Jiankou, la portion la plus sauvage de la Grande Muraille de Chine (en images)
Loin des hordes de touristes, certains tronçons de la Muraille ont conservé leur charme sauvage. La visite est aussi particulièrement risquée puisqu’on y dénombre plusieurs morts par an.
La Grande Muraille de Chine s’étend sur 21 000 km. Elle serpente à travers le nord de la Chine, de la Mandchourie au désert de Gobi en passant par la mer Jaune. C’est l’une des constructions les plus célèbres de l’humanité. Elle est l’une des sept « nouvelles » merveilles du monde aux côtés du Taj Mahal et du Colisée et est inscrite depuis 1987 au patrimoine mondial de l’Unesco.
Son histoire est elle aussi épique puisque sa construction s’est étalée sur plus de 2 000 ans – du IIIe siècle avant J.-C. au XVIIe siècle après J.-C.- et 16 dynasties différentes.
La section la plus longue, et la plus célèbre, appartient à la dynastie Ming, qui a construit (et reconstruit) la muraille de 1368 à 1644 et qui comprend la section de Jiankou. Une étude archéologique menée par l’Administration nationale du patrimoine culturel et le Bureau national de l’arpentage et de la cartographie a calculé que le mur des Ming s’étendait sur 8 851 km, dont 6 259 km de mur, 359 km de tranchées, 2 232 km d’éléments naturels et 25 000 tours de guet. Loin d’une ligne droite, le réseau comprend des boucles, des murs en parallèle et des avancées.
Aujourd’hui, environ un tiers des fortifications originales des Ming ont disparu et seuls 8 % environ sont considérés comme bien conservés.
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Les menaces sont nombreuses : érosion naturelle due au vent et à la pluie, destruction humaine due à la construction et même vente de briques. Et, bien sûr, les dégâts causés par les visiteurs.
Pourtant, la plupart des touristes ne visitent que les avant-postes du mur comme les sites de Badaling ou Mutianyu. Peu s’aventurent sur ses sections plus reculées. Notamment sur la section de Jiankou qui se déploie sur 20 km au sommet de montagnes vertes et déchiquetées et n’est situé qu’à 100 km au nord de Pékin. Ici, pas de magasin de souvenirs ni de Starbucks. Pas non plus de téléphérique pour faciliter la montée. C’est avec ses jambes qu’on accède au mur et non pas sans efforts puisque ce n’est qu’après une marche escarpée de 45 minutes.
Cette section est restée dans son jus, soit telle qu’elle a été construite dans les années 1500. Elle a néanmoins subi les outrages du temps et sept kilomètres de ce tronçon ont été particulièrement malmenés. Au fil du temps, les tours ont comme fondu et ne forment plus que des monticules de décombres. La végétation a également repris ses droits, donnant au mur l’aspect d’une forêt plutôt que d’une fortification.
De quoi rendre l’endroit certes pittoresque, mais aussi dangereux. Chaque année une ou deux personnes y meurent. « Certaines sont mortes en marchant et en tombant. Et d’autres ont été frappées par la foudre », dit Ma Yao, responsable du projet de protection de la grande muraille à la Tencent Charity Foundation, qui a financé la dernière réparation.
Afin d’éviter d’autres tragédies – et de préserver le mur de Jiankou pour les générations futures – la restauration a commencé en 2015. Cette phase intensive, portant sur un tronçon de 750 m de long, s’est achevée en 2019.µ
Un travail fastidieux puisque les machines ne peuvent accéder au lieu. La restauration s’est donc faite à force d’homme, mais tout de même avec l’aide de nouvelles technologies. On a ainsi utilisé des drones pour capturer le site en images. Des images qui ont ensuite permis de réaliser une cartographie en 3D. Les restaurateurs ont également fait appel à un algorithme informatique qui pouvait dire aux ingénieurs s’ils devaient enlever cet arbre ou réparer cette fissure, ou- au contraire- s’il pouvait rester en place pour maintenir l’aspect sauvage du lieu.
L’un des amoureux du lieu est Lindesay. Il a consacré sa vie à la recherche, à l’écriture et à la lutte pour la conservation du mur précise la BBC. Originaire d’Angleterre, il a été le premier étranger à parcourir le mur Ming de bout en bout, une entreprise qu’il a répétée, bien qu’en Jeep, en 2016. Durant son périple, il est tombé amoureux du mur de Jiankou. C’est aussi lui qui a inventé le terme « muraille sauvage » pour décrire la différence entre un endroit comme Jiankou et les sections reconstruites et touristiques comme Badaling. « La muraille sauvage – et il y en a des milliers de kilomètres – constitue en fait le plus grand musée en plein air du monde », a-t-il déclaré.
Interdire l’accès à la Grande Muraille est une tâche presque impossible. Ce qui fait dire à Lindsay « que le gouvernement n’a pas d’autre choix que de commencer à reconstruire et à stabiliser, pour plus de sécurité ».
Mais réparer la muraille ne veut pas nécessairement dire qu’on la protège.
Cela peut même avoir l’effet inverse. Si un site est trop reconstruit, il peut perdre de sa saveur. Beaucoup disent que c’est le sort qu’a subi Badaling, la partie la plus populaire du mur. Lors de sa restauration, qui a commencé dans les années 1950, il a été reconstruit avec de nouvelles briques et du ciment moderne. Aujourd’hui, beaucoup sont couverts de graffitis. Certain parle même d’une « Disneyfication » du mur.
La restauration de Jiankou souhaite éviter ces erreurs, notamment en utilisant la 3D. L’objectif principal de la 3D est de surveiller l’ensemble du processus de restauration. L’une des tours en est un exemple. Son toit était couvert d’arbres, qui ont été déracinés pour garder la tour intacte. Pour enlever les arbres, l’équipe a dû retirer les briques. Dans le passé, il aurait été difficile de savoir comment remplacer les briques avec précision.
Aujourd’hui, ils peuvent retrouver l’emplacement d’origine de chaque brique. La 3D permet de travailler plus rapidement et avec moins d’intervention.
Aujourd’hui, les équipes utilisent ces connaissances pour la phase suivante. Soit la restauration d’une autre partie du mur : celle de Xifengkou, à environ 300 km de Jiankou. Cette section s’étale sur environ 900m et une partie est sous l’eau.
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