Lancez-vous dans la cueillette d’algues à Ostende avec le chef Donald Deschagt
Le chef Donald Deschagt, spécialiste des algues, nous emmène faire une promenade à la recherche d’algues à Ostende. Bonne nouvelle: on peut cueillir autant d’algues qu’on le souhaite. « Les algues poussent plus vite que nous ne pouvons les manger et toutes sont comestibles ».
Au Spuikom d’Ostende, Donald Deschagt pêche une huître hors de l’eau. Une longue barbe d’algue pend à la coquille. « Sargasse japonaise », s’exclame Donald avec enthousiasme. » Une algue venue du Japon avec l’industrie maritime et qui pousse bien ici aussi : j’arrache les baies croquantes remplies d’eau de mer salée et je les mets dans de l’huile d’olive. J’appelle ça du caviar d’algues. »
Donald est connu pour son amour des algues. Avec son épouse Mieke Coussement, il a métamorphosé le restaurant de moules que ses parents ont tenu trente ans à Bredene en un restaurant gastronomique (Le Homard et La Moule) où il ajoute à chaque plat une portion bien dosée d’algues. Son célèbre beurre d’algues aux anchois accompagne l’apéritif (un gin-tonic infusé aux algues), en plat il associe coquilles Saint-Jacques à la dulse, une algue rouge, et au topinambour et en dessert on y sert des ananas pochés aux algues et aux agrumes. « J’ai fait beaucoup d’expériences : par exemple, j’ai découvert que les algues ne se combinent pas du tout avec le café, mais sont délicieuses avec la poire et le caramel. »
Les algues étant très tendance, Donald n’ouvre les portes de son restaurant que le week-end. Le reste de la semaine, sous le nom de « Studio Zeewier », il emmène les gens se promener le long de la côte pour partir à la découverte des algues, élabore de la charcuterie, des fromages, de la bière et du chocolat à base d’algues, forme des chefs à la cuisine aux algues et conseille entreprises et autres sur la culture et la récolte des algues. Au cours de notre promenade, Donald nous montre les endroits où les algues aiment pousser : sur les brise-lames ou digue en béton, dans une crique abritée ou dans le port. « Sur notre côte, il n’est pas si facile de trouver beaucoup d’algues : sur une plage de sable, les algues n’ont rien à quoi s’accrocher. Une côte rocheuse, comme le Cap Gris-Nez, est un paradis pour les ramasseurs d’algues. »
Et pour la cueillette, vous pouvez y aller avec les algues : il n’y a pas de restriction sur la quantité d’algues en tant que cueilleur privé, contrairement à la cueillette des huîtres sauvages, par exemple. « Les algues poussent plus vite que nous ne pouvons les manger », dit Donald. « C’est pourquoi je pense que c’est l’aliment du futur : il pousse dans l’eau salée, dont il y a abondance, et il se développe à un rythme effréné. »
Les algues pour les nuls
Sur la côte de la mer du Nord, vous pouvez trouver différents types d’algues tout au long de l’année : chaque algue a sa saison de croissance préférée, mais il y a toujours quelque chose à cueillir. Pendant notre promenade, Donald nous montre des grappes de fucus vésiculeux : le fucus que l’on trouve parfois dans une caisse d’huîtres. C’est une algue brune assez coriace, mais si vous la blanchissez et la hachez finement, vous pouvez la manger. « Un moyen facile de commencer à expérimenter avec les algues en cuisine est de les faire tremper dans un vinaigre neutre », explique Donald. « De cette façon, vous ajoutez une subtile saveur salée à vos plats. On immerge les algues fraîches dans du vinaigre pendant deux à trois semaines, puis on filtre le tout. »
Une autre algue qui prospère pendant ces mois froids est l’herbe du chêne : on la reconnaît à la forme de ses « feuilles », qui rappellent la forme dentelée d’une feuille de chêne. Les algues sont brunes lorsque vous les cueillez, mais deviennent vertes lorsque vous les chauffez. « Une façon savoureuse et facile de la traiter est de rincer les algues, de les sécher et de les mélanger avec un peu d’huile et des graines de sésame, puis de les rôtir au four jusqu’à ce qu’elles soient croustillantes. Il est également possible de procéder à un séchage à basse température (environ 30 minutes à 90°C) dans le four, puis de broyer les algues : vous aurez ainsi sous la main une poudre d’algues qui relèvera tous vos crackers et biscuits. Également délicieux sur une meringue ! »
