La crise en guest star des séries télévisées
La crise s’invite dans nos séries télévisées à succès. Le filon est si gros que les networks américains projettent de tourner des séries entièrement basées sur le thème de la récession.
La crise s’invite dans nos séries télévisées à succès. Le filon est si gros que les networks américains projettent de tourner des séries entièrement basées sur le thème de la récession.
Les mamans au foyer sont forcées de prendre des boulots à mi-temps. Les chefs d’entreprises ouvrent leurs meilleures bouteilles de vin seulement après avoir demandé une aide du gouvernement. Les panneaux « A vendre » fleurissent sur les maisons des quartiers populaires ou plus chics. Trois voisins, licenciés et forcés de mettre leur maison en vente, prennent le directeur de leur société de prêts hypothécaires en otage. Les banquiers au chômage doivent se rabattre sur des jobs moins bien payés.
Cinq situations très réalistes, conséquences de la crise financière actuelle. Et pourtant, toutes sont des scènes de scénarios récents de séries américaines à succès. La crise s’invite en Guest Star dans les séries populaires. Nos héros favoris de « Desperate housewives », « Ugly Betty », « The Simpsons », « Flashpoint », « 30 Rocks » ou encore « How I met Your Mother » vivent eux aussi le phénomène avec âpreté.
Evasion et réflexion
Les divertissements populaires prennent souvent la forme de bons moments d’évasion en période économique difficile. Et pourtant un nombre croissant de programmes mettent en scène la dure réalité. Selon les producteurs, il s’agit d’une bonne manière pour introduire la réflexion sur l’ampleur des problèmes financiers actuels.
« Si tout le monde y pense en Amérique, cela signifie que tous les scénaristes d’Hollywood y pensent aussi » explique dans The New York Times, Marc Cherry, le créateur et producteur exécutif de la série « Desperate Housewives ». « Je sais que les gens suivent DH pour un peu d’évasion et un peu d’humour. Mais ici vous avez des gens plutôt aisés, vivants dans un quartier assez huppé, et cette fois, la crise touche tout le monde ».
Ainsi, dans la 5ème saison mettant en scène la vie des habitants de Wisteria Lane, Susan Mayer est forcée de prendre un job à mi-temps pour aider son ex-mari, un plombier qui bosse près de 16 heures par jours pour pouvoir payer l’école privée de son fils. Autre moment dur pour le couple Scavo : leur pizzeria est désertée par les clients. La famille devra finalement la vendre à contrecoeur.
La réalité pour inspiration constante
Du côté des shows policiers et médicaux, le sujet est moins abordé, meurtres en séries ou maladies rares et exotiques restant généralement très éloignés de la vie quotidienne de la majorité des téléspectateurs.
Pour les autres séries plus terre-à-terre, la crise est un sujet vivace qui inspire de plus en plus les scénaristes. « Nous n’avons jamais vraiment été un show axé sur les questions sociales » dit Mark Ellis au New York Times, créateur et producteur de « Flashpoint » qui suit les périples d’un service de police urbaine de l’élite « Strategic Response Unit », un style de SWAT plus psychologique. « Mais nous avons tous dans nos plus proches connaissances quelqu’un qui a subi la perte d’une maison ou d’un boulot ou la fonte d’un compte épargne, et nous avons pu voir a quel point cela était destructeur. Ce sont des moments tragiques, et nous avons voulu en explorer les répercussions ».
« Nous cherchons à voir ce que les gens sont prêts à raconter afin de s’assurer leur propre sécurité financière »
Dans l’épisode intitulé « Business as usual », une société de prêts hypothécaires qui a reçu une prime de 22 millions de dollars pour la mise en demeure de centaines de foyers, est prise en otage par trois anciens clients.
Dans deux épisodes de « Lie to Me », on parle même longuement de Bernard Madoff, grand homme d’affaires américain qui a fait perdre des millions de dollars à des centaines de personnes, dont de nombreuses célébrités. Samuel Baum, le créateur et producteur exécutif de la série explique au New York Times : « Ce qui se passe dans le monde économique est très révélateur de la substance de notre série. Nous cherchons à voir ce que les gens sont prêts à raconter, et à quel prix ils sont prêts à faire payer leurs collègues, afin de s’assurer leur propre sécurité financière ».
Besoin de reconnaissance
Gary Newman (président de la 20th Century fox Television, studio producteur de plusieurs séries à succès) déclare au New York Times également: « La télévision sert de terrain pour l’exploration et l’exploitation de sujet aux véritables émotions. Lorsque nos personnages sont en conflit avec des problèmes que nous pouvons transposer à nos propres vies, ça devient plus significatif. ».
Car si le téléspectateur a besoin de se divertir devant son petit écran, il a également besoin de pouvoir s’y retrouver. Compatir avec son personnage favori, trouver la force de continuer puisque « c’est même arrivé à X dans telle ou telle série ».
Un filon de taille
Les représentations de la crise financière s’infiltrent autant dans le drame que les comédies. C’est ainsi que le célèbre Homer Simpson doit affronter le fameux panneau « Forclosure » planté dans le gazon devant son domicile et que Ted Mosby (How I met Your Mother) se voit railler par son ami Barney lorsqu’il annonce vouloir lancer sa propre boîte … « Avec cette économie ?! Bonne chance mec ! ».
Le filon est si gros que les networks américains en sont même à considérer le lancement de séries entièrement basées sur la récession. Ainsi, la Fox développe actuellement une comédie intitulée « Two dollar beer » qui présenterait un groupe d’amis vivant à Detroit essayant de prévoir la détérioration de la situation financière de leur ville. Chez ABC Studio, on mise sur le petit nouveau à venir « Canned », une comédie autour d’un groupe d’amis tous renvoyés de leur boulot le même jour. La crise est en définitive, un bon fond de commerce.
Nathalie Vandevelde
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