Belles de nuit

Les crèmes nocturnes sont aujourd’hui vos meilleures alliées.

La nuit, c’est le monde à l’envers. Alors que l’esprit s’endort et dérive vers le rêve, que les muscles font relâche, que la température interne baisse et que le rythme cardiaque s’apaise, la peau, elle, s’active à tous les étages. Comme l’ensemble du corps qu’il recouvre, le plus grand organe humain est régulé par l’alternance diurne-nocturne. Occupées du matin au soir à protéger l’organisme des diverses agressions qui lui tombent dessus (rayons ultraviolets, pollution, intempéries), les cellules s’emploient ensuite du soir au matin à en réparer les dégâts. Cela s’appelle la chronobiologie.

Lorsque les yeux se ferment, les cellules se dilatent pour laisser s’échapper les toxines produites tout au long du jour, à l’inverse, dès le matin, elles se rétractent pour bloquer l’ennemi. Vers 23 heures, le système immunitaire fonctionne à plein, et l’hormone de croissance, capitale dans cette entreprise de réparation, est à son meilleur rendement. A la même heure, la microcirculation s’accélère, réoxygénant les tissus, et les fibroblastes (cellules ouvrières productrices de collagène et d’élastine) travaillent à plein régime. Un peu plus tard, entre minuit et 4 heures, à exact mi-chemin de la surface et des profondeurs de l’hypoderme, certaines cellules, désormais célèbres sous le nom de « souches », sont en phase de production. La peau se régénère ainsi en trois à quatre semaines, soit plus d’un millier de fois entre 0 et 70 ans.

Face à cette agitation de haut rendement, la plupart des spécialistes sont convaincus que la nuit est le meilleur moment pour traiter sa peau, l’aider à refaire ses stocks de sébum et ses réserves nutritionnelles, rétablir son film hydrolipidique, décupler sa puissance de travail. Comme l’explique Eric Gooris, directeur de recherche du groupe Clarins, « la nuit, la peau est plus poreuse et avide d’éléments reconstituants. Le transport de ces actifs est boosté par l’augmentation du débit sanguin. Pour peu que la taille des molécules employées soit suffisamment petite, ils iront droit au but et seront bien mieux métabolisés que le jour ».

Protéger ou réparer? Une question d’âge

Dès 25 ans, on protège son capital. On en sait désormais davantage sur ces précieuses cellules souches que la nuit voit se dupliquer. Elles sont peu nombreuses (moins de 0,01% de l’ensemble de la peau), ne se renouvellent pas et ne peuvent produire qu’un certain nombre de lignées de kératinocytes. On les sait fragilisées par l’oxydation et considérablement diminuées par l’âge; elles seraient dix fois moins productives à 60 ans qu’à la naissance. Les laboratoires de cosmétiques tombent donc unanimement d’accord : pas question d’y toucher! En revanche, chaque marque souhaitant offrir la sienne, les crèmes actives sur leur environnement font actuellement une vraie percée.

Dès 40 ans, on répare les dommages. L’autre piste de recherche, c’est la réparation. S’adressant donc en priorité aux peaux dites, pudiquement, « matures », mais nécessaires dès la mi-trentaine, les crèmes ad hoc pansent la chaîne ADN ainsi que les fibres de soutien ou la capacité respiratoire des cellules. Fortifiants, nourrissants, antirelâchement grâce au renforcement des fibres d’élastine, hydratants, antiradicalaires, boosters de collagène, ce sont des soins antiâge intensifiés afin que la peau réceptive de la nuit s’y abreuve au maximum. Nouvelle mode chic, la polyvalence : une même molécule, tel le célèbre Pro-Xylane de L’Oréal et de ses marques internes (Lancôme, Vichy, etc.), agit sur plusieurs facteurs ; ou, au contraire, quantité d’agents s’additionnent en synergie dans une recette à tiroirs.

Les spécialistes débattent

Même si, dans leur grande majorité, les pros s’accordent sur les bienfaits du timing soins/nuit, d’autres assurent que la peau peut s’autoréparer. Françoise Morice, créatrice des produits qui portent son nom, affirme ainsi que, « lorsqu’elle est constamment assistée, la peau devient paresseuse. Alors que, si on la laisse respirer la nuit ou le temps d’un week-end, elle se reconstitue très bien toute seule ». Ce à quoi Jean-Claude Le Joliff, consultant pour de nombreuses marques de beauté et ex-directeur recherche & développement de Chanel, réplique que, « si ce phénomène est bien connu des scientifiques sous le nom d’homéostasie, il n’est démontrable que sur les peaux jeunes et en bonne santé. En revanche, celles qui présentent quelque fragilité (vieillissement, dérèglements, sensibilité) ont vraiment besoin d’un coup de main. A condition qu’il soit adapté : de nombreuses déclinaisons « nuit » de soins de jour ne se différencient que par une galénique plus onctueuse ». Reste donc à choisir le bon produit.

Turonnet Maïté, Lexpress.fr Styles

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