Nouveau directeur artistique de Ballet Vlaanderen.

Quand on danse, on a forcément un autre rapport au vêtement et au mouvement que dans la vie de tous les jours. Le corps doit-il apprivoiser le costume ?

On le ressent très souvent comme une seconde peau, comme une prolongation de ses membres. Certaines chemises ou vestes peuvent même vous donner l’impression d’avoir des ailes. A l’inverse, des costumes entrent parfois en résistance avec le corps, créent de nouveaux codes dans la manière de bouger. Si l’on porte une jupe – que l’on soit un homme ou une femme, d’ailleurs -, selon qu’elle soit lourde ou légère, cela entraîne un tout autre rapport à la vitesse, au mouvement circulaire. Danser en habits de ville, ce n’est forcément pas non plus la même chose qu’en training, un veston-cravate va aussi vous influencer d’un point de vue théâtral.

Vous avez travaillé au cours de votre carrière avec des créateurs aussi différents que Dries Van Noten, Karl Lagerfeld, Riccardo Tisci, Hedi Slimane ou Tim Van Steenbergen. En quoi leur regard est-il différent de celui d’un costumier professionnel ?

Ils ont chacun leur propre génie, leurs propres obsessions aussi ! Leur seul point commun est sans doute d’être des personnes très occupées. C’est donc toujours un bonheur de travailler avec des gens aussi investis. Dries a plutôt tendance à proposer des vêtements que l’on pourrait porter dans la vraie vie, comme Hedi Slimane. Tim est beaucoup plus théâtral, avec lui, il y a toujours tout un tas de références, de petits détails incroyables. Ses propositions esthétiques pour les grandes productions sont souvent le point de départ du projet, avant même que l’on n’entre en studio. Le concept part du costume. Mais le talent est partout. Un créateur qui se concentre pendant toute sa carrière sur les arts du spectacle maîtrisera mieux les contraintes pratiques propres à notre métier : un danseur est toujours en train de lever les bras, il a besoin de souplesse dans ses pantalons.

En matière de costumes, tout est donc permis ?

Il y a en tout cas de plus en plus d’audace dans la manière dont on joue avec les codes, même pour les ballets plus classiques. Tout dépend des envies du créateur, du chorégraphe, du directeur artistique. Le public n’est pas du tout fermé aux approches nouvelles : il aime être rassuré dans ses repères mais il aime tout autant être surpris. Lorsque je travaille sur des productions plus contemporaines, avec des danseurs urbains, le costume vient souvent plus tard, une fois que le personnage est bien établi, que l’on sait qui il est, ce qu’il veut dire, comment il va bouger sur scène. Ce qui peut engendrer des besoins très pragmatiques, comme des genouillères par exemple, en fonction du mouvement choisi. Chaque élément du costume entre en conversation avec le danseur, même les chaussures qu’il porte ou non. Le rapport au sol en sera modifié. Et l’articulation du pied.

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