Eric Martin et sa gastronomie authentique qui respecte les saisons (+ recettes)

Homme de terroir, le chef a ancré sa cuisine dans sa Famenne natale depuis quelque trente ans. Son répertoire est le reflet de sa personnalité, sans détours et sensible à la fois.

Eric Martin
Eric Martin© Jean-Pierre Gabriel

Taillé dans le roc, Eric Martin est aussi entier que sa grande carrure le suggère. Et sa cuisine lui ressemble ; elle plonge ses racines et son inspiration dans ces paysages de la région de Lavaux-Saint-Anne, mélange de prés et de bois, et évolue pour se nourrir de la saisonnalité, un mot qui lui est cher. Pour le chef de la Maison Lemonnier, chaque période de l’année est donc importante. Mais septembre est particulier parce que ce mois marque l’ouverture de l’automne et celle des premières chasses. Dans les clairières, c’est encore le pic de ces luttes sans merci entre cerfs amoureux qui se matérialisent par d’intenses brames. Et si la chasse n’intéresse pas en tant que telle celui qui se décrit plutôt comme pêcheur, il « aime malgré tout suivre les mouvements du gibier ». Il va sans dire qu’en saison du chevreuil, Eric Martin achète à son boucher spécialisé la bête entière, ce qui lui permet d’en valoriser à sa manière tous les morceaux. Ainsi, les flancs et le cou, par exemple, lui permettent d’élaborer un fond de derrière les fagots, base de ses sauces.

Pour notre homme, qui confie connaître sa forêt « par coeur », ce moment de l’année est cependant davantage synonyme d’humus, cette odeur prenante qui monte de la terre et qui évoque les récoltes aux saveurs denses. « Nous avons dans la région une poire sucrée, caractéristique rare pour ce fruit. On l’appelle Petija, le sobriquet qui désigne les habitants de Lavaux. On en fait des conserves. Nous cueillons également les baies de cornouiller et d’églantier. » Côté botanique, le chef a une autre passion très gourmande, à savoir les champignons : girolle, cèpe, pied-de-mouton, pied-bleu, chanterelle tubulaire, ou encore clitocybe améthyste, d’une belle couleur violacée. « Nous récoltons aussi le bolet poivré, ajoute-t-il, que l’on fait sécher pour le réduire en poudre et avoir ainsi un poivre de bolet. » Mais son champignon préféré est une espèce spongieuse, donc difficile à nettoyer, le sparassis crépu, encore appelé morille des pins. « Il est assez rare. Quand j’en trouve, je l’offre aux clients du restaurant, simplement sauté au beurre. »

Duo gagnant

L’important pour ce gars de terroir : s’adapter au produit. « C’est un peu comme le maçon qui doit trouver le meilleur moyen de placer une pierre donnée dans un mur, en respectant ses formes », illustre-t-il. D’une telle philosophie naissent alors des recettes comme le faisan entouré de bruyère et cuit dans l’argile, le marcassin enveloppé de feuilles de noyer ou la langoustine dont le bouillon est aromatisé de jeunes branches de genévrier, prélevées sur un des buissons qu’il a plantés dans son jardin. Le cuisinier expérimente à sa manière : « J’ai adapté la recette du jambon persillé en utilisant des épaules de chevreuil et en remplaçant l’acidité du vin blanc par celle du vin rouge. C’est vraiment très bon. »

Depuis une dizaine d’années, Eric a été rejoint, aux fourneaux, par son fils Tristan. « Il a 32 ans, exactement le nombre de mes années de métier. » Devant leurs casseroles, les deux hommes se livrent à un véritable quatre mains, chacun apportant sa note à l’édifice des saveurs, à l’image de cette poudre de baies de capucine que le plus jeune prépare. Depuis peu, ce dernier propose également une table d’amis pour laquelle il concocte un menu spécifique à partager pour un maximum de huit personnes. Bon sang ne saurait mentir…

Maison Lemonnier, 82, rue Baronne Lemonnier, à 5580 Lavaux-Sainte-Anne. www.lemonnier.be

PAR JEAN-PIERRE GABRIEL

Filet de chevreuil, textures de salsifis
Filet de chevreuil, textures de salsifis© Jean-Pierre Gabriel

Filet de chevreuil, textures de salsifis

Pour 4 personnes

Ingrédients :

  • 4 morceaux de filet de chevreuil de 125 g dans la gigue ou le dos,
  • 500 g de gros salsifis,
  • grué de cacao ou café moulu,
  • 60 g de beurre non salé,
  • vinaigre,
  • huile végétale,
  • sel,
  • poivre.

Pour le fond de chevreuil :

  • 1 kg de cou de chevreuil avec os en morceaux de 50 g,
  • 2 carottes moyennes,
  • 2 branches de céleri,
  • 2 oignons,
  • 1 feuille de poireau.

Préparation :

– Rôtir la viande destinée au fond sur une plaque creuse durant 45 min, dans le four préchauffé à 200 °C.

– Déglacer à l’eau, transférer dans une casserole. Ajouter les légumes et mouiller à hauteur. Cuire à petits frémissements (max 90 °C), jusqu’à obtenir une réduction aux 3/4. Filtrer le fond obtenu, le placer au frigo, de manière à solidifier la graisse pour ensuite la retirer.

