L’Atelier Matador signe une très belle réalisation dans la banlieue immédiate de Mons. Au programme : beaucoup d’idées, une esthétique cohérente et percutante ainsi qu’une convivialité nomade. Pile-poil dans la tendance.

Sur la porte d’entrée, on lit  » 125, digue des Peupliers « .  » C’est à la fois l’adresse et le titre, ou le début d’une histoire, souligne d’emblée Marc Mawet, associé avec Olivier Bouret au sein de l’Atelier Matador. Lorsque l’architecte a terminé son travail, l’histoire de la maison ne fait que commencer.  »

 » Il s’agit de notre première expérience de construction, intervient Georges Ollinger, le propriétaire. Après avoir habité longtemps une ferme restaurée, nous avons eu envie de retourner en ville, changer de style d’habitation et faire confiance au contemporain. Le choix de l’Atelier Matador, réputé pour ses idées pointues, s’est imposé comme une évidence.  »

Marc Mawet propose un terrain, situé au c£ur de la digue des Peupliers, cette  » couronne montoise  » qui s’est développée en dehors des remparts et a fait, pendant longtemps, le bonheur des promeneurs. Il s’agit en réalité d’un terrain vague, couvert d’herbes folles et qui se termine, quinze mètres plus loin, par un petit atelier de verrerie, abandonné depuis belle lurette. Bâti sur une surface de 7 m sur 9 m, entouré de trois murs aveugles, ce bâtiment comporte deux niveaux. Une seule fenêtre, percée à l’étage, face à la digue, dispense une lumière très chiche. L’atelier sera réhabilité et intégré judicieusement à l’ensemble. Mais, pour commencer, l’architecte doit faire face à deux points essentiels : comment  » remplir  » le terrain vague pour rejoindre la digue, puis comment réarticuler le front bâti, pour trouver un équilibre avec les constructions voisines : d’un côté, une maison ouvrière traditionnelle des années 1920, de l’autre, une façade plutôt banale, typique des années 1950. La solution ? Une importante borne cubique arrête et  » casse  » le côté linéaire de la façade années 1950, tandis qu’une  » nappe  » rectangulaire, placée légèrement en retrait, relie la borne à l’autre front bâti dans les années 1920. Derrière ce jeu de volumes, Marc Mawet a imaginé une habitation très contemporaine, vaste et confortable, s’enroulant autour d’un patio et se prolongeant très naturellement à l’intérieur de l’atelier.

En franchissant le seuil de la maison de Jacqueline Bertrand et Georges Ollinger, on remarque tout de suite l’éclectisme des matériaux. La brique de lave, de couleur noire, qui recouvre la façade extérieure, se retrouve sur une partie du mur intérieur. Le parquet en chêne clair, travaillé selon la technique du  » bois debout « , s’harmonise admirablement avec la teinte grise, très subtile, des murs. Près de l’entrée, un escalier hélicoïdal en métal, installé sur un podium en chêne, mène vers le bureau.

On poursuit la visite. