Le porc noir basque kintoa en pleine renaissance

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Robe tachetée de noir, tête et cul noirs, le porc de race basque kintoa, qui était considéré depuis 1981 en France comme en voie de disparition, est en pleine renaissance grâce à l’opiniâtreté de quelques éleveurs des Pyrénées.

Réputé pour la qualité de sa viande et de son jambon haut de gamme, il a obtenu cet été le label d’Appellation d’origine contrôlée (AOC), ce qui est « le fruit d’un travail collectif d’une trentaine d’années », indique Christian Aguerre, éleveur de kintoa à Itxassou, dans le sud-ouest de la France.

La dénomination kintoa provient de quinta, l’impôt payé à l’époque du Royaume de Navarre sur le territoire où le porc basque, bicolore et court sur pattes, est toujours élevé.

A Banca, un village situé dans les plaines et montagnes de la vallée des Aldudes qui est le fief de l’élevage du porc basque, non loin de la frontière espagnole, des dizaines de kintoa poussent joyeusement du groin, sous le regard émerveillé de Pierre Oteiza et Michel Oçafrain, éleveurs. « En 1988, j’ai découvert cette race que je pensais disparue au Salon de l’agriculture à Paris. De retour, avec une poignée d’éleveurs (…), nous avons rassemblé tous les exemplaires qui restaient au Pays basque: 25 truies et 2 verrats », indique Pierre Oteiza.

Au milieu des années 1990, une trentaine d’éleveurs travaillent ensemble à la renaissance de la race, avec 136 truies et 34 verrats en activité. Ils créent alors une association, un séchoir collectif pour le jambon, puis « ferraillent jusqu’à obtenir la reconnaissance en AOC pour la viande de porc et le jambon sec », résume Michel Oçafrain, qui est aussi maire de Banca.

Aujourd’hui, soit deux décennies plus tard, la filière recense quelque 80 producteurs, 100 salariés et produit 3.000 porcs par an, ce qui représente 6.000 jambons.

Son aire est limitée à 231 communes du Pays Basque et limitrophes et obéit à un cahier des charges très strict.

Un produit à forte valeur ajoutée

Les élevages, qui doivent obligatoirement être en prairie ou en bois, sont composés de 25 à 30 porcs maximum par hectare. L’animal doit être nourri d’herbes, de glands et de céréales provenant de la zone d’Appellation et le jambon kintoa est séché sur bois dans des conditions naturelles au minimum pendant 15 mois.

Le succès semble au rendez-vous: la filière, qui réalise un chiffre d’affaires annuel de 59 millions d’euros, exporte jusqu’au Japon, au Canada ou à Hong Kong. « La disparition de cette race basque dans les années 1920 s’explique par sa faible productivité par rapport aux races classiques », indique Pierre Oteiza.

Alors qu’un porc classique atteint les 150 kg en 8 à 9 mois, le kintoa met, lui, 14 à 15 mois pour arriver au même poids. C’est pourquoi, après la Première Guerre mondiale, les éleveurs basques ont peu à peu abandonné le kintoa au profit de races classiques. « Mais sa viande et son jambon sont sans pareils », assure Michel Oçafrain, avec « un goût fondant, de noisette et sous-bois » et un parfum qui « reste en bouche très longtemps ».

Pour les éleveurs, cette activité a l’avantage de permettre des marges importantes car le kintoa, rare et considéré comme un produit de luxe, se vend cher: un jambon désossé agréé kintoa se vend 50 euros le kilogramme et le jambon tranché entre 65 à 70 euros par kilo. « Notre objectif est d’atteindre en 2020 une production de 5.000 cochons. C’est une alternative pour nos éleveurs », explique M. Oçafrain. « Et dans un an, on fêtera l’Appellation d’origine protégée (AOP) », protectrice au niveau européen, prédit-il.

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