Que se cache-t-il dans votre assiette? Les faux-semblants de l’industrie agro-alimentaire
L’industrie agro-alimentaire, qui doit concilier bénéfices et exigence de prix bas de la part des consommateurs, use d’une multitude d’artifices dans ses aliments préparés. Le tout le plus légalement du monde ! Mais à quel prix pour la qualité qu’elle nous promet ?
Face à des produits préparés, il est difficile de résister aux photos alléchantes sur les emballages. On se surprend donc à se laisser convaincre de les acheter. Et si ce qu’on nous y vendait n’était pas ce que l’on croyait ? On ne parle pas de viande de cheval vendue comme viande de boeuf, non ! Mais d’exagérations, le tout le plus légalement du monde !
La liste qui suit n’est pas exhaustive, mais elle nous apprend une chose : pour ceux qui ne veulent pas se laisser berner par des ingrédients sains, mais en quantités minimes, ni par des faux-semblants, préférez la cuisine maison, avec des aliments de base choisis en toute connaissance de cause… ou presque…
Faux fromage
Elle vous fait saliver, cette photo de morceau de pizza alléchante, relié au reste de la pizza par des fils de fromage fondu… Retombez sur terre ! Ce bon fromage pourrait ne pas contenir un seul gramme de lait. Cargill, grand fabricant américain d’ingrédients pour l’industrie agro-alimentaire, a créé deux variantes de fromage analogue : l’une composée à 15 % de protéines laitières, d’huile de palme (dont on connaît les méfaits sur la santé et l’environnement) et de quelques exhausteurs de goût ; l’autre, appelée « lygomme » composée de trois sortes d’amidons, de galactomannane et de carraghénane (deux gélifiants) et d’arômes. Dans ce dernier cas, pas la moindre trace de lait… mais toute l’apparence du fromage ! Ces préparations fromagères analogues sont présentes aussi dans d’autres plats préparés, comme des lasagnes, des hamburgers et autres plats censés contenir du fromage. La Communauté européenne a autorisé ce fromage analogue à condition que sa présence soit précisée dans la liste d’ingrédients. Mais bien malin celui qui saura ce que sont les galactomannane et carraghénane ! La lecture des ingrédients sur l’emballage nous en dira donc long…
Notons qu’actuellement, la Belgique semble épargnée, mais jusqu’à quand ? Et peut-on se fier aux aliments non soumis à l’étiquetage comme ceux vendus dans des restaurants de type fast-food ?
Un peu de viande bien assaisonnée ?
Vous préparez un petit plat, avec légumes, viande… et souhaitez y incorporer un petit goût complémentaire ? Comme ce délicieux bouillon de viande, dont l’emballage nous montre une magnifique pièce de viande bien cuite ; ou le cube de bouillon de légumes, condensé de carottes, persil, oignons, tomates, brocoli, courgettes… Que nenni ! En fait, il s’agit essentiellement de… sel ! Sur l’emballage de l’une des marques examinées, il est précisé « plus de 37 % de sel de mer » ; autrement dit, à éviter pour préserver notre santé ! Dans le bouillon de poule, on trouve 2 % de graisse de poule et 0,2 % de viande de poule ; dans celui de viande, tout au plus 3 % d’extrait de viande ; et dans celui de légumes, qui bat le record : 4,7 % de légumes !
Juste la saveur…
Envie d’un magnifique rôti de veau ? Il semble tellement bon, il ne peut pas être suspect… Et pourtant ! Ne serait-il pas le résultat d’un traitement à la transglutaminase, ce que l’on appelle couramment de la « colle à viande » ou Activa ? Cette enzyme est utilisée par l’industrie agro-alimentaire pour lier les protéines dans des aliments qui en sont riches, comme de la viande, ou du jambon, histoire de lier quelques déchets de bons morceaux de viande pour en faire… un rôti par exemple, ou un bon jambon ! Ne vous étonnez donc plus si, au moment de la découpe, vous ne trouviez plus le sens des fibres ! Sachez cependant que l’utilisation de cette enzyme peut aussi améliorer la texture de viandes molles ou exsudatives. Quant aux viandes pâlottes, elles peuvent aussi recevoir des nitrates et nitrites pour être recolorées, histoire de leur redonner une certaine virginité aux yeux du consommateur… Bien qu’autorisés, à quantités limitées, ces nitrites et nitrates sont cependant accusés de favoriser certains cancers, dont celui de l’estomac. Vous voulez reconnaître les produits qui en contiennent beaucoup ? Regardez si les viandes (surtout les jambons !) contiennent beaucoup d’eau…
La colle à viande est aussi utilisée dans certains laits ou yaourts, des croquettes de poisson ou encore… les fameux surimis, imitation de chair de crabe.
