers: les « Comfort shows » ou séries réconfortantes en français. Décryptage d’un phénomène pile dans l’air du temps, entre tendance de consommation culturelle et outil de régulation émotionnelle.

Il est 22 heures. Après une journée bien remplie, l’envie de regarder une bonne petite série vous procure une sensation rassurante. Vous pourriez commencer un show primé récemment aux Emmy Awards… Mais non. Pour la énième fois, vous lancez un épisode de Grey’s Anatomy. C’est – au moins! Vous ne comptez plus – le 6e visionnage de votre série doudou. C’est grave docteur?

Non, bien heureusement. Vous voilà simplement dans l’univers des comfort shows, ces séries réconfortantes qui s’imposent comme une sorte de refuge émotionnel discret mais puissant dont le visionnage répété agit comme un rituel apaisant. Mais pour quelles raisons? 

Sécurité émotionnelle 

La série doudou offre un univers familier: on retrouve des personnages qu’on aime ou qu’on adore détester (et c’est aussi ce qui fait leur charme), des intrigues connues et des dialogues attendus. Revoir chaque soir Gaby, Bree, Susan et Lynette dans Desperate housewives, c’est un peu comme retrouver nos vieilles copines pour échanger les derniers potins. Tout cela crée un sentiment de stabilité rassurante.

« Sex and the City a plus de 25 ans, confie Flora, 45 ans. Et pourtant, j’ai re-re et re-rematé la série à différents moments de ma vie. D’abord à l’époque où la série passait à la télé – on voit les Twin Towers dans le générique, quand j’y pense… -, puis en dvd que je m’étais offert le luxe d’acheter en coffret, saison par saison. Et plus tard sur HBO, avec un abonnement. J’ai regardé les aventures de Carrie seule, avec mes colocs, avec mon mec. Je me souviens m’être refait les 6 saisons après une rupture douloureuse et même après le décès de mon père. Une vraie thérapie! »

La science tente d’analyser ce phénomène inhérent à la pop culture. Dans un article en forme de questions-réponses du média Friday Things, la psychologue américaine et chercheuse à la Harvard Medical School Alexandra Gold explique que ces séries ont un réel pouvoir d’auto-apaisement. En période de stress, d’anxiété ou de tristesse, nos sens peuvent jouer un rôle dans la régulation des émotions et la vue, via le visionnage répété de contenus familiers, est l’un des plus puissants leviers. Revoir régulièrement ces séries crée une forme de constance émotionnelle et réduit la peur de l’imprévu dans un monde où l’incertitude est devenue omniprésente. Résultat: moins de stress pour le cerveau, moins d’informations à traiter et un vrai moment de pause mentale.

« Je réalise d’ailleurs que ça fait au moins dix ans que je n’ai pas re-regardé SATC, il faudrait que je me refasse une session, ça commence à faire long! » Ajoute Flora en riant.

Nostalgie, quand tu nous tiens

La nostalgie joue évidemment elle aussi un rôle essentiel dans ce besoin de réconfort. Il ne s’agit pas seulement de la série en elle-même, mais aussi de tous les souvenirs qu’elle évoque: le contexte du premier visionnage, l’époque à laquelle elle appartenait. La plupart des véritables comfort series datent d’ailleurs du début des années 2000, pour les millennials en tout cas. Comme le souligne encore la psychologue américaine Alexandra Gold, à cette époque, attendre chaque semaine le nouvel épisode de sa série préférée faisait partie d’un véritable rituel — parfois même familial. Un rituel peu à peu effacé par les plateformes de streaming, où tout est désormais accessible instantanément. Peut-être que, quelque part, notre subconscient aurait préféré rester à cette période où les choses semblaient plus simples.

« Les premières notes d’un générique me replongent immédiatement dans l’endroit où je vivais quand une série passait à la télé, raconte encore Flora avec cette nostalgie douce-amère. Je me revois rentrant de l’école ou installée dans le canapé avec ma coloc de l’époque… Une vraie madeleine de Proust! »

Des valeurs positives partagées

Enfin, last but not least dans ce qui caractérise nos séries doudou: un socle de valeurs profondes. Bienveillance, amitié, résilience, solidarité où les différences sont acceptées. Ces récits mettent en avant des personnages attachants, souvent très différents les uns des autres mais unis par l’acceptation et le respect mutuel. Friends, par exemple, continue de séduire des générations entières grâce à sa bande d’amis soudée qu’on a l’impression de connaître, ses conflits toujours légers et sa vision réconfortante de la vie à plusieurs. Qu’il s’agisse d’une colocation improbable, d’un groupe d’amis inséparables ou d’une famille recomposée, ces histoires célèbrent ce qui rassemble plutôt que ce qui divise.

Alors non, ce n’est pas grave de relancer Grey’s Anatomy une énième fois. C’est même parfaitement humain. Dans un monde où tout va trop vite, où l’incertitude est devenue la norme, se réfugier dans une série familière n’a rien d’anodin: c’est une façon douce de prendre soin de soi. Alors si ce soir, c’est encore Friends, The Office ou Gilmore Girls qui s’invite dans votre salon…savourez sans culpabiliser.

Nos 10 meilleures « comfort series »

1. Grey’s Anatomy
2. Friends
3. Desperate Housewives
4. One Three Hill (ou les Frères Scott, si vous préférez)
5. The Office
6. How I Met You Mother
7. Gossip Girl
8. Buffy contre les vampires
9. Modern Family
10. Gilmore Girls

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