Les accros du vernis

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En un rien de temps, les ongles fantaisie ont conquis les beauty addicts, et pas uniquement les ados. Le marché s’affole.

Du vernis au musée. D’ici à la fin de la rétrospective Georges Braque, qui se tient au Grand Palais, à Paris, jusqu’en janvier prochain, les visiteurs découvriront un drôle de kit arty dans la librairie de l’expo. Un nécessaire à ongles signé Bourjois, composé de 200 autocollants et pochoirs dont des stickers oiseaux, clin d’oeil à la fameuse huile sur toile, réalisée par le peintre en 1960, L’Oiseau noir et l’oiseau blanc. Si l’idée en fait déjà sourire plus d’une, elle a déclenché l’hystérie des beauty addicts.

Car, depuis plusieurs mois, la vague de vernis et d’accessoires de manucure tous plus inattendus les uns que les autres n’en finit pas de séduire les consommatrices. « L’expression nail art est devenue la première requête maquillage sur Google, remarque Caroline Lamprecht, directrice du marketing chez Gemey Maybelline et Essie France. Les filles, avides de conseils, viennent surtout y chercher des tutoriels postés sur les blogs beauté. »

Surfant sur le phénomène, des marques ont saisi l’opportunité d’augmenter leur visibilité en demandant aux blogueuses de leur concocter vidéos et conseils trendy. Ainsi, Gemey Maybelline, Bourjois, L’Oréal Paris ou Essie proposent leur plate-forme manucure, avec décryptage de tendances, astuces de pros, battles de nail art entre consommatrices ou focus sur les plus beaux ongles repérés lors des défilés new-yorkais.

Cette tendance du vernis nous vient des Etats-Unis, où les femmes possèdent une véritable culture du nail bar et de la manucure. Mais, chez nous, elle est bien plus qu’un buzz marketing, et le marché des vernis continue d’enfler », poursuit Caroline Lamprecht.

Après la déferlante des couleurs lancées notamment par Essie (marque américaine dans le giron de L’Oréal) avec ses 90 teintes, les vernis à effet se mettent à inonder le marché. Il suffit de se rendre dans une enseigne Sephora, à Paris, pour voir l’étendue des possibles.

Les marques britanniques qui y sont distribuées en exclusivité, telles que Nails Inc, Ciaté ou Front Cover, proposent des finis métallisés, pailletés, matifiés et même tatoués. Elles ont aussi mis au goût du jour les effets 3D, avec applications de sequins, de plumes ou de minibilles au look « caviar ».

« Cette offre pléthorique a surtout permis de transformer le vernis en accessoire de mode, analyse Elizabeth Anglès d’Auriac, directrice du marketing Europe chez Sephora. La manucure s’apparente davantage à une composante du lifestyle et s’envisage plutôt comme un élément qui permet de personnaliser sa silhouette, à l’instar d’un bijou ou d’une paire de chaussures. »

Un accessoire qui devient surtout de plus en plus facile à utiliser grâce aux stickers, qui, en épousant la forme de l’ongle, se collent et se décollent en un geste. Mais aussi avec les bains express : des mousses imbibées de dissolvant dans lesquelles il suffit de glisser ses doigts un à un pour retirer le vernis. Des innovations qui ont rendu l’étape manucure moins fastidieuse, apprivoisant d’un coup un public toujours plus large. Loin d’être réservés aux seules lolitas, ces produits séduisent aussi les trentenaires et même les quadras branchées.

Plutôt accros, elles, aux french bicolores, au maquillage de la lunule (la demi-lune à la base de l’ongle), aux motifs géométriques. « Je ne pensais pas me prendre au jeu, avoue Julia, 33 ans. Sans céder au marketing des marques cosmétiques que je trouve souvent trop girly et même cheap, je préfère m’acheter des oeillets de classeur, que je découpe pour créer des formes colorées sur l’ongle. »

Un nail art créatif, donc, soutenu par des marques de mode branchées, comme Kenzo, qui, au printemps dernier, offrait avec Essie une manucure gratuite reprenant les couleurs fauves de la collection printemps-été. Ou encore les workshops du très pointu collectif Andrea Crews, proposés dans sa boutique du Marais, à Paris. Même Dior s’y met, avec le lancement pour Noël de Diorific Duo. Une manucure « bijou » qui associe base dorée et billes cristallines à déposer avec un petit entonnoir, forcément doré. Ou l’art d’accompagner en douceur un phénomène aux accents régressifs et, sûrement, moins anecdotique qu’il n’y paraît.

Aurélie Blanchet

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