Le premier train de nuit Berlin-Paris est entré en gare

Un employé de la SNCF passe devant une voiture du train Berlin-Paris "nightjet" après son arrivée à la Gare de l'Est à Paris le 12 décembre 2023. © Photo d'Alain JOCARD / AFP via Getty images

Le premier train de nuit entre Berlin et Paris est arrivé mardi matin dans la capitale française après plus de 14 heures de voyage, un « symbole écologique et européen » selon le ministre français délégué aux Transports.

Le train est arrivé au son d’une musique victorieuse et sous l’œil des nombreux objectifs sur le quai de la Gare de l’Est. La vingtaine de minutes de retard n’a pas gâché la fête. « C’est un symbole dont on a besoin en ce moment. C’est un symbole positif, écologique et européen », a lancé tout sourire à la presse le ministre Clément Beaune qui avait fait le voyage, à la descente du train.

Erwan Lucas, membre de la délégation de l’office franco-allemand de la jeunesse (Ofaj) invitée pour ce premier voyage, s’est réjoui de cette nouvelle ligne qu’il attendait « avec impatience ». Habitué des trajets en train – de jour – entre Berlin, où il vit, et Paris, où ses parents résident, cet étudiant fervent défenseur du train s’est félicité de « la fin des correspondances ratées en gare de Francfort » grâce à cette nouvelle liaison directe.

Pour le moment, trois liaisons par semaine sont prévues avec départ les mardis, jeudis et samedis depuis Paris et les lundis, mercredis et vendredis depuis Berlin. Le service doit devenir quotidien à partir d’octobre 2024. L’arrivée à Paris est prévue à 10h24 – un horaire considéré comme un peu tardif par la plupart des participants au premier voyage – contre 08h26 à Berlin.

Le Berlin-Paris, opéré avec des trains Nightjet appartenant à la compagnie autrichienne ÖBB, pionnière dans la relance du train de nuit en Europe, offre plusieurs options, de la couchette à la place assise en passant par la voiture-lit avec chambre privative pour une, deux ou trois personnes.

Moins polluant

« Heureusement que nos collègues autrichiens avaient du matériel disponibles. Eux ont eu cette vision et cette intelligence de s’engager pour le train de nuit » quand la plupart des compagnies y renonçaient, a rendu hommage le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou, à l’arrivée du train.

La compagnie autrichienne a énormément investi dans les trains de nuit, y compris dans des trains neufs, quand l’Europe de l’Ouest fermait petit à petit la plupart de ses lignes de nuit durant la décennie 2010. Depuis 2020, face à l’engouement pour des modes de transport moins émetteurs en CO2 que l’avion ou la voiture, la France a elle aussi fait le choix de relancer les trains de nuit.

En 2016, il ne subsistait plus que deux lignes de ce genre en France: l’une allant de Paris vers les Pyrénées – Latour-de-Carol ou Portbou en passant par Toulouse – et Albi et l’autre de Paris à Briançon, dans les Alpes. L’objectif est d’en avoir dix d’ici 2030. Le collectif « Oui au train de nuit » appelle lui à en ouvrir une trentaine et à investir plus massivement, alors que la France n’a pas prévu d’acheter de trains neufs avant 2025.

100 millions d’euros

Adeptes du « slow travel », voyageurs écolos soucieux de l’impact carbone de leurs déplacements: la clientèle continue de croître pour un mode de transport non dénué de charme. En France, les trains de nuit n’étaient remplis qu’à 40% en 2019. Ils le sont désormais à 70%.

Le gouvernement français a investi 100 millions d’euros pour la rénovation de 129 vieilles voitures Corail des années 1970 et pour de nouvelles installations en gare. Mais la limite a été atteinte et à l’heure actuelle, sans nouveaux trains, impossible d’ouvrir de nouvelles lignes.

« La construction de trains neufs prend de cinq à huit ans. Pendant ce temps, l’Europe avance: l’Autriche commence à mettre en service plus de 200 voitures de nuit flambant neuves, qu’elle avait commandées dès… 2018 », souligne le collectif « Oui au train de nuit ». Si le train de nuit bénéficie d’un certain engouement, il reste un produit peu rentable pour les compagnies ferroviaires.

L’Etat français subventionne largement les lignes relancées: environ 10 millions d’euros par an pour la liaison vers Berlin ainsi que trois à quatre millions pour celle entre Paris et Aurillac, supprimée il y a 20 ans et rouverte dimanche soir, selon le ministère des Transports.

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