Saucisses de mer
« Toujours récolter les algues là où elles poussent », conseille Donald, en grimpant sur la rive en béton du brise-lames. « Vous ne savez pas à quel point les algues sont fraîches lorsqu’elles sont rejetées sur le rivage. Les algues remontent à marée basse : c’est le bon moment pour les récolter. Utilisez toujours un couteau pour couper les algues : laissez un petit morceau de la plante là où elle est attachée à la roche : ainsi, l’algue pourra repousser. Il est également important de bien rincer les algues à la maison et de trouver la meilleure façon de les préparer. Certaines algues peuvent être consommées crues, d’autres se marient bien dans un bouillon ou simplement séchées sous forme de poudre. Toutes les herbes que vous trouvez dans la mer sont comestibles, bien que certaines soient plus appétissantes que d’autres. Il n’est pas vrai que certains types d’algues peuvent vous rendre malade, comme c’est le cas pour les champignons sauvages. Cela en fait un matériel d’entraînement parfait pour les cueilleurs débutants.
Les algues étant un excellent exhausteur de goût, Donald s’est inspiré de ces algues pour développer un certain nombre de produits. Avec le boucher d’Ostende Deschildre, il fabrique du « boudin de mer », un boudin blanc avec de la laitue de mer, mais aussi des rillettes de porc crémeuses avec des algues et des coquilles Saint-Jacques et des saucisses sèches qui sont populaires dans les cafés de la côte. On peut aussi goûter les fromages aux algues qu’il a mis au point avec le fromager de la Beauvoordse Walhoeve : l’onctuosité du lait se marie parfaitement avec les algues. Le chocolat au yuzu et aux algues de Zoete Zee et la triple aux algues de la mer du Nord sont également surprenants. « J’utilise les algues comme exhausteur de goût et substitut du sel », explique Donald, « mais elles constituent également un excellent liant. Pensez à l’agar-agar, substitut de la gélatine, qui est fabriqué à partir d’algues. Nous connaissons les algues principalement comme un ingrédient de la cuisine orientale, c’est donc un défi pour moi de les utiliser dans nos traditions culinaires belges. Je ne fais pas de dashi à partir de flocons de thon : je combine du kombu avec des têtes de crevettes de la mer du Nord. Pour mon pain, j’utilise l’eau de cuisson des algues : de cette façon, je ne dois ajouter bien moins de sel’.
Ferme d’algues
L’idée de rechercher des algues ici m’est venue il y a dix ans, bien avant que les algues ne deviennent populaires. « Je n’y aurais jamais pensé moi-même », s’amuse pourtant Donald. « C’est l’un des clients du restaurant qui m’a encouragé à commencer à cuisiner avec des algues. Je pensais que c’était une idée folle, mais il s’est avéré que le client en question était un biologiste marin qui était convaincu que les algues seraient la nourriture du futur. » Ce client s’était Colin Janssen, professeur d’écologie aquatique à l’université de Gand, un défenseur convaincu des avantages écologiques et sanitaires de la consommation d’algues. « Il m’a donné le coup de pouce dont j’avais besoin et, depuis, je suis obsédé par l’incroyable variété de goûts, de textures et de qualités des algues. J’ai constamment la tête qui tourne pour développer de nouvelles saveurs et combinaisons. »
Pour l’instant, la Belgique n’a pas de fermes d’algues, mais M. Donald espère que cela changera bientôt. « Le principal avantage écologique des algues est leur capacité à stocker le CO2. De nombreux problèmes environnementaux sont causés par les quantités de CO2 libérées par l’élevage ou la combustion de combustibles fossiles. Les algues font exactement le contraire. Une autre propriété fantastique des algues est qu’elles se nourrissent de nitrates et de phosphates issus des engrais utilisés pour l’agriculture et qui s’infiltrent dans la mer via les rivières. Donc, si vous cultivez des algues, vous rendez l’environnement plus propre et elles ont bon goût. Qu’est-ce qu’on attend ?
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