En exclusivité pour Weekend, Marie Arena, Laurence Bibot, Christophe Coppens et Jacques Mercier ont suivi la première leçon de cuisine de l’Atelier Yves Mattagne. Gros plan sur une classe gourmande qui a mis la main à la pâte avec le sourire.

Les avis sont unanimes sur l’exceptionnelle finesse de la cuisine de la mer que propose Yves Mattagne dans le cadre prestigieux du Seagrill, le restaurant gastronomique de l’hôtel Radisson SAS, à Bruxelles. Bien des spécialistes et amateurs avertis verraient d’ailleurs d’un bon oeil que Michelin se décide à accrocher une troisième étoile aux deux qui ornent déjà l’établissement.

Esprit avant-gardiste fasciné par la technologie, Yves Mattagne est aussi un pédagogue reconnu qui a formé déjà de nombreux chefs, en Belgique comme à l’étranger. Sa dernière conquête? La création d’un restaurant affichant ses recettes à Chicago. Depuis plusieurs années déjà, il caressait un rêve : monter sa propre école de cuisine, un univers entièrement dédié à l’art de la table avec des professeurs formés par le célèbre chef et qui, à leur tour, communiqueraient un savoir-faire précieux exaltant le produit et sa mise en oeuvre.

Aujourd’hui, c’est presque chose faite. L’Atelier Yves Mattagne ouvrira, en effet, officiellement ses portes à la fin du mois de janvier 2002, pour accueillir aussi bien des professionnels que des amateurs. Même les enfants y trouveront leur place puisque des séances spéciales leur seront proposées le mercredi après-midi. Comme de vrais  » pros « , ils pourront réellement pratiquer sur des pupitres de travail et de cuisson individuels.

En exclusivité pour Weekend Le Vif/L’Express, quatre élèves ont testé le maître et sa méthode. Passant de la cuisine à la table, harnachés d’un tablier rouge, le ministre Marie Arena, la comédienne Laurence Bibot, le créateur de mode Christophe Coppens et l’auteur-animateur Jacques Mercier ont vécu ce privilège de goûter un menu en quatre services, tout en mettant la main à la pâte. Au programme : tartare de Saint-Jacques, crème aigrelette au caviar; Saint-Jacques poêlées, foie gras et chicons confits; bar en croûte de gros sel; raviolis de crème brûlée à la noix de coco. Après la mise en bouche – des pinces de crabe géant de la mer de Barents simplement agrémentées d’un jus de moules monté au beurre – , il faut passer à l’action : ouvrir les coquilles Saint-Jacques de Dieppe. Alliant le geste à la parole, Yves Mattagne explique la façon de procéder, en insistant sur l’emploi d’une cuillère pour détacher la noix, ce qui évite d’endommager la chair.

Successivement, Jacques Mercier et Christophe Coppens se soumettent avec un certain succès à l’exercice. Laurence Bibot entreprend la préparation du tartare de Saint-Jacques par le tranchage des noix en petits dés de 4 à 5 mm de côté. Marie Arena, quant à elle, s’interroge sur la manière de réaliser des spaghettis de concombre – qui serviront à décorer le plat – à l’aide d’une mandoline japonaise. Un à un, Yves Mattagne dévoile les petits secrets de la sauce : une crème aigrelette au caviar, fruit du mélange de crème fleurette avec de la crème aigre, de jus de citron (qui assure la cuisson à cru de la chair) et de caviar. Les questions se concentrent alors sur le caviar. Où le trouver ? Comment bien le choisir? Quelle doit être son origine ? C’est ainsi que le quatuor apprend que l’on retrouve peu à peu du caviar français, prélevé sur des esturgeons de la Gironde, mais que le caviar le plus fiable vient aujourd’hui d’Iran, alors que celui de l’ex-URSS laisse à désirer du point de vue sanitaire.

Les discussions à table permettent aux uns et aux autres de faire plus amplement connaissance et de dévoiler leurs goûts et leurs passions. Au créateur de mode et d’objets Christophe Coppens, Marie Arena transmet son admiration pour le cristal noir des anciennes cristalleries de Manage, un dossier qu’elle a traité en technicienne de l’emploi. Ils partagent des coups de coeur culinaires sur le thème des lentilles, comme un mijoté sicilien à base de fenouil pour elle et une soupe indienne au yaourt et aux épinards pour lui.

Marie Arena est assaillie de questions sur sa carrière politique, ce qui permet d’apprendre qu’elle s’intéresse de près au statut des artistes – cher à Laurence Bibot – puisqu’elle a débuté sa vie active à Paris dans le monde de l’édition photographique. Tous se concentrent cependant sur le parcours d’Yves Mattagne, à commencer par Jacques Mercier qui lui a accordé une attention toute particulière dans son récent livre  » A la table des grands chefs  » (1).

