Bienvenue au Congo, merveille naturelle et poumon du monde

default

Bienvenue au Congo-Brazzaville, dont le tumultueux voisin nommé RDC a parfois tendance à éclipser les nombreux attraits. Ici, la beauté des paysages n’a d’égale que la simplicité de l’accueil ou la richesse de la faune. Et l’on s’y sent en sécurité dès qu’on y pose le pied. Texte: Marloes Zwagerman / Photos: Thomas De Sterck

Chaque jour, des centaines de touristes et de guides parcourent la forêt tropicale ougandaise et rwandaise à la recherche de gorilles, à seulement quelques dizaines de kilomètres de la zone de conflit de Goma en République démocratique du Congo (RDC). Pendant ce temps, le flux déjà modeste de visiteurs de la réserve naturelle d’Odzala-Kokoua, à plus de 1.600 kilomètres de Goma, ne cesse de diminuer. Pourquoi? A cause d’une simple confusion. Odzala se trouve au Congo-Brazzaville (également connu sous le nom de République du Congo), qui est souvent confondu avec son tumultueux voisin.

C’est la principale raison pour laquelle la réserve naturelle ne reçoit que quelques centaines de touristes par an. On est loin des foules qui se ruent chaque année dans le parc Kruger en Afrique du Sud, alors que le gouvernement belge affirme qu’il n’y a pas de danger à voyager au Congo-Brazzaville. «C’est notre plus grand défi, déclare Glance, notre guide. Peu de gens savent qu’il existe deux Congo et que notre pays est sûr.»

Le règne du vert

Nous suivons nos guides Pedro et Glance dans la partie la plus profonde du marais. L’eau brune nous arrive à la ceinture. Un Gris du Gabon vole au-dessus de nos têtes en criant. Nous marchons le long d’un boulevard d’éléphants, un chemin bien tracé dans des cours d’eau marécageux au cœur de la jungle congolaise. Le soleil matinal perce à travers les feuilles de palmiers ondulantes et le concert d’oiseaux tropicaux s’amplifie.

Odzala se réveille. «On ne peut pas être plus en contact avec la nature», s’amuse Pedro alors que nous sortons de l’eau des marais avec nos jambes de pantalon trempées et que nous nous dirigeons vers l’herbe fraîche de la savane. Retour, ensuite, dans la forêt à la recherche d’antilopes bongo ou de singes mangabeys. Partout, la nature déploie ses innombrables et magnifiques nuances de vert…

Les taxis de la capitale, Brazzaville, où notre voyage a commencé il y a quelques jours, sont également verts, en référence à l’ancien surnom de la ville, Brazza le vert. La ville compte aujourd’hui plus de deux millions d’habitants, et les arbres sont donc moins nombreux. Mais l’atmosphère verdoyante reste omniprésente au marché de Poto-poto, où des parasols multicolores protègent du soleil les fruits, les baguettes ou les textiles.

Plus loin, nous observons des influenceurs locaux en train de tourner des vidéos sur les marches de la basilique Sainte-Anne, avant d’être chaleureusement invités à prendre autant de photos que nous le souhaitons. Puis nous nous installons dans un restaurant sur les rives du fleuve Congo pour goûter aux saveurs de Brazzaville. Avec une boisson épicée au gingembre et une généreuse assiette de ragoût de viande servi avec une sauce aux arachides et de la banane plantain, nous regardons les roseaux onduler et un pêcheur jeter son filet depuis son bateau dans le fleuve. La métropole de Kinshasa, de l’autre côté de l’eau, paraît si lointaine…

Une réserve vitale pour le monde

En 90 minutes, un petit avion nous emmène de la capitale au cœur du parc national d’Odzala, situé au nord-ouest du bassin du Congo. On est là au coeur de la plus grande forêt tropicale du monde – après l’Amazonie – qui absorbe encore plus de dioxyde de carbone que son homologue sud-américaine. Autant dire qu’elle est essentielle pour le monde entier. Odzala couvre 13.600 kilomètres carrés, soit près de la moitié de la Belgique. Les arbres y atteignent 50 mètres de hauteur et, outre 430 espèces d’oiseaux, on y trouve des mammifères que l’on ne rencontre guère ailleurs en Afrique, tels que le buffle de forêt, l’antilope bongo, le potamochère et le gorille des plaines occidentales, espèce gravement menacée.

Ce sont ces cousins plus petits des gorilles de montagne qui nous mènent au Ngaga Lodge, l’un des trois camps de safari gérés par Kamba. Cette organisation se concentre sur l’écotourisme et soutient les communautés locales et la recherche scientifique. Niché dans la verdure et accueillant maximum douze touristes, il constitue le camp de base de la primatologue Magdalena Bermejo, qui mène des recherches dans cette région depuis plus de trente ans. Celle-ci est convaincue qu’il n’y a rien de plus efficace pour la sauvegarde de la biodiversité que de travailler avec les communautés locales. Ainsi, tous les pisteurs de gorilles sont originaires des villages environnants d’Ombo et de Mbomo.

Le lendemain matin, avant le lever du soleil, nous nous frayons un chemin à travers un mur de feuilles de maranta à la recherche de Jupiter, le gorille “dos argenté”, et de sa famille. Cheriguy, le pisteur, dégage le passage avec une machette et un… sécateur. En se fiant aux odeurs, à un cri au loin et à ce qui semble être des feuilles cassées au hasard, il nous conduit à l’arbre où la famille d’hominidés prendra son petit-déjeuner d’ici 45 minutes. Les animaux parcourent habilement la cime des arbres à la recherche de fruits juteux et laissent tomber nonchalamment au sol les branches qu’ils ont dépouillées de leurs feuilles.

