Télé food, l’accord parfait

© MASTERCHEF - TF1 - CHRISTOPHE CHEVALIN

Véritable lame de fond télévisuelle, la gastronomie a inondé le petit écran en 2010. Ad nauseam ? Tous les marqueurs indiquent que l’indigestion n’est pas encore à l’ordre du jour.

La liste est longue : Un dîner presque parfait, Fourchette et sac à dos, Top Chef, Masterchef (photo), Les Escapades de Petitrenaud, M.I.A.M. Mon Invitation À Manger, Côté Cuisine, Comme chez moi…

Aujourd’hui, la gastronomie n’a plus rien du parent pauvre de la télévision. Au contraire, le petit écran lui déroule le tapis rouge en raison d’audiences juteuses à coeur. Les émissions culinaires grignotent chaque saison un peu plus la grille des programmes et 2010 restera dans les mémoires comme un millésime symptomatique de l’engouement des spectateurs pour tout ce qui se mange et de l’empressement des producteurs à combler cette attente.

Même les chaînes plus circonspectes face à « l’air du temps » mettent la main à la pâte. Ainsi La Une. Depuis cet automne, ce sont les courtes séquences de Mission Cuisine qui relatent les défis gourmands de Fabian Mossay, tandis que dès janvier Comme un chef abattra la carte d’un prime-time au cours duquel s’affronteront des élèves d’écoles hôtelières arbitrés par des chefs réputés – tiens, tiens, voilà un concept qui en évoque d’autres. En France, des chaînes plus aguerries se fendent de nouveautés carrément prospectives. Avec Cuisinez le chef, une web-émission interactive, France 5 fait figure de pionnier. Le pitch ? Chaque semaine un internaute est invité à cuisiner sa recette avec un grand chef tel que Christophe Michalak.

Pas de doute, la recette food + télé fait saliver. Au contraire de la télé-réalité pure et dure, il n’y a pas ici d’intimité livrée en pâture. Les candidats passés par cette machine à fabriquer de la notoriété se répandent en éloges. Ce n’est pas Alexandre Dionisio, qui représentait la Belgique lors de la précédente édition de Top Chef, qui dira le contraire, lui dont le restaurant vient de glaner sa première étoile après seulement quelques mois d’ouverture. « Cette aventure ne m’a apporté que du positif, commente-t-il. Sans cela, je pense que je serais arrivé au même résultat mais la question est de savoir en combien de temps… »

Reste que face à une telle profusion d’émissions, on est en droit de se demander si la crise de foie ne figurera pas au menu de 2011. D’autant que les observateurs attentifs n’auront pas manqué de pointer certains signes d’essoufflement. En multipliant les thématiques à l’envi – spécial ados, spécial sosies, spécial camping… -, Un dîner presque parfait a montré ses limites. Idem pour un concept tel que Dancing Cuisine – dont le principe est de mêler préparation d’une recette et danse – qui ne convainc guère. Alors, stop ou encore ? Que l’on se situe au-delà ou en deçà de la frontière française, la réponse varie peu.

Pour Sébastien Demorand, membre du jury de Masterchef, elle ne fait pas un pli. « Encore, bien sûr ! Nous commençons seulement à rattraper -notre retard par rapport au monde anglo-saxon. Aux États-Unis, on trouve trois chaînes entièrement dédiées à la cuisine. Jusqu’ici en France, il n’y avait quasi rien. La télévision est le reflet de la société dans laquelle nous vivons. Elle est marquée par un repli sur l’intime en raison d’un contexte économique et social peu riant. La nourriture, la convivialité et le faire soi-même sont des valeurs positives que condense la cuisine. Il est normal que TF1 accompagne cela. Une émission comme Masterchef est sexy, grisante et rentable. En ce moment, je suis sur les starting-blocks d’une saison 2, j’attends la confirmation. »

Côté belge, l’avis de Stéphane Rosenblatt, directeur de la Télévision à RTL-TVi, va dans le même sens. « Le lien gastronomie et télévision a toujours existé mais récemment, il a connu un envol en raison d’une « événementialisation » rendue possible par un nouveau format hérité de la télé-réalité. Je pense que nous allons connaître encore des développements – c’est prévu sur RTL – mais qu’à terme une phase de normalisation est à prévoir. L’effet de nouveauté ne sera plus aussi puissant que ce qu’il a pu être ces deux dernières années, le concept restera présent mais dilué. »

MICHEL VERLINDEN

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