La préparation de l’entrée chaude permet de découvrir une autre façon d’accommoder les coquilles Saint-Jacques. Au cours de l’élaboration de la recette, Laurence Bibot est intriguée par les chicons confits à la graisse de foie gras qu’elle goûte avec une gourmandise non feinte. La complicité entre les élèves et le maître s’accroît au troisième plat, chacun mettant la main à la pâte, au sens propre comme au sens figuré.

Jacques Mercier et Christophe Coppens préparent le lit de gros sel gris destiné à constituer le  » sarcophage  » du bar en croûte de sel. Quant à Laurence Bibot, elle façonne l’arête postérieure à l’aide de ciseaux. Mais c’est Marie Arena qui termine en véritable feu d’artifice, chalumeau à gaz en main pour caraméliser la cassonade brune des raviolis à la crème brûlée au lait de coco, une des créations signées Mattagne, ponctuant l’exercice d’un  » c’est pour impressionner mon frère plombier. »

Les vins

A l’apéritif : champagne Mumm, Brut Cordon rouge.

Diffusion : Allied Domecq, tél. : 03-286 87 34.

Avec le tartare de Saint-Jacques : un superbe alsace atypique dans son cépage, très fin : Riesling Saint-Hippolyte – Marc Tempé – Zellemberg.

Diffusion : L’Espace dix vins, tél. : 02-267 52 08.

Avec les Saint-Jacques poêlées et le bar : un chardonnay 1997 bien charpenté du sud de la France – Limoux – Toques et Clochers, Caves du Sieur d’Arques.

Diffusion : Expression du terroir, tél. : 02-242 76 62.

Avec les raviolis de crème brûlée à la noix de coco : un rivesaltes 1993 élaboré en fûts de chêne – Régis Boucabeille.

Diffusion : Expression du terroir, tél. : 02-242 76 62.

Tartare de Saint-Jacques, crème aigrelette au caviar

Pour 4 personnes : 8 coquilles Saint-Jacques, 1 c à soupe d’aneth émincé, 1 c à soupe de ciboulette ciselée, 1/2 échalote émincée très finement, poivre noir, sel de mer fin, 2 c à soupe d’huile d’olive Pour la crème : 1 c à soupe de crème aigre (type Isigny), 4 c à soupe de crème liquide, 1/2 jus de citron, poivre noir, sel de mer, 1 c à café pleine de caviar Karaburun.

Pour la décoration : 8 spaghettis de concombre, 4 petites c à café de caviar Karaburun, 4 oeufs de caille, 4 bâtonnets de pain grillé.

Dans une petite casserole d’eau légèrement vinaigrée et non salée, pocher 1 min les quatre oeufs de caille.

Les prélever avec une écumoire et les refroidir dans de l’eau glacée.

Mélanger les deux crèmes et le jus de citron. Saler et poivrer et laisser reposer.

Choisir des Saint-Jacques à la coquille bien fermée et bien lourde. Ouvrir les coquilles, prélever les noix et les débarrasser de ce qui les entoure, les laver et les éponger soigneusement.

Emincer les noix en lamelles, celles-ci en bâtonnets, puis en dés de 4 à 5 mm de côté. Incorporer les autres ingrédients et mélanger délicatement, en plaçant le bol qui les contient sur un lit de glaçons.

Au moment de dresser l’assiette (qui doit idéalement être froide), incorporer le caviar à la crème puis mélanger aux coquilles émincées.

Décorer avec l’oeuf de caille (légèrement réchauffé dans un peu d’eau chaude), le spaghetti de concombre et le caviar. On peut éventuellement remplacer ces spaghettis de concombre par de fins bâtonnets, détaillés au couteau.

Saint-Jacques poêlées, foie gras et chicons confits

Pour 4 personnes : 8 noix de Saint-Jacques, 1 noix de beurre, 4 escalopes de foie gras cru de 30 g chacune, 2 c à soupe de farine, 4 chicons, 4 c à soupe de graisse de foie gras (prélevée sur un foie cuit, en terrine par exemple), beurre clarifié, sel, poivre.

Pour la sauce : 2 dl de fond de veau, 1/2 jus de citron, 15 g de beurre frais.

Détacher toutes les feuilles de chaque chicon et les blanchir durant 30 sec dans 3 litres d’eau bouillante salée, de manière à enlever l’amertume. Egoutter soigneusement, éponger et les faire suer dans 1 c à soupe de beurre clarifié. Ajouter la graisse de foie, couvrir et laisser confire à feu très doux durant 40 à 45 min.

