Les niveaux de cette maison ont été remaniés pour maximiser la lumière dans l’espace. © Jan Verlinde

A Gand, la transformation radicale d’une maison de ville pour y faire entrer la lumière

Comment injecter couleurs, soleil et sensation d’espace 
dans une imposante demeure coincée dans le bâti urbain ? Dans cette maison gantoise, un impressionnant vide sur trois étages apporte une solution des plus efficaces.

« C’était un immense labyrinthe », se souvient Saar Meganck – qui a géré la rénovation de cette maison avec son confrère David Dhooge – en évoquant sa première visite de la nouvelle habitation de Yole et Simon.

Le couple d’avocats a acheté à une vieille dame cette imposante maison bourgeoise située juste à côté de la gare de Gand-Saint-Pierre. Pendant des décennies, l’ancienne propriétaire n’avait utilisé que le rez-de-chaussée.

La façade arrière, dans un esprit moderniste. © Jan Verlinde

L’état des lieux

Les éléments anciens, datant des années 10, n’avaient pas été modifiés. Les vitraux au-dessus de la porte d’entrée, le sol en mosaïque du hall d’entrée, les plafonds peints de natures mortes et leurs moulures avaient ainsi échappé à la vague de rénovation des années 70 et 80.

Ajoutez à cela un emplacement de choix et un vaste jardin de ville orienté au sud, et vous comprendrez tout à fait pourquoi le duo a été séduit par l’endroit.

Au départ, ce jardin de rêve était toutefois loin d’en être un. Un enchevêtrement d’annexes et d’escaliers bloquaient non seulement la vue sur l’espace vert, mais aussi la lumière du soleil vers l’habitation.

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Pour relier le nouveau volume à l’ancienne partie, les architectes ont choisi diverses nuances de violet. Les lampes faites main par Jos Devriendt ont été placées en évidence. © Jan Verlinde

« Il faisait sombre et, avec l’amoncellement de couloirs et de pièces à l’intérieur, c’était très inconfortable, poursuit Saar Meganck. Epurer les lieux était pour nous le premier défi à relever. »

L’espace de vie étant trop grand pour cette famille de quatre personnes, les architectes ont proposé de réduire la surface habitable et de permettre ainsi au jardin de gagner plusieurs mètres carrés.

Un vide sur trois niveaux

« Une fois ce premier assainissement réalisé, on s’est vraiment rendu compte de la largeur exceptionnelle du terrain, complète David Dhooge. Nous avons voulu l’accentuer en travaillant en hauteur, avec une nouvelle façade arrière qui s’enfonce dans le sous-sol et un puits de lumière. »

Alors que nous pénétrons dans le confortable salon qui suit la salle de jeux des enfants du côté de la rue, nous percevons déjà cette verticalité voulue par les concepteurs. Les carreaux bleu brillant utilisés reflètent les rayons à travers les immenses portes de communication en verre.

Une fois celles-ci franchies, on pénètre dans un espace impressionnant qui s’étend sur trois étages. Le contraste avec les tons pastel et les plafonds classiques des pièces de devant et du milieu ne pourrait être plus grand.

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Le vide sur trois niveaux apporte la lumière et la sensation d’espace. © Jan Verlinde

La création d’un lieu de rencontre

Le balcon et les nombreuses fenêtres qui s’ouvrent sur la cuisine donnent un côté très théâtral à l’ensemble. « Les demeures du passé étaient généralement très exiguës. Il était d’usage de pouvoir se retirer dans un endroit à soi, à l’écart des autres, explique Saar Meganck.

Nous voulions préserver cette intimité, mais aussi la compléter par un espace vers lequel tous les autres conduiraient. Une sorte d’axe entre l’intérieur et l’extérieur, mais aussi un cœur où la famille peut être connectée à tout et à tous à différents moments de la journée. »

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Les rayons du soleil se reflètent dans les carreaux brillants du nouveau volume. © Jan Verlinde

Yole raconte comment le soir, à la lueur du soleil couchant, un parent lit un livre aux enfants sur le balcon intérieur, tandis que l’autre se tient aux fourneaux, ou comment frère et sœur s’y retranchent pour jouer à cache-cache. « Cela ne change rien au fait qu’il y a encore beaucoup de cris dans la maison. Mais au moins, nous nous entendons tout de suite », dit-elle en riant.

