Un meuble design est-il un bon placement ?

Placement mobilier. © Getty Images/iStockphoto

Si la mode voit parfois le prix de ses pièces iconiques s’envoler jusqu’à atteindre des dizaines de milliers d’euros, les meubles peuvent-ils aussi rapporter gros ? On récapitule en compagnie de Valentine Roelants du Vivier, responsable du département design chez Cornette de Saint Cyr, à Bruxelles.

 » Les ventes de design ont le vent en poupe « 

-VRAI-

Quand Cornette de Saint Cyr lance ses premières ventes design en 2005, la maison fait d’abord figure d’exception.  » Bien sûr, il y avait du mobilier contemporain, se souvient Valentine Roelants du Vivier, mais c’était toujours intégré à d’autres ventes, d’objets d’art ancien ou contemporain.  » Par la suite, d’autres salles d’enchères lui emboîteront progressivement le pas.  » Il y a à peine dix ans, il y avait moins d’engouement, on aimait encore beaucoup les grandes armoires normandes. Le marchand de meubles était considéré comme un brocanteur ou un antiquaire, alors que maintenant, on parle de galeriste « , explique l’experte, rappelant que c’est grâce au succès de ces ventes que les galeries ont  » poussé comme des champignons « .

 » Le design peut être considéré comme un investissement  »

– VRAI, MAIS… –

Une table en bois de bout signée Jules Wabbes, vendue pour la somme record de 90 000 euros : en wengé, avec son piétement central à cinq branches en bronze coulé.
Une table en bois de bout signée Jules Wabbes, vendue pour la somme record de 90 000 euros : en wengé, avec son piétement central à cinq branches en bronze coulé.© SDP

De l’avis de Valentine Roelants du Vivier, il y a beaucoup de  » mais  » et de conditions pour que ce soit le cas. Et un indispensable préalable : s’entendre sur ce que l’on considère comme du design.  » Pour le marché de l’art, c’est le mobilier, les objets ou luminaires créés par des designers qui ont une cote au cours des xxe et xxie siècles. Ensuite, il faut acquérir une pièce unique ou une édition originale « , précise-t-elle. Par exemple, un fauteuil Eames, première édition de 1955 pour Herman Miller, vaudra entre 5 000 et 7 000 euros aux enchères, et se revendra au même prix dans dix ans, s’il est toujours en bon état.  » Il ne prendra pas de valeur mais c’est un bon prix. Un neuf, édition Vitra, coûte 9 000 euros, mais est tout dur, fait avec un moins joli cuir, et ne vaudra plus la moitié le lendemain de son achat, peut-être 3 000 euros.  »

 » N’importe qui peut investir avec un peu de flair ou de chance  »

– FAUX –

Au diable les faux espoirs : pour un non-professionnel, il n’y a pas d’énorme plus-value à faire dans l’investissement design –  » disons qu’on ne perd pas son argent, ce qui n’est déjà pas si mal « , relativise notre spécialiste. Alors, comment faire un bon achat ?  » Il faut visiter les galeries, parcourir les moteurs de recherche, suivre les ventes… N’importe qui ne va pas toucher le jackpot par hasard. Déjà, il faut un minimum d’argent à investir pour s’intéresser à des pièces qui ont déjà de la valeur, donc un certain budget. Mais ce n’est pas la même chose qu’en peinture, où l’on peut acheter des artistes déjà très cotés qui vont encore prendre une valeur dingue.  »

 » Il y a des effets de mode  »

-VRAI-

 » Beaucoup de gens ont acheté du design scandinave il y a six ans, et payé des prix faramineux vu la rareté des pièces, ce qui a poussé de nombreux propriétaires à vendre leurs propres objets, et donc un peu tué le marché.  » Gare aux aléas de l’équilibre entre offre et demande. Selon Valentine Roelants du Vivier, il faut vraiment un oeil  » ultra-exercé  » pour se poser en précurseur et deviner l’évolution des tendances.  » Pour l’instant, on commence à se libérer du design scandinave, et l’on se dirige vers le design américain, brésilien, les bois exotiques, etc. Mais c’est déjà trop tard pour investir et espérer une bonne plus-value « , commente-t-elle.

 » Nul n’est prophète en son pays  »

-FAUX-

Une table en bois de bout signée Jules Wabbes, vendue pour la somme record de 112 500 euros : en padouk, avec son triple piétement en bronze brut.
Une table en bois de bout signée Jules Wabbes, vendue pour la somme record de 112 500 euros : en padouk, avec son triple piétement en bronze brut.© SDP

Il y a quelques années, de grandes galeries américaines ou françaises ont misé sur le design noir-jaune-rouge, notamment Jules Wabbes, mais n’ont pas rencontré le succès espéré pour diverses raisons.  » Maintenant, on est un peu redescendu sur terre, analyse la responsable du département design, et il s’agit d’une clientèle majoritairement belge, qui connaît le personnage. On a été les premiers à faire des ventes de design et art belge, parfois exceptionnelles – avec un guéridon de 1,20 m parti à 70 000 euros, par exemple.  » Victime de son succès, la maison de vente s’est vu proposer des pièces en trop grand nombre, et a dû revoir ses estimations à la baisse.

 » Des trésors dorment encore dans les greniers  »

-VRAI-

 » C’est certain ! « , confirme Valentine Roelants du Vivier, et c’est pour ça que Cornette de Saint Cyr réalise des appels de marchandise, censés attirer le regard des gens en leur glissant :  » On a vendu ça à tel prix, vous avez peut-être des choses similaires chez vous.  »  » On a eu de très belles pièces Wabbes qui sont arrivées comme ça :  » C’est ma table de salle à manger, ma mère m’a toujours dit d’y faire attention, donc j’ai un Bulgomme et trois nappes dessus, mais je ne sais pas pourquoi. Et ça ressemble à ce que vous venez de vendre 50 000 euros.  » J’ai été dans des endroits improbables, découvrir des choses exceptionnelles. Ça fait toujours de belles histoires « , conclut-elle.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content