Un atelier de rêve pour une rencontre plutôt carrée entre Jean-Paul Knott et Carole Lambert. Récit d’un dépaysement créatif dans la ville lumière. Quand les formes s’en mêlent et proposent un duo géométrique…

Paris. Dans son magnifique loft design noir et blanc, à l’image de ses créations, Jean-Paul Knott accueille Carole Lambert. L’espace est divisé en une petite boutique, un mini-salon où MTV déverse sa musique en boucle, une large table propice aux réunions spontanées, et la pièce maîtresse : l’atelier. Autour d’un café pour se mettre d’aplomb, les deux challengers font connaissance. Carole explique son nouveau métier au sein de la marque de sous-vêtements Marie Jo qui lui laisse une liberté créative qu’elle apprécie. Jean-Paul parle de tissus, de son amour pour Bruxelles et de ses débuts cocasses. Puis viennent les choses sérieuses. Tous deux se trouvent un point commun : les formes géométriques, un peu genre à la Courrèges, et pas de pinces. Pourquoi, dès lors, ne pas travailler ensemble sur une même silhouette ? L’un réalisant le haut, l’autre le bas. C’était sans compter sur les rythmes respectifs des deux créateurs. L’aîné, Jean-Paul, est habile et passe vite à la vitesse supérieure, tandis que la cadette, Carole, réfléchit longuement au comment du comment apprivoiser le tissu. C’est ainsi que chacun se retourne naturellement, sur fond sonore de radio latino, la musique préférée du maître des lieux, vers son propre buste Stockman.

Au fil de l’exercice, Jean-Paul Knott, qui renvoie souvent une image de grand séducteur dandy, se révèle plutôt timide, contrairement à Carole qui est très à l’aise pour commenter son travail.  » Je n’ai pas véritablement d’idée en tête, confie-t-elle. J’avance petit à petit en me laissant guider, mais je trouve ce premier jet trop lourd, trop massif.  » Il est vrai que ni Jean-Paul, ni elle, n’ont l’habitude de manipuler une toile aussi dense, lui préférant une matière plus fluide. Mais chacun s’accorde à dire que travailler ce genre de tissu est une expérience enrichissante. Et, Jean-Paul sait-il où il va ?  » Non, pas du tout, répond-il. Je me laisse entraîner par le tissu, je n’ai pas d’image dans ma tête.  » Carole s’attelle alors à épurer sa silhouette.  » C’est assez risqué comme exercice, embraie-t-elle. Généralement, je travaille sur plusieurs silhouettes à la fois, jamais exclusivement sur une seule.  » Pendant ce temps, Jean-Paul, silencieux, a déjà terminé une veste et se prépare à entamer une robe. Carole, ne se laissant pas impressionner par la dextérité de son aîné, déchire une multitude de carrés de tissu de la taille d’un mouchoir, à même la matière et non sur le buste.  » Le plus simple est de partir d’une forme géométrique et de la répéter indéfiniment « , dit-elle. Ainsi naît un assemblage ingénieux de carrés. Jean-Paul, lui aussi fan de coupes géométriques, achève sa robe, réalisée elle aussi à partir d’un carré. Ensuite, il demande s’il peut utiliser un £illet et un lien en cuir afin de parfaire sa création. Comment le lui refuser ? Quelques pas de salsa plus tard et Jean-Paul tire sa révérence en s’excusant de nous défaire de sa présence. Il doit passer quelques coups de téléphone afin de peaufiner son nouveau concept  » baise-en-ville(s) « . Il nous avait promis de nous consacrer une demi-heure or il a déjà passé une heure et demie sur sa silhouette. Se serait-il pris au jeu ? Carole, elle, continue, imperturbable, à arracher et à épingler des carrés dans tous les sens. Ensuite, elle recherche le moyen de fermer l’arrière de sa robe. Perfectionniste, elle pourrait tergiverser encore trois heures, mais la fringale prend le dessus.  » Ce sera une épingle et puis c’est tout « , lâche-t-elle. C’est alors que Jean-Paul fait une entrée magistrale dans la pièce en s’exclamant :  » C’est très beau ce que tu as fait, c’est magnifique.  » Carole peut donc déposer ses aiguilles tranquille.

La sublime robe au décolleté vertigineux de Carole Lambert et celle sexy en diable de Jean-Paul Knott avec sa petite veste assortie emplissent l’espace de leur créativité prise sur le vif. C’est l’heure du traditionnel  » portrait « . Jean-Paul confie alors que son attachée de presse lui a conseillé de toujours se vêtir de la même manière (large pull noir et jeans tout aussi amples avec une découpe de chaque côté) afin qu’on le reconnaisse facilement sur les photos. Les clichés punaisés au mur le confirment d’ailleurs. Gentleman, il demande à Carole si elle préfère qu’il s’asseye pour faire oublier sa grande taille. En guise de mot de la fin, chacun donne un nom à sa création. L’une (Carole Lambert) l’appellera :  » Dors dessus  » ; l’autre  » La femme attachée par la peau de Jean-Paul Knott « .

 » C’est assez risqué comme exercice… Généralement, je travaille sur plusieurs silhouettes à la fois, jamais exclusivement sur une seule.  » (Carole Lambert)

Carole Lambert

Née à Namur en 1979.

l 1998 : entre à La Cambre, Ecole nationale supérieure des Arts visuels, à Bruxelles.

l 1999 : stage chez Elvis Pompilio.

l 2000 : stage chez Isabelle Baines.

l 2001 : stage chez Martin Margiela.

l 2002 : stage chez Lutz.

l 2003 : diplômée avec la grande distinction de La Cambre, Ecole nationale supérieure des Arts visuels, à Bruxelles.

Défile pour le premier

Festival Mode de Weekend Le Vif/L’Express.

Aide à la préparation du défilé de Lutz.

l 2003 à nos jours : styliste pour Marie Jo, 4 collections de lingerie.

l 2004 : défilé-inauguration  » Blanco  » à l’occasion de la réouverture du Beursschouwburg, à Bruxelles.

 » Je me laisse entraîner par le tissu, je n’ai pas d’image dans ma tête.  » (Jean-Paul Knott)

Jean-Paul Knott

Né à Verviers en 1966.

l 1988 : diplômé du FIT New York (Fashion Institude of Techonology), styliste chez Yves Saint Laurent.

l 1999 : création du label de prêt-à-porter de luxe JEANPAULKNOTT.

l 2000 : présentation des deux premières collections JEANPAULKNOTT.

l 2001 : premier défilé au carrousel du Louvre.

Directeur artistique de Krizia.

Fondation de la Société française JEANPAULKNOTT Paris.

l 2002 : directeur de Création de la ligne prêt-à-porter de luxe Louis Féraud.

l 2003 : présentation de sa seconde collection prêt-à-porter de Luxe Louis Féraud.

l 2004 : présentation de la collection  » baise-en-ville(s) « .

Aude Gribomont – Photos : Bertrand Sottiaux n

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