De Vienne à Budapest, on s’est offert une grandiose balade à vélo le long du Danube
L’EuroVelo 6 est l’une des plus belles pistes cyclables d’Europe. Pour la découvrir, nous avons pris un train de nuit afin de gagner Linz, puis longé le magnifique Danube jusqu’à Budapest en passant par Vienne et Bratislava. Grandiose, on vous dit!
De nombreux trains de nuit des Österreichische Bundesbahnen (ÖBB) proposent des billets pour les vélos, mais ce n’est pas (encore) le cas sur la ligne Bruxelles-Vienne. A la gare du Nord, nous retirons donc la roue avant de notre monture, dévissons le guidon, glissons le vélo dans un sac de voyage prévu à cet effet et le rangeons comme bagage dans notre compartiment couchette. Une solution un peu «clandestine», mais bien accueillie par les autres voyageurs et un personnel de train très serviable.
La piste cyclable du Danube suit le fleuve depuis sa source dans la Forêt-Noire jusqu’à Budapest. Nous débarquons vers le milieu du parcours, à Linz, en Autriche. Sur nos vélos, nous attachons un total de sept sacoches, contenant le moins de choses possible afin de nous trimballer sur 550 kilomètres. On apprend que certains ont déjà coupé le manche de leur brosse à dents pour voyager plus léger, mais nous ne sommes pas désespérés à ce point. Bien que ce voyage soit sportif, nous avons gardé de la place pour des vêtements plus légers… et adaptés à l’élégance des trois capitales prestigieuses que nous allons traverser: Vienne, Bratislava et Budapest.
Les premiers coups de pédales
Le train de nuit est une expérience en soi. Surtout lorsque nous traversons Cologne le soir, sous la couette. Après une nuit quelque peu agitée, nous arrivons à Linz à 8h46. Sur le quai, nous remontons les deux vélos, une tâche qui nous prend environ 40 minutes, avant de rouler directement à travers le centre-ville. Un moyen de transport idéal, le vélo restant plus rapide que les pieds, moins cher qu’une voiture au niveau du parking… et plus pratique que les transports publics afin de voir un maximum de choses.
Après un premier arrêt intéressant au musée Ars Electronica et un bon déjeuner à Das Gelbe Krokodil, nous quittons Linz en tenue de cycliste. Après nos 83 premiers kilomètres le long du beau Danube bleu, nous nous arrêtons à Ybbs. Nous logeons au Donau Lodge, un hôtel 4-étoiles doté d’un grand garage à vélos et d’une chambre spacieuse avec vue sur notre monture.
Le lendemain, nous nous arrêtons dans le village de Melk, célèbre pour son imposant monastère, et nous sommes également impressionnés par le parking à vélos, avec des casiers pour les casques et les chaussures. Il faut être honnête: les excellentes infrastructures sont légion le long du Danube.
A travers les vignobles de la Wachau
Après la visite du monastère, nous embarquons sur le DS Dürnstein, un ferry qui permet d’admirer le fleuve et ses rives sous un angle différent. Nous glissons le long de falaises abruptes, de ruines et de jolis châteaux qui se transforment peu à peu en collines ondulantes remplies de vignobles. Dans cette région de la Wachau, inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco, les paysages sont verdoyants.
Une légère brise souffle, le soleil brille, le Danube scintille. Nous comprenons pourquoi le grüner veltliner et le riesling prospèrent dans les environs. A Dürnstein, nous débarquons pour pédaler entre les raisins jusqu’à Krems. Quelques minutes plus tard, on s’installe à l’hôtel Arte, qui dispose (évidemment) d’un parking à vélos sécurisé.
Vienne, à la fois mondaine et moderne
Le lendemain, direction Vienne avec le vent dans le dos. Après trois jours à pédaler, nous soufflons pendant deux jours dans «la ville la plus agréable à vivre du monde», selon The Economist. Loin d’être une simple ville-musée, la capitale autrichienne possède de nombreuses pistes cyclables, fontaines et espaces verts. Même les abribus sont végétalisés.
Les restaurants branchés sont tellement nombreux que nous n’avons même pas le temps de déguster un Wiener Schnitzel. On recommande le délicieux lunch chez Deli sur le Naschmarkt, tandis que Ramasuri sur la Praterstrasse mérite également une mention. Pour le souper, Rinkhy est the place to be, on y commence par des cocktails et des huîtres avant de commander des plats à partager comme le ceviche ou les gnocchis maison. Pour dormir? L’Hotel Stadthalle est adapté aux cyclistes et propose un délicieux petit-déjeuner buffet bio.
Le quartier des musées est superbe. Le Leopold Museum, qui abrite de nombreuses œuvres du peintre Egon Schiele, reste le plus beau. Un peu plus loin, dans la KunstHaus, on trouve des peintures et des gravures aux couleurs vives de l’artiste Friedensreich Hundertwasser. On y apprend comment cet éco-guerrier s’est battu contre l’ouverture d’une centrale hydroélectrique à Hainburg qui était censée endiguer la dernière zone inondable du Danube mais n’a jamais été mise en service en raison des protestations. La région a même été rebaptisée Parc national Donau-Auen. Le lendemain, on s’en va flâner à l’ombre des grands arbres, notre itinéraire traversant ce magnifique parc sauvage…
Bratislava en mode archi
Nous voici arrivés à Bratislava. A 15 kilomètres de cette capitale méconnue, nous apercevons déjà le pont UFO qui enjambe le Danube, un artefact du space age datant de 1972 et construit en pleine course à l’espace. Ce n’est pas la seule belle pièce d’architecture de la ville. L’actuel maire de Bratislava, très attaché à l’espace public, a fait restaurer de nombreux éléments datant de l’époque soviétique, mais laisse aussi la place aux influences du reste du monde, comme le prouve le Sky Park de Zaha Hadid.