Céréales régime…
Vous avez décidé de perdre du poids et pour vous y aider, de manger des céréales, pour les fibres et toutes les bonnes choses qu’elles contiennent. Quel paquet choisiriez-vous : la gamme « spécial régime » ou les céréales pour enfants ? A priori, les premières seront plus adaptées avec un nom pareil et une jolie silhouette mince sur le paquet. Et bien détrompez-vous : elles seront équivalentes ! Ces deux types de céréales tournent autour des 370 kcal/100 g (363 pour la marque « régime », 382 pour celles destinées aux enfants), avec respectivement 8 et 6 g de protéines, 80 et 84 g de glucides et 1.3 et 1.5 g de lipides… La grande différence entre les deux est dans le type de glucides : dans les céréales pour enfants, on compte 43g de sucre, contre 17g dans la marque « régime ». Mais n’allez pas chercher les céréales de régime avec du chocolat blanc par exemple : elles sont plus riches en calories que les céréales pour enfants, avec 399 kcal aux 100g, contiennent plus de lipides, avec 6.2 g, dont 3.4g de graisses saturées, bien que plus faibles en sucres, mais dépassant les 23g. La version aux amandes atteint les 28g de sucre, et celle aux fruits dépasse 35 g de sucre, dont 9g de fructose…
Là où une différence importante se marque, c’est dans l’indice glycémique des différents types de céréales : les céréales de régime sont en effet plus riches en amidon et en fibres. Résultat : le taux de sucre dans le sang montera moins qu’avec une céréale plus sucrée, et l’hypoglycémie une heure après les avoir mangées sera moindre. Donc pas de fringale rapide. Néanmoins, il faut tout de même insister : ces céréales doivent s’inscrire dans un petit-déjeuner plus complet, avec du pain et une viande maigre (jambon), ou un peu de confiture, un fruit et de l’eau… Mais qui le fait ?
Une soupe vite fait ?
Pour avoir son compte de 5 fruits et légumes par semaine, il y a une aide facile : la soupe ! Oui, mais pas n’importe laquelle ! L’idéal est de la préparer soi-même : on sait ce qu’il y a dedans. Mais si vous manquez de temps (ou de courage !) pour la préparer, ne croyez surtout pas qu’un sachet de soupe à diluer dans l’eau bouillante fera l’affaire ! Prenons le site d’une grande marque de soupe déshydratée, et choisissons leur variété au cerfeuil, à tout hasard, et lisons les ingrédients, en sachant que la loi les oblige à commencer par les ingrédients présents en plus grande quantité, pour aller vers les plus « rares ». Et on lit : « Amidon de maïs modifié, graisse végétale, sel, farine de froment, pomme de terre, exhausteur de goût (E621), cerfeuil (3,2 %), poireau, oignon, épinards (1,1 %), etc. » Autrement dit, ma bonne soupe ne contient en réalité que quelque 4.3 % de légumes ! Ne soyons pas obtus et allons vers leur soupe de poireaux… 3,2 % de poireaux ! Par contre, dans tous les modèles, le sel figure en haut de l’affiche. Et c’est bien ce qu’on leur reproche : d’être pauvres en légumes et riches en sel…
Surimi
Et bien voilà encore un de ces aliments présentés pour ce qu’ils ne sont pas ! Dans le surimi que nous trouvons dans nos supermarchés, pas un gramme de crabe, malgré la belle bête que certains fabricants osent encore exhiber sur l’emballage, avec tout de même la mention subtile : « Saveur crabe » ! Qui a dit qu’il contenait du crabe ? Personne ! Comment est-il produit ? Selon Wikipédia, il s’agit de filets de poissons étêtés et vidés, mixés, lavés à l’eau douce, et dont on a éliminé les protéines solubles (enzymes), le sang, le gras, les tissus conjonctifs. On obtient ainsi une pâte blanche sans goût, riche en protéines et pauvre en lipides, à laquelle on ajoute des cryoprotectants pour améliorer la résistance des protéines au froid : polyphosphates, sucre, sorbitol. Enfin, on ajoute des additifs tels que fécule (de pomme de terre ou de blé), du blanc d’oeuf, de l’huile, du sel, du sorbitol, du sulfate de calcium à la pâte. Et pour faire illusion, quelques arômes (naturels ou artificiels de crabe, crevette, langouste, etc.) et colorants (le paprika ‘désépicé’ est utilisé pour colorer la surface du surimi en orange) font le reste, avant la mise en forme pour la commercialisation. Ils sont donc très riches en conservateurs et autres additifs. Et vu les quantités que nous pouvons consommer par ailleurs dans d’autres aliments, voilà notre facture bien alourdie, au risque de dépasser très vite la dose journalière admissible (DJA). C’est aussi pour cette raison qu’il vaut mieux éviter ces surimis pour les enfants, qui ont une DJA plus basse.
