Bris Rocher, des cosmétiques toujours plus verts

© YVES ROCHER
Isabelle Willot

Il y a soixante ans, son grand-père, Yves, inventait la cosmétique végétale, un concept furieusement tendance aujourd’hui. Son credo est resté le même: proposer des produits toujours plus verts accessibles au plus grand nombre.

Elle n’a l’air de rien, cette petite bouteille, mais pourtant, dans son genre, c’est une révolution. La concurrence l’a bien compris, elle qui s’apprête à copier le concept en proposant à son tour des formules lavantes concentrées dans des microformats. Le plus drôle, c’est qu’il se réjouit de cette contagion vertueuse qui a permis à l’entreprise de réduire de 35% ses émissions de gaz à effet de serre en deux ans. « Plus nous serons nombreux à aller dans la bonne direction, mieux la Terre se portera », note Bris Rocher, troisième du nom, à la tête du paquebot breton depuis 2010. En soixante ans, la marque devenue groupe n’a jamais dérogé à ses principes fondateurs. Contrôler son sourçage, favoriser l’emploi local, tout cela faisait déjà partie du « business plan » d’Yves Rocher. L’homme préférait parler de « promesse », celle de ramener la prospérité à La Gacilly, ce village dont il fut longtemps le maire et qui comme beaucoup de territoires français faisait face à l’exode de sa population. « Les décisions prises à l’époque se révèlent furieusement tendance aujourd’hui », se réjouit le quadra discret, fier de piloter cette entreprise familiale qu’il n’a pourtant pas toujours rêvé d’intégrer.

Il n’a que 16 ans lorsque son père, Didier, décède accidentellement. Son truc à lui, c’était plutôt la musique. Sa guitare désormais n’est plus que rarement de sortie. Mais il n’a pas de regret. S’il « y est allé » comme il dit, même sans avoir le bac en poche, « c’est parce qu’il y avait cette filiation », une histoire qui, l’espère-t-il, se perpétuera avec la nouvelle génération. Lui qui se définit comme un « environnementaliste humaniste » plutôt que militant croit dans une croissance raisonnée qui « concilie la survie de l’espèce en minimisant l’impact sur la planète ». Pour cet autodidacte qui assure gérer sa boîte « en bon père de famille tout en poussant au dépassement de soi », ce ne sont pas les obstacles qui comptent « mais la manière dont on les contourne. Il y a toujours des solutions, voire plusieurs. L’important, c’est de décider, de rester en mouvement ».

Concrètement, pour chaque nouveau lancement, pour chaque reformulation, c’est toute la chaîne de production qui est passée au tamis de l’écoconception. « Notre force, c’est d’avoir limité au maximum les intermédiaires et d’avoir intégré tous les métiers du végétal dès le départ, précise encore Bris Rocher. Nos champs, nos usines qui assurent 89% de notre production se trouvent tous en Bretagne, dans un rayon de 30 kilomètres. Nous sommes dans l’agriculture bio depuis 1997 et nous nous lançons dans la permaculture. »

Notre force, c’est d’avoir intu0026#xE9;gru0026#xE9; tous les mu0026#xE9;tiers du vu0026#xE9;gu0026#xE9;tal.

Face à la prolifération des nouveaux acteurs de la cosmétique surfant eux aussi sur la vague « verte », le patron se dit confiant. « Sur les 10.000 marques de soin présentes dans le monde, la plupart sont confidentielles et se contentent d’acheter sur étagère auprès des fournisseurs d’actifs auxquels elles soumettent un simple briefing. Nous nous voulons généralistes, pour rendre la beauté accessible au plus grand nombre possible de femmes. C’est aussi une forme de militantisme: que je sache, on n’a pas assisté ces dernières années à une hausse drastique du pouvoir d’achat en Europe. Notre challenge, c’est de toujours relever notre niveau d’exigence en matière d’écologie sans augmenter les prix. » Tout en remerciant la nature pour le bien qu’elle nous fait. En 2020, les collaborateurs et clients du géant vert auront planté 100 millions d’arbres dans le monde. Une tradition de famille chez les Rocher, à chaque naissance…

Bio express

1978. Voit le jour à L’Isle-Adam, en région parisienne. Comme pour toutes les naissances de la famille, un chêne est planté à cette occasion à La Gacilly.

2006. Après avoir travaillé deux ans chez Arthur Andersen, il devient le PDG du groupe Rocher, qui compte aussi dans son portefeuille Petit Bateau et Daniel Jouvance, notamment.

2012. Rachat de toutes les actions détenues par Sanofi afin de redevenir un groupe 100% familial, non coté en Bourse.

2019. Yves Rocher fête ses 60 ans. Le groupe emploie plus de 16.000 salariés dont 10.000 emplois directs et indirects en Bretagne.

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