La rencontre des styles

Côté jardin, la façade rappelle un peu le style Bauhaus, avec ses bandeaux de fenêtres, ses auvents assortis et son oculus au sommet. Ce style est diamétralement opposé à celui de la façade à rue, en briques rouges, avec sa baie vitrée et son balcon typiques.

« Lorsque nous intervenons, nous choisissons d’utiliser un langage formel différent de celui qui existe déjà. Nous ne sommes pas dans le pastiche, insiste Saar Meganck. Ce qui ne veut pas dire qu’il doit y avoir un contraste criard avec l’ancien. Ici, on trouve aussi des éléments classiques. La fenêtre ronde en fait partie, de même que les auvents qui tempèrent les ardeurs du soleil méridional, mais aussi l’agencement de la cuisine. »

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Pas question de faire du pastiche : ici les styles se répondent, dans un dialogue serein. © Jan Verlinde

Les grandes surfaces violettes tout autour sont une traduction contemporaine des lambris de la maison d’origine. Elles donnent une échelle humaine au vide dans lequel on se perdrait autrement.

« Les carreaux bleus ont été choisis rapidement, dès la phase de construction, continue l’architecte. Pour la salle de jeux et le salon, nous avons choisi des tons pastel chauds qui apparaissent dans les anciennes peintures du plafond. La transition entre l’ancien et le nouveau, les couleurs chaudes et froides, ne devait pas être trop abrupte. Nous avons donc rapidement opté pour des tons violets. »

La maîtrise des couleurs

Chaque pièce a fait l’objet de la même approche. Dans la chambre des jeunes parents, le vert de la cime des arbres qu’elle surplombe est repris. La couleur du balcon est dérivée de la cuisine violette et de la salle de bains rose, tandis que la pergola en acier présente une autre nuance de rose que la façade arrière.

« Il est plus facile de tout mettre en blanc. Mais on perd alors les jeux d’ombres et de nuances. Tout devient alors plat comme une cuillerée de mayonnaise. »

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Les rideaux et la finition en Mortex créent une atmosphère chaleureuse dans la salle de bains, qui se trouve juste en dessous du grenier. Un dressing est caché derrière la baignoire et les lavabos. © Jan Verlinde

Saar Meganck prépare actuellement un doctorat sur la composition de couleurs et textures dans l’architecture, à l’Académie d’architecture de Maastricht et à la KU Leuven. Elle se base pour cela sur des archives de Wim van Hooff, le consultant en couleurs de l’école Bossche.

« Bien que l’utilisation distincte de la couleur dans cette maison soit principalement la patte de Yole », avoue-t-elle. « Avec la tenue sombre que je porte en ce moment, on ne s’attend pas immédiatement à cela, rétorque Yole. Cependant, durant longtemps, mon groupe d’amis m’a surnommée « l’arc-en-ciel ». Ce ne sont plus les vêtements qui font la femme, mais sa maison. »

Bio Express : Saar Meganck (44 ans) et David Dhooge (46 ans)

Ils sont ingénieurs-architectes. Saar Meganck a créé son cabinet presque immédiatement, David Dhooge a d’abord travaillé pour Stéphane Beel avant de rejoindre son épouse en 2015 pour former Dhooge & Meganck Architecture.

Ils travaillent sur des projets résidentiels mais aussi, et surtout, sur des dossiers plus sociaux. Ils ont récemment remporté un prix d’architecture BIS 2023 pour le projet De Porre, une reconversion d’un ancien site textile en un quartier durable.

Saar Meganck et David Dhooge © Jan Verlinde

Ils travaillent actuellement sur le plan directeur de Meulestede à Gand et sur la construction de 300 logements sociaux. La restauration et la reconstruction du Château des Comtes est également dans leurs cartons.

En outre, le duo poursuit une carrière académique : Saar à l’Académie d’architecture de Maastricht.et David à l’Université de Gand.

dhoogemeganck.be

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