100 % pur jus… vraiment ?
Envie d’un bon jus d’orange ? On va devoir vous décourager une fois de plus… Prenons au hasard la briquette qu’emportent les enfants. La mention « Avec 100 % pur jus » nous incite à faire confiance. Et pourtant… En tout petit, sur le côté, il est inscrit « À base de jus d’orange concentré ». Mais qu’est-ce que cela signifie, enfin ? 100 % pur jus laisse penser qu’il s’agit d’oranges pressées sans traitement, mais il n’en est rien : les oranges ont été pressées dans le pays où elles ont été cultivées, le jus a été porté à ébullition pour faire évaporer l’eau. À la fin de ce processus, il ne reste qu’un huitième de la quantité de jus qui se présente sous une forme gélatineuse : le concentré. Il est alors exporté vers les usines de fabrication des jus industriels où on lui rajoute de l’eau. Mais est-ce un problème ? D’après l’enquête de Test-Achats, parue dans son édition d’avril 2010, le goût y perd : « Les arômes disparaissent aussi lors de l’évaporation de l’eau. Ils peuvent être capturés et réincorporés ultérieurement, mais la saveur originelle est définitivement perdue. Le traitement à chaud nuit également au goût. » (1) Une orange est déjà naturellement sucrée à raison de 12-15 %, donc le jus d’orange est, par définition, déjà sucré : le jus d’orange sans sucre n’existe pas. Mais les fabricants peuvent alors indiquer la mention « Sans sucres ajoutés » : dans ce cas, mieux vaut la vérifier en jetant un coup d’oeil à la liste des ingrédients et le pourcentage de sucre. Car les producteurs peuvent corriger l’acidité par l’ajout de 15g de sucre par litre de jus supplémentaires (exprimée en matière « sèche ») sans devoir le mentionner… Entre 15g et 150g, ils doivent indiquer « Sucré » ou « Avec sucres ajoutés ».
Chocolat blanc : du chocolat, vraiment ?
Composé essentiellement de beurre de cacao, de sucre, de poudre de lait, de lécithine et de vanille, n’est-il pas un peu exagéré d’appeler cela du « chocolat » blanc, lui qui ne contient même pas un gramme de cacao ? D’autant qu’il bénéficie de la bonne réputation du chocolat qui se justifie d’ailleurs surtout pour sa version noire ! Si au niveau des calories, il est à peu près équivalent, c’est dans la distribution de ces calories que l’on remarque une différence : le « chocolat » blanc contenant quelque 55 à 60 % de sucre, contre 25 à 28 % pour le chocolat noir à 70 % de cacao, qui s’avère pour sa part plus riche en lipides (40 % contre 30 % pour le « chocolat » blanc).
L’essentiel des différences se retrouve dans les minéraux et vitamines : le « chocolat » blanc ne nous donne pas ou beaucoup moins de magnésium, de potassium, de manganèse, de fer, de cuivre, de zinc ou d’iode. Son seul point positif est une richesse en calcium plus grande que le chocolat noir. Côté vitamines, il est plus riche en vitamine A beta-carotène, en vitamine E et en vitamine B2 (le double du chocolat noir), mais est moins riche en vitamine B1, B3, B6, B9 et B12…
Tous nos remerciements à Serge Pieters, diététicien-nutritionniste, président de l’Union Professionnelle des diplômés en Diététique de Langue Française (UPDLF) pour sa supervision.
Source : http://informationsnutritionnelles.fr
Par Carine Maillard
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