Dans une poêle antiadhésive, faire chauffer le beurre puis saisir sur chaque face les noix de Saint-Jacques, 1 min de chaque côté. Elles doivent être dorées en surface et encore rosées à l’intérieur. Les retirer et les garder au chaud, déglacer avec le 1/2 jus de citron et réduire de moitié. Au dernier moment, incorporer au fouet le beurre frais. Pendant ce temps, fariner les morceaux de foie cru et les cuire 45 sec de chaque côté dans une poêle anti-adhésive.

Bar en croûte de gros sel

Pour 4 personnes : 2 bars de ligne (loups de mer) de 800 g vidés, 4 à 5 kg de gros sel gris de mer (type Guérande), 4 branches de thym frais, poivre noir.

Pour la sauce : 4 à 5 c à soupe d’huile d’olive extravierge, 4 petites gousses d’ail confit, 2 grosses c à soupe de feuilles de persil plat émincé grossièrement.

Pour l’ail confit, mettre en papillote d’aluminium des gousses d’ail non pelées avec un peu de thym et de sel et d’ajouter quelques gouttes d’huile d’olive. Refermer la papillote et enfourner pour 45 min à 150° C.

Faire vider les bars par le poissonnier, sans enlever leurs écailles (qui vont protéger le poisson contre la pénétration du sel).

Mouiller le sel à raison de 1 dl d’eau par kg de sel (le sel doit pouvoir être compacté comme du sable sur la plage). Sur une plaque épaisse, confectionner un lit de sel de 2 cm d’épaisseur. Déposer le poisson et farcir de thym et de poivre. Bien refermer en recouvrant. Habiller ensuite le dessus du poisson d’une couche de sel de mer. Il n’est pas nécessaire de couvrir la tête qui n’est pas consommée.

Enfourner à 180° C pour 15 min. Sortir du four et laisser reposer durant 10 min, ce qui permet à la masse de sel de poursuivre la cuisson de la chair. Pendant ce temps, préparer la sauce à base d’huile d’olive, d’ail confit émincé et de persil plat assez grossièrement ciselé.

Rompre la croûte de sel sur le dessus et l’enlever, retirer délicatement la peau et retirer les filets, un par personne. Dresser sur assiette avec la sauce à l’huile et quelques décorations de légumes : artichauts barigoule, tomates et poivrons confits, asperges vertes, dentelles de parmesan.

Raviolis de crème brûlée à la noix de coco

Pour 4 personnes : 8 carrés de pâte à ravioles, 1 jaune d’oeuf, 8 c à soupe de cassonade brune.

Pour la crème brûlée : 100 g de lait de coco sucré, 4 jaunes d’oeufs, 60 g de sucre semoule S2.

Pour la décoration : 4 sommités de menthe fraîche, 4 boules de sorbet aux fruits exotiques, 1/2 mangue, 1/4 de noix de coco, 6 cl de sirop de sucre de canne, 3 feuilles de menthe, 1/2 jus de citron vert, cassonade.

La veille, dans le bol d’un robot, fouetter le sucre et les jaunes jusqu’à rendre ce mélange légèrement blanc et mousseux. Dans une casserole, porter à ébullition le lait de coco et la crème et verser sur le mélange en fouettant légèrement.

Placer cet appareil dans un grand ramequin. Couler en une couche de 2,5 cm de hauteur. Déposer sur une plaque creuse pour le four et verser un peu d’eau dans le fond de la plaque, de manière à réaliser une cuisson au bain-marie.

Couvrir la plaque de papier aluminium en laissant un coin ouvert, pour que la vapeur puisse s’échapper.

Enfourner durant 20 min à 150° C et vérifier que la surface de la crème soit bien ferme. Sortir du four et laisser refroidir. Couvrir d’un film plastique avant de mettre au frigo, pour 24 heures.

Etaler les carrés de pâte et déposer une grosse c à soupe de crème. Refermer et coller au pinceau à l’aide d’un peu de jaune d’oeuf battu. Plonger 1 min dans une eau bouillante.

Retirer les ravioles et les laisser sécher. Dresser sur assiette et saupoudrer de cassonade.

Au dernier moment, caraméliser les ravioles à l’aide d’un chalumeau à gaz.

Peler la mangue et émincer de fines lamelles à la mandoline. A l’aide d’un économe prélever des copeaux de noix de coco fraîche. Garnir l’assiette. Mixer brièvement le jus de citron vert, les feuilles de menthe et le sirop de sucre. Saucer légèrement.

Ajouter le sorbet.

Textes et photos Jean-Pierre Gabriel

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