Une femelle se perche sur une branche, grignotant quelques feuilles tout en observant ses spectateurs humains au sol. Au bout de quelques minutes, elle en a assez et, avec une expression faciale qui trahit son ennui, elle nous tourne le dos. Lorsque Jupiter descend de la cime de l’arbre un peu plus tard, les branches tremblent d’un mouvement de va-et-vient un brin inquiétant. «Chaque fois, je m’attends à ce qu’une des branches se brise, mais ça n’arrive jamais», murmure Glance, tandis que Cheriguy enregistre chaque mouvement des gorilles pour l’équipe de recherche. Ici, le tourisme et la conservation de la nature vont de pair.

Environ cinquante-huit familles de gorilles vivent dans cette partie du bassin du Congo, dont trois sont habituées à la présence humaine. Les recherches ont démontré l’importance de ces animaux pour l’écosystème. Ils répandent des graines dans la forêt par le biais de leurs excréments, à partir desquels de nouvelles plantes et de nouveaux arbres poussent. Grâce aux connaissances acquises dans le bassin du Congo, on fait aujourd’hui des meilleurs choix pour protéger l’habitat d’espèces menacées telles que le gorille des plaines, et l’équipe peut désormais travailler plus efficacement grâce à 50 caméras de surveillance et à l’IA. Ce serait impossible sans le soutien de Kamba, qui utilise les revenus du tourisme pour financer la recherche et la formation des populations locales.

Des éléphants dans la brume

Pendant notre séjour à Ngaga, nous alternons les randonnées avec des excursions en Jeep et des promenades en forêt. Nous prenons également le temps d’observer les petites merveilles insolites, comme un écureuil volant qui file d’arbre en arbre, un champignon qui ressemble à des poils d’éléphant et un céphalophe, la plus petite espèce d’antilope du Congo. Au cours d’une balade, soudainement, nous entendons des branches craquer bruyamment. Pedro lève la main. Stop. Nous retenons notre souffle. Sans rien voir, nous savons immédiatement qui se cache dans le vert foncé. L’éléphant de forêt. Nous attendons calmement que le bruissement du géant gris s’estompe. Ces animaux généralement timides peuvent souvent être observés autour de Lango Bai, le prochain campement de notre voyage. Nous nous y rendons en kayak, bien que nous parcourions la dernière partie du bai à pied en raison du faible niveau de l’eau.

Odzala est richement dotée de ces bais, plaines marécageuses qui attirent les herbivores tels que les buffles de forêt et les potamochères, suivis de près par les hyènes. Depuis Lango, nous faisons des «promenades humides» à travers des sentiers marécageux. Un instant, nous cherchons des éléphants de forêt dans le brouillard, et l’instant d’après, nous sommes positionnés de telle sorte qu’une immense volée de perroquets verts vole juste au-dessus de nos têtes, en faisant un bruit de tambour qui nous donne à la fois la chair de poule et le sourire.

Nous sommes constamment émerveillés par la richesse de cette réserve naturelle. «Depuis les airs, on ne voit qu’une vallée de feuilles vertes. Mais dès qu’on est au sol, on voit à quel point elle est pleine de vie. C’est un système très dense où tout est connecté. Si on enlève un élément, l’équilibre est rompu», explique Glance.

Nous terminons notre séjour dans le bassin du Congo à Mboko, un campement non loin de la rivière Likoli. Depuis le bateau, nous observons une famille de buffles de forêt traversant la rivière, tandis que des martinets filent à toute vitesse pour picorer des insectes volants. Pendant le voyage, nous avons été piqués par quelques mouches tsé-tsé et puces de sable. Tout au plus irritantes, mais pas dangereuses. «Tout le monde donne un peu de sang à Mama Odzala», plaisante Glance.

Nous passons la dernière journée à Brazzaville, où nous avons prévu de rencontrer plusieurs membres de La Sape (Société des Ambianceurs et des Personnes Elégantes). Il s’agit d’une sous-culture qui a gagné en popularité des deux côtés du fleuve Congo dans les années 1970. Les Sapeurs portent la courtoisie et le sens du style à leur plus haut niveau. Ce sont des artistes de l’expression, habillés par les plus grandes marques, toujours polis et dotés d’un style de danse unique. Le président de l’association locale de La Sape nous accueille chaleureusement sur la terrasse de Chez Deguy. Bien entendu, l’homme est vêtu de diverses nuances de vert…

EN PRATIQUE

Y aller

Nous avons pris un vol de nuit de Bruxelles à Brazzaville, avec une escale à Addis-Abeba avec Ethiopian Airlines. Dès 1.250 euros. ethiopeanairlines.com

Pour ce circuit au Congo-Brazzaville, nous avons été guidés par le tour-opérateur belge Sur La Iri, spécialisé dans les circuits durables en Afrique. Mais d’autres agences, comme Evaneos ou Voyageurs du Monde, organisent également des itinéraires sur-mesure.

A faire dans le coin

  • Visitez le Musée national de Brazzaville et découvrez la riche histoire de l’autre Congo.
  • A Brazzaville, prenez un taxi vert en direction de l’avenue Matsoua, qui porte le nom du premier sapeur, et rencontrez ses disciples bien habillés.
  • La ville côtière de Pointe-Noire est la deuxième plus grande ville du Congo, avec ses bars et sa plage.

Lire aussi: A la découverte de la péninsule croate de l’Istrie.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content