A Tochimilco, ville mexicaine de l’avocat, les projets de Trump font trembler

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Les producteurs d’avocat de Tochimilco, une petite ville du centre du Mexique située au pied du volcan Popocatepetl, sont habitués à vivre sous la menace de jets de roches incandescentes et de cendres. Mais Donald Trump et son discours incendiaire sur une possible fermeture de la frontière américano-mexicaine les inquiète bien davantage que l’imposant volcan.

:La pire chose qui pourrait leur arriver serait de perdre l’accès au marché américain, où part 80% des exportations d’avocats du pays. Le Mexique est le plus grand producteur d’avocats au monde, avec près de deux millions de tonnes l’an dernier.

« Quand nous entendons Trump parler du mur, de la fermeture de la frontière, nous savons que cela nous causerait des dommages », indique Genaro Ramirez, un producteur d’avocats coiffé d’un chapeau de cow-boy.

« Les Américains aiment notre produit, ils en achètent beaucoup. Lorsque nous exportons aux États-Unis, ils nous paient en dollars, ce qui est d’une grande aide pour l’économie mexicaine », souligne-t-il à l’AFP.

Selon des études, l’avocatier viendrait d’ici, et la langue autochtone aurait donné le mot « avocat », qui vient de « ahuacatl », signifiant « testicule » en nahuatl.

Les États-Unis sont devenus le plus gros importateur d’avocats au monde. De l’avocat tartiné sur du pain grillé au guacamole du Super Bowl, le fruit vert est devenu non seulement un produit diététique mais aussi un aliment de base, partie intégrante de la culture américaine.

Cette idylle a été alimentée par les recherches soulignant ses avantages pour la santé, et une expansion massive de l’offre, grâce à l’assouplissement des restrictions d’importation au cours des deux dernières décennies.

Les quelque 2 milliards de dollars que l’exportation d’avocats génère au Mexique sont depuis devenus un symbole du commerce transfrontalier.

Fièvre de l’or vert

La menace de Donald Trump de fermer la frontière si le Mexique « n’arrêtait pas immédiatement TOUTE immigration illégale vers les États-Unis » a dès lors jeté un froid sur cette belle romance.

Le milliardaire américain a finalement levé sa menace. Il a toutefois averti qu’à la place il pourrait imposer des droits de douane de 25% sur les véhicules importés du Mexique.

Ses menaces ont déjà déclenché une fièvre de l' »or vert ».

Les médias ont prévenu que les États-Unis seraient à court d’avocats dans les trois semaines si Donald Trump mettait ses menaces à exécution, et le prix de l’avocat américain a aussitôt bondi de 34%. « Heureusement, cela signifie plus d’emplois pour des fruits américains patriotiques », s’est moqué le journal satirique The Onion dans une fausse interview.

Mais à Tochimilco, les menaces de Trump ne font pas rire. « S’il n’en veut plus (des avocats mexicains), nous allons perdre beaucoup d’argent, beaucoup d’emplois », s’inquiète Donato Amelco, un cultivateur arborant une moustache grise touffue. « Que feront les gens pour vivre? », se demande-t-il en goûtant plusieurs variétés d’avocats répartis dans des assiettes, lors d’une foire dédiée à ce fruit.

Plantations d'avocats à Tochimilco, au Mexique
Plantations d’avocats à Tochimilco, au Mexique© AFP

Cinquante nuances d’avocat

Cette foire célèbre chaque année « cinquante nuances » d’avocat, allant de la mousse à la crème glacée, en passant par les sucettes glacées, confitures et autres pâtisseries à base d’avocat.

Chaque année, une reine de beauté préside aux festivités devenant pour l’occasion « reine de l’avocat ».

Avec son climat tempéré et ses deux récoltes par an, Tochimilco est un lieu propice à la culture de ce fruit, même si la majeure partie de la production provient de l’Etat du Michoacan, plus à l’ouest.

Au pied du volcan Popocatepetl, où des avocatiers parsèment les terres, cette activité est une des principales ressources de cette communauté de 3.000 habitants.

Environ 200 petites exploitations agricoles vivent de ce fruit et le vendent à des intermédiaires.

Le Mexique est le premier exportateur mondial d’avocats, mais consomme 78% de sa production à l’intérieur de ses frontières.

Une fermeture de la frontière américaine provoquerait inévitablement une chute des prix sur le marché mexicain du fait de la surproduction qu’elle entraînerait.

Les habitants de Tochimilco, qui restent profondément attachés à leur culture et à leurs croyances indigènes nahuatl, tentent d’appréhender cette menace avec le même regard confiant qu’ils posent sur le Popocatepetl, entré en éruption 25 ans plus tôt. « Le volcan ne nous fait jamais peur », souligne Juana Analco, une autre productrice d’avocats. « Chaque année, nous lui faisons des offrandes pour qu’il continue de nous apporter son abondance », dit-elle.

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