Le label « Fait maison » pour les restaurants crée la polémique en France

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En France, où la gastronomie figure au patrimoine culturel immatériel dressé par l’Unesco, la réputation de la bonne chère appréciée dans le monde entier a motivé un nouveau décret pour séparer le bon grain de l’ivraie: le « fait maison » versus les plats industriels.Mais ça n’est pas si simple…

Dans un pays où l’on ne badine pas avec les plaisirs de la table et où la sortie de guides culinaires s’élève au rang d’événement médiatique, le label « fait maison » est entré en vigueur cette semaine pour valoriser le savoir-faire des restaurateurs et éclairer le client sur le contenu de son assiette.

« Le label ne répond pas à tous les problèmes mais c’est une bataille de gagnée: cela permet de distinguer les restaurateurs qui font du réchauffage de sous-vide de ceux qui cuisinent », juge auprès de l’AFP Stéphane Cordier, associé fondateur du restaurant « Medi Terra Nea » à Paris, dont la carte célèbre les produits du terroir méditerranéen.

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Côté consommateurs, certains doutent de l’efficacité du décret gouvernemental. « Je pense que les restaurateurs vont utiliser des moyens détournés pour continuer leurs pratiques. Le label fait aussi croire, à tort, que ça va révolutionner le contenu de nos assiettes », relève Nathalie Dadue, 34 ans, attablée à une brasserie parisienne.

Lors de la présentation de sa réforme, la secrétaire d’État française au Commerce et à la Consommation, Carole Delga, avait expliqué que son texte avait pour but « la reconnaissance de l’acte de cuisiner », d’un « savoir-faire par rapport à une cuisine d’assemblage, en donnant au consommateur une information simple et fiable ».

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Désormais, les plats entièrement élaborés sur place à partir de produits bruts n’ayant subi aucune modification (chauffage, marinage, assemblage) seront mis en avant, à l’inverse de plats en kits fournis par l’industrie agroalimentaire.

Pour bénéficier du label, les restaurateurs français doivent indiquer de façon visible la mention suivante: « Les plats faits maison sont élaborés sur place à partir de produits bruts ». Doit aussi figurer un logo, composé d’une casserole dûment chapeautée du toit d’une maison. Une fois ces principes posés, le décret poursuit en détail leurs implications culinaires… parfois inattendues.

Selon le décret, « peuvent entrer dans la composition d’un plat fait maison, les produits qui ont été réceptionnés par le professionnel épluchés, – à l’exception des pommes de terre -, pelés, tranchés, coupés, découpés, hachés, nettoyés, désossés, dépouillés, décortiqués, taillés, moulus ou broyés »; mais aussi… « fumés, salés, réfrigérés, congelés, surgelés », ou encore « conditionnés sous vide ».

A l’exception des frites surgelées – pour éviter une révolution en apposant le label « fait maison » aux fast-food – les autres produits surgelés pourront donc bénéficier du label.

Stéphane Cordier relativise l’autorisation de légumes prétaillés ou de viande congelée. « Certains produits doivent être surgelés car il sont très saisonniers: des produits comme la pata negra (charcuterie issue de porcs ibériques), correspondent à une période d’abattage une fois par an, après la chute des glands à la fin de l’automne, et si l’on veut en avoir au menu toute l’année, on doit la surgeler ».

Les légumes prétaillés, tels les concombres en brunoise qu’il achète, permettent aussi de gagner de temps et de baisser les charges, ajoute-t-il.

En vertu du décret, dans la composition d’un plat fait maison peuvent aussi entrer: les salaisons, saurisseries et charcuteries, à l’exception des terrines et des pâtés. Les fromages, les matières grasses alimentaires, la crème fraîche et le lait, le pain, les farines et les biscuits secs, les fruits secs et confits.

Mais aussi les abats blanchis, la levure, le sucre, la gélatine, la pâte feuilletée crue, et, « sous réserve d’en informer par écrit le consommateur, les fonds blancs, bruns et fumets », précise le texte.

Certains, comme JP Géné, chroniqueur culinaire dans le magazine M du quotidien Le Monde, ont du mal à avaler la pilule. « Fait maison, décret bidon », tance-t-il dans son dernier billet.

« En découvrant le décret, j’ai compris que la messe était dite et que les lobbys de l’agroalimentaire avaient eu gain de cause: tous les produits bruts congelés pourront figurer dans un plat fait maison » à l’exception des frites surgelées, regrette-t-il.

La mention « fait maison » fera l’objet de contrôles à compter du 1er janvier 2015. Et en cas de tromperie sur la marchandise, l’infraction sera passible d’une amende pouvant grimper jusqu’à 300.000 euros ou deux ans de prison, une note salée.

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