Après une journée reposante, on reprend la route pour 85 kilomètres… mais on s’arrête déjà après 15 kilomètres pour s’offrir un plongeon dans le joli lac de Rusovské Jazero. Ensuite, halte au musée Danubiana où sont exposées des œuvres d’artistes slovaques et de grands noms internationaux comme Karel Appel. Nous passons la frontière et nous nous écartons légèrement de la piste cyclable du Danube jusqu’à Györ, une ville hongroise qui n’a rien à envier à Arles ou à Sienne en termes de finesse.
Le lendemain, 95 kilomètres nous attendent. Nous traversons plusieurs fois la frontière slovaco-hongroise pour atterrir à Esztergom, connue pour son imposante basilique. En passant par le mastodonte de 1856, nous nous rendons à pied au Piac42, le petit bistrot frère du restaurant étoilé 42, et nous comprenons immédiatement pourquoi il est également classé au Michelin. La soupe froide de potiron, les haricots beurre moelleux et les pâtes Strozzapreti ravissent les papilles.
Bains et festins à Budapest
Environ 80 kilomètres et deux ferries plus tard, nous atteignons le centre de Budapest, fatigués mais comblés. La vue du célèbre parlement… et les endorphines nous rendent euphoriques. Ce soir-là, nous achetons immédiatement des billets pour le spa Rudas. Quel bonheur, après des journées de vélo éprouvantes, de pouvoir se détendre dans les bains thermaux qui font la renommée de la ville. Nous visitons ensuite les deux plus célèbres bains, le Gellért l’emportant haut la main sur le Szechenyi en termes d’intérieur, d’atmosphère, d’affluence et d’hygiène.
Autre moment fort: la visite du musée de la photographie Robert Capa. Il faut y consacrer un peu de temps aux expositions temporaires, aussi belles que la collection permanente. Nous mangeons un ragoût hongrois traditionnel au Gettó Gulyás, mais nous ne célébrons pleinement notre exploit sportif qu’avec un repas en cinq services au Mák, un établissement acclamé par le Michelin. L’accord avec des vins hongrois est intéressant, et l’option sans alcool, avec des kombuchas et des jus de fruits faits maison, ne déçoit pas. L’assiette de carottes rôties, plat emblématique du lieu, n’est pas célèbre pour rien.
Nous traversons la ville pour la dernière fois à vélo jusqu’à l’hôtel Maison, dont le personnel n’a pas lésiné sur les moyens pour nous offrir un séjour personnalisé. Le lendemain après-midi, nous démontons nos vélos sur le quai de la gare de Budapest-Keleti et prenons le train via Vienne, Stuttgart, Cologne puis… nos belges contrées. De la gare, nous pédalons à nouveau jusqu’à notre porte d’entrée, conscients qu’une magnifique parenthèse est en train de se refermer…
Plus d’infos sur l’EuroVelo 6 ici.
EN PRATIQUE
Comment se préparer?
La piste cyclable du Danube est si bien balisée qu’un GPS n’est pas nécessaire. Cependant, pour s’écarter du chemin comme nous l’avons fait pour aller à Györ, il vaut mieux en activer un sur son smartphone. Les hôtels le long du trajet sont bien équipés de garages avec des prises pour les vélos électriques. Et comme nous avons croisé pas mal de retraités sportifs, on peut affirmer que ce voyage n’est pas réservé aux as de la pédale.
Que faut-il apporter?
Less is more. Prévoyez des vêtements adaptés à différentes occasions, car moins il y a de poids sur votre vélo, mieux c’est. Nous n’avons pas investi dans des baskets avec un système de clic SPD intégré, mais cela aurait été utile, car vos baskets font alors office de chaussures de cyclisme. Deux tenues cyclistes ne sont pas de trop. Outre des pneus de rechange, n’oubliez pas quelques outils si vous devez démonter et remonter votre engin. Notre sac de voyage pour vélo nous a coûté 50 euros. Nous avons utilisé des vélos de gravel, mais la piste cyclable est suffisamment lisse pour un vélo de tourisme ou de route.
Combien cela coûte-t-il?
Grand avantage d’un voyage à vélo: vous avez toujours votre moyen de transport avec vous, et il permet de vous déplacer rapidement. Le train circule trois fois par semaine et coûte en moyenne 34,90 euros pour une place assise, 49,90 euros pour une couchette et 99,90 euros pour une cabine. Les nuitées sur la route? Nous avons opté pour la formule «le confort après l’effort». En Autriche, un hôtel 3 à 4 étoiles coûte en moyenne 125 euros par nuit. En Slovaquie et en Hongrie, la moyenne est d’environ 100 euros. Bien sûr, avec une tente, un matelas et un sac de couchage sur le vélo, c’est encore moins cher.
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