Vivre dans un gratte-ciel signé Mies Van der Rohe, à Chicago
C’est sur les bords du lac Michigan que le célèbre architecte Ludwig Mies van der Rohe érigea deux tours de logements au milieu du xxe siècle. Immersion dans l’une de ces habitations, aménagée dans la continuité du maître, avec un panorama époustouflant sur la ville et ses environs.
Voilà un lieu qui ne manque pas d’atouts. » Cet appartement offre les vues les plus extraordinaires qu’on puisse imaginer à Chicago. Vers l’est, le nord, l’ouest, se dégagent des perspectives grandioses. C’est féerique « , s’extasie Eric Ceputis, qui en a assuré l’aménagement. Ce logement bénéficie dès lors d’une lumière incroyable, mais est également situé dans un superbe immeuble-tour construit, fin des années 40, par le fameux architecte moderniste Ludwig Mies van der Rohe. Un édifice qui illustre en tous points les principes du Bauhaus, qui ont marqué les édifices de la première moitié du xxe siècle : l’utilisation de voiles de verre en façade et d’une grande structure en acier, mais également le fait que la forme suive la fonction. Pas de geste plastique gratuit ici, donc. Ces caractéristiques se retrouvent dans chaque intérieur : toutes les pièces sont fermées par des baies vitrées, du sol au plafond, ce qui permet aux rayons de soleil de pénétrer en masse dans les volumes et leur donne une allure des plus modernes.
Le retour à l’origine
Quand le génial concepteur a imaginé ce bâtiment d’habitations – ou plutôt ces bâtiments, pour être exact, car il en a dessiné deux, strictement identiques, à quelques mètres d’intervalle -, il avait prévu huit entités par niveau. L’appartement rénové par Eric Ceputis est né de la réunion, par un précédent propriétaire, de quatre de ces unités et s’étend sur quelque 320 m2. Pour lifter cet espace, et lui rendre sa pureté originelle, deux hommes ont associé leurs talents, Tony Hurtig, architecte, et Eric Ceputis donc, décorateur et fin connaisseur du design du xxe siècle, dont la nouvelle maîtresse des lieux est une fervente collectionneuse. Leur première tâche a été de débarrasser l’espace d’un certain nombre d’éléments superflus qui y avaient été apportés. Ils ont par ailleurs pris soin de décaper les huisseries extérieures, en aluminium, que de précédents occupants avaient masquées sous d’épaisses couches de peinture. L’idée : revenir à la formule » less is more » du poète Robert Browning, que Ludwig Mies van der Rohe avait reprise à son compte. Elle définit la philosophie du minimalisme et invite à l’art du dépouillement. Le duo créatif a ensuite mis au point un nouveau plan, agréable et pratique, intégrant tous les standards actuels du luxe, notamment en transformant cuisine et salle de bains. Enfin, électricité, climatisation et chauffage ont été adaptés aux normes contemporaines.
Le parfait écrin
Pour le choix des couleurs, la lumière a guidé les deux professionnels qui ont privilégié les teintes très claires – le blanc et le gris pâle – afin de réverbérer le soleil. En contraste, les sols sont, eux, traités dans une palette plus sombre.
Côté ameublement, la propriétaire a installé une partie de ses collections de mobilier du xxe siècle. Nul ne saura jamais exactement si les meubles ont été choisis pour occuper les volumes, ou bien si, à l’inverse, l’appartement a été élu pour accueillir les pièces patiemment rassemblées… L’ensemble est en tous cas infiniment élégant.
Toisant la ville de Chicago et le lac Michigan, cet habitat en hauteur s’exprime donc en parfaite osmose avec les volontés constructives de Mies van der Rohe. S’il revenait au monde et pouvait le visiter, nul doute qu’il trouverait l’endroit fidèle à son oeuvre et qu’il serait conquis.
» De peau et d’os «
Si l’une des oeuvres les plus connues de l’architecte allemand Ludwig Mies van der Rohe (1886-1969), naturalisé américain en 1944, est le Pavillon de Barcelone, les tours d’appartements qu’il a érigées au 860 et 880 Lake Shore Drive, à Chicago, font figure de manifeste. Ces deux immeubles de 26 étages et de 82 mètres de hauteur, construits de 1949 à 1951, sont en effet caractéristiques du Style international. On y retrouve la rigueur, l’orthogonalité et l’absence d’ornementation de ce mouvement architectural, ainsi que le principe du mur-rideau, fait d’une ossature en acier et de gigantesques pans de verre. Une conception minimaliste de l’art de bâtir faisant dire au créateur lui-même qu’il imaginait des volumes composés » de peau et d’os « . En 2007, les deux géantes furent restaurées avec l’idée de gommer les modifications apportées aux édifices pour se rapprocher le plus possible du projet originel. F.BY.
Voir aussi notre diaporama : Minimalisme au sommet, un appartement iconique (en images)
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