Après avoir sollicité massivement la vue et l’ouïe, voici que l’art, la pub et le Web s’attaquent désormais à un autre sens essentiel : l’odorat.

Retrouvez Frédéric Brébant chaque lundi matin, vers 9 h 45, dans l’émission  » Bonjour quand même « , de Jean-Pierre Hautier, sur la Première (RTBF radio).

L’odorama serait-il à nouveau tendance ? Vingt-deux ans après l’expérience originale de  » Polyester « , le film délicieusement nauséabond de John Waters, il semblerait que la restitution olfactive par voie artistico-artificielle soit en effet dans l’air du temps. Pour rappel, ce long-métrage mettant en scène l’ineffable Divine fut le premier film de l’histoire du cinéma à proposer aux spectateurs de sentir  » réellement  » les odeurs suggérées à l’écran. Ail, essence, sueur et autres gaz fétides remplissaient ainsi les narines des spectateurs grâce à un système de carte à gratter au moment opportun. Délibérément provocateur,  » Polyester  » fût un flop d’envergure au début des années 1980, mais parvint, au fil du temps, à gagner le statut de film culte, titillant même la curiosité d’artistes contemporains. Aujourd’hui, il semble d’ailleurs que ce mode d’expression singulier connaisse un revival spectaculaire, non seulement à travers des projets artistiques étonnants, mais aussi via des initiatives beaucoup plus commerciales. Ainsi, sur notre territoire, la ville d’Hasselt est précisément le théâtre d’un événement inédit depuis le 9 novembre. Le centre de design Z33 accueille en effet, jusqu’au 25 janvier prochain, la performance  » Sniff Receptor  » qui présente à la fois le premier film olfactif belge et une exposition articulée autour des coulisses du tournage ( www.olfactormoviestudios.com), le tout mené de main de maître par l’artiste Peter De Cupere, véritable passionné des senteurs théâtralisées ( www.peterdecupere.com). Curieux hasard ou indice révélateur : la Fondation Cartier pour l’art contemporain organise, en ce moment même à Paris, un cycle  » Odorama  » dans ses Soirées Nomades. Jusqu’à la fin de l’année, le visiteur peut, entre autres, admirer des installations-concerts parfumées, participer à des promenades olfactives entre plusieurs projets d’artistes et même assister au premier feu d’artifice odorant le soir de la Saint-Sylvestre ( www.fondation.cartier.fr). Toujours attentive aux tendances immergentes, la publicité commence, elle aussi, à mener le consommateur par le bout du nez. En région parisienne, France Rail Publicité (la régie publicitaire de la SCNF) vient, par exemple, d’installer une centaine de panneaux d’affichage olfactifs, histoire de sensibiliser le passant avec des messages aromatisés ayant la faculté de vanter des parfums prestigieux, des plats préparés ou même û pourquoi pas ?û des destinations de vacances lointaines. Imaginez un peu : la gare du Nord aux senteurs de monoï pour rêver d’un voyage à Bora Bora… Le pied, non ? D’ailleurs, même le Web semble se fondre dans cette dérive olfactive. Des expériences informatiques avec boîtier diffuseur connecté à un ordinateur personnel et renfermant des dizaines de fragrances ont en effet été menées pour donner à certains sites Internet une dimension parfumée non négligeable. Comme dans le secteur publicitaire, le surfeur pourrait ainsi recevoir une information supplémentaire sur des produits, des restaurants, des magasins ou encore des offices de tourisme, sans devoir débourser trop d’argent. Alors, gadget dispensable ou révolution sensorielle à venir ? Rendez-vous dans quelques années pour vérifier si nos ordinateurs nous en mettront plein le nez, après nous en avoir mis plein la vue…

Frédéric Brébant

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