Frédéric Diefenthal

Il débarque en tee-shirt Who The Fuck Is Mick Jagger ?, pas très grand, casual, bavard, sympa. L’acteur vedette des Taxi acrobatiques joue prochainement L’importance d’être Constant d’Oscar Wilde, en Belgique…Mick Jagger ou Keith Richards ?
J’aime les deux. Keith Richards avait fait fabriquer ce tee-shirt lors d’une tournée des Stones pour la troupe de musiciens et de techniciens.

Très anglais, comme Oscar Wilde ?
Wilde n’est pas anglais mais irlandais ! Ce qui donne ce tempérament très authentique, moins décalé que les Anglais qui sont directs et sérieux (sic). Wilde est irlandais de coeur et cela se sent dans ses personnages ambigus… Je ne suis pas cultivé, j’ai fait très peu d’études, même si je suis extrêmement curieux, ce qui m’aide à remplir les manques.

Wilde, c’est moderne ?
Dès 1885, il était pamphlétaire dans un magazine féminin -le Woman’s Book- et il défendait la cause féministe, ce qui n’était pas rien !

Vous êtes féministe ?
Non, pas forcément, mais beaucoup de choses restent à faire…

Quelles sont les femmes qui vous impressionnent ?
Celle qui partage ma vie, (l’actrice Gwendoline Hamon-Diefenthal), celle avec qui j’ai eu un magnifique enfant.

Quel effet de jouer avec sa femme en scène ?
Une fois en scène, on oublie les moments de crise et d’extase du couple, la vie continue. J’ai connu Gwendoline sur la scène de théâtre il y a une douzaine d’années, on est devenus amis avant de devenir mari et femme après sept ans d’amitié. Gwendoline est une Ferrari, une bête de scène.

Quel est votre principal trait de caractère ?
Je ne vais pas m’envoyer de fleurs, je connais l’aspect négatif de mon caractère et qui fait aussi marrer : je suis râleur. Je suis assez engagé donc je ne fais pas toujours la part des choses. Je suis apparemment peu diplomate. Je dis les choses de façon directe, particulièrement dans les métiers du cinéma faits de beaucoup d’hypocrisie. On évite généralement de dire les choses en pensant qu’elles peuvent vous griller pour un futur boulot. Moi, je ne fais pas de calcul.

Acteur, un rêve d’enfant ?
Je n’en sais rien. Je pourrais dire non mais je ne peux être catégorique. C’est peut-être un rêve caché. Les rares fois où je suis allé au théâtre, c’était avec ma grand-mère qui aimait ça. J’adorais me planquer derrière le canapé chez mes parents pour regarder la télé en douce. Il m’arrivait de m’endormir devant le ciné-club. J’étais dans la contemplation et cela a peut-être eu une résonance lorsque je suis allé à une audition théâtrale avec un copain. Sinon, je voulais être marin.

Le monde est-il enchanteur ou désenchanté ?
Cela dépend des jours…Soit le monde est noir et donc pas enchanteur, soit il est rose pour vous et vous aurez tendance à ne pas le regarder. C’est également dur de regarder le monde quand vous êtes malade et vivez dans un endroit sinistre et sombre (voix d’acteur). Le monde n’est pas enchanteur mais on peut le rendre un peu plus enchanteur en étant à l’écoute.

Votre définition de la mode ?
Un troupeau de moutons…

Qu’est-ce qui vous rend le plus fier ?
C’est dur de répondre à cette question. Il y a beaucoup de choses qui me rendent MOINS fier. Je trace ma route mais le monde est injuste. Pourquoi certains doivent-ils traverser une mer dans une barque à cinquante en venant d’Afrique ? Le monde est basé sur l’injustice ! Je peux être fier pour les autres : par exemple, Mère Teresa qui a perdu la foi et qui a continué tout cet humanisme…

Vous avez un sentiment religieux ?
Non, même si j’ai été baptisé et ai fait mes communions. J’ai eu une éducation catholique, très très soft. J’ai toujours besoin de voir ce qui se passe ailleurs, de m’informer sur les religions : dans ma bibliothèque, il y a des livres qui racontent la Thora, le Coran, la Bible. J’ai besoin de comprendre comment on nous manipule : relire l’histoire permet d’avoir son propre jugement et de moins subir.

Un remède contre la déprime ?
Celui-là : s’informer. Ou alors une bonne bouteille de vin, de bons potes, une partie de poker, une belle histoire d’amour, le regard de votre enfant qui vient vous éveiller à sept heures du mat même si vous n’avez dormi que trois heures.

Notoriété, boulet ou bonus ?
C’est un bonus qui vous donne accès à plein de choses, plein de sourires, à des choix. D’un autre côté, ce n’est pas quelque chose de normal. Je m’en rends compte lorsque je vais à l’étranger dans des endroits où l’on ne me connaît pas. Avec la notoriété, on perd le sens des choses. Il ne faut pas s’endormir là-dessus.

Dans votre carrière, il y a eu un avant et un après Taxi ?
Forcément, mais il faut relativiser. C’est mon quart d’heure de gloire. Faut faire le tri : des gens vous abordent en disant qu’ils vous adorent, mais tout ce qu’ils ont vu de vous, c’est trois minutes d’interview à la télévision. Je ne dis pas cela pour les gens qui vont lire cette interview (sourire).

Séries télés, plutôt françaises ou américaines ?
Plutôt américaines…Dans les séries françaises, tout au moins celles que je n’ai pas tournées, il y a Scalp, mini-série sur la Bourse pour Canal +. Et quand même, les deux que j’ai faites, Clara Sheller et David Nolande. J’y ai trouvé une écriture authentique, sans copie des Américains ! Ayons à faire à notre culture européenne : il ne faut pas oublier que l’Amérique a puisé dans le monde entier ses auteurs, réalisateurs et producteurs.

Si vous pouviez changer une chose à votre physique ?
Comme cela marche à peu près en ce moment, je ne changerais rien mais du côté narcissique, je me changerais peut-être les joues. Je m’aime bien avec la barbe, comme si je dissimulais quelque chose !

Votre odeur préférée ?
Inévitablement, l’odeur qu’il y a chez moi, l’harmonie d’une famille, l’odeur de mon enfant, de ma femme, du bon vin, de la nourriture, du café le matin…

Le week-end idéal ?
Un bon brunch en famille avec des amis. Un brunch qui n’en finit pas. On avait prévu des trucs et puis, on reste au pieu. Le petit déjeuner continue à être pris à deux heures de l’après-midi.

Votre ultime fantasme d’acteur ?
Je trouve que l’Oscar de Marion Cotillard fait rêver. On a grandi avec l’Amérique, les films avec des gros logos, Twenty Century Fox, Warner Bros. Et plus profondément, je fantasme sur Broadway. Que je ne ferai jamais parce que je suis nul en anglais.

Propos recueillis par Philippe Cornet

Frédéric Diefenthal joue L’importance d’être Constant dans une mise en scène de Pierre Laville du 14 au 20 avril au Centre Culturel d’Auderghem à Bruxelles, le 7 mai au Théâtre royal de Namur, et le 8 mai au Palais des Beaux-Arts de Charleroi.

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