– Laver soigneusement les salsifis, les éplucher à l’aide d’un Econome et les placer dans de l’eau légèrement vinaigrée. Prélever dans le pourtour une dizaine de fines bandelettes. Les frire à l’huile à 160 °C durant 2 min. Placer sur un papier absorbant.

– Réaliser à la mandoline quelques spaghettis de salsifis. Les blanchir dans une eau bouillante, soit 2 à 3 min.

– Détailler 12 bâtonnets de 4 à 5 cm dans les salsifis. Les cuire en les couvrant d’eau salée, additionnée d’une noisette de beurre.

– Cuire le reste des salsifis de la même manière, les réduire en purée, saler et poivrer.

– Cuire les filets à la poêle et au beurre. Les colorer sur chaque face et poursuivre la cuisson en les arrosant durant 3 à 4 min. Terminer dans un four non ventilé, 5 min à 160 °C. Laisser reposer sous une feuille d’aluminium durant 7 à 8 min. Pendant ce temps, réchauffer le fond et le monter en incorporant 1 noix de beurre, au fouet. Saler et poivrer.

– Trancher la viande, dresser sur assiette chaude. Puis déposer les 4 textures de salsifis : purée, bâtonnets, spaghettis revenus au beurre et croustillant frit.

– Saupoudrer de poivre et de grué de cacao et/ou de café moulu.

Caille façon salade liégeoise
Caille façon salade liégeoise© Jean-Pierre Gabriel

Caille façon salade liégeoise

Pour 4 personnes

Ingrédients :

  • 2 cailles de 250 g (ou 4 petites cailles),
  • 200 g de haricots verts fins,
  • 120 g de girolles,
  • 30 g de crème fraîche épaisse (type Isigny),
  • 1 tranche de jambon cru,
  • 40 g de beurre,
  • 1 c à s de vinaigre de Xérès,
  • 1 g d’agar-agar,
  • 1 dl de lait,
  • 1 à 2 c à s de fécule de maïs,
  • 1/2 c à c de poudre de girolles déshydratées,
  • sel,
  • poivre.

Pour le bouillon :

  • 1/2 oignon moyen,
  • 1/2 jeune carotte,
  • 1 branche de céleri,
  • 5 cm de vert de poireau.

Préparation :

– Prélever les filets des cailles et les pattes. Réserver les carcasses et les peaux pour le bouillon.

– Infuser d’abord les légumes dans 1/2 l d’eau à frémissement durant 8 min. Ajouter les carcasses et les peaux, et poursuivre la cuisson durant 35 min. Filtrer ensuite ce bouillon.

– Cuire les blancs dans ce liquide durant 10 min à environ 65 °C. Cuire ensuite les pattes entières durant 2 heures à environ 85 °C. Désosser. Garder le bouillon.

– Nettoyer soigneusement les girolles et les couper en 4. Placer les parures dans 2 dl de bouillon. Infuser durant 30 min et filtrer.

– Prendre 1 dl de ce bouillon. Ajouter à froid 1 c à s de vinaigre et 1 g d’agar-agar. Fouetter jusqu’à ébullition. Laisser refroidir ce gel.

– Découper des bâtonnets de 4 cm dans les haricots. Blanchir ceux-ci. Prendre les parures et les placer dans environ 1/2 dl de lait et 1/2 dl de bouillon. Porter à ébullition. Lorsque les haricots sont cuits, mixer finement. Incorporer la fécule de maïs à chaud en fouettant. Réserver.

– Sauter les girolles au beurre. Faire de même avec les haricots blanchis. Saler et poivrer.

– Dresser la chair de caille froide sur quelques haricots et girolles. Couvrir le blanc de mousse de haricots chaude. Entourer de girolles et haricots, de quelques points de crème Isigny et de gel vinaigré. Saupoudrer de poudre de girolles séchées.

– Terminer par un grand copeau de jambon (sans son gras) séché au four à 40 °C durant 15 à 20 min.

Tartelette au sucre
Tartelette au sucre© Jean-Pierre Gabriel

Tartelette au sucre

Pour 8 tartes de 15 cm

Ingrédients :

Pour la pâte levée sucrée :

  • 500 g de farine,
  • 2 oeufs,
  • 20 g de levure,
  • 190 g de beurre,
  • 8 g de sel,
  • 2 dl de lait,
  • 30 g de sucre S2.

Pour le décor :

  • 2 c à s de crème fraîche épaisse et
  • 2 à 3 c à s de cassonade brune par tartelette.

Préparation :

– Mettre la farine tamisée dans le bol du robot équipé du crochet, ajouter le lait à 30 °C et la levure (délayée dans un peu de lait tiède). Incorporer les oeufs, le beurre en pommade puis le sucre et enfin le sel. Laisser reposer la pâte emballée dans un film alimentaire au frais pendant 2 heures.

– Sortir du frigo et abaisser la pâte jusque 2 mm d’épaisseur. Détailler des disques de 15 cm. Les remettre au frigo pour 2 heures et les rouler à nouveau.

– Répartir la crème sur la pâte et saupoudrer la cassonade. Enfourner dans un four préchauffé à 160 °C pour 15 à 20 min.

La vaisselle des recettes est signée par Coraly Sépulchre,

30c, rue de Redu, à 6929 Porcheresse. Tél : 061 25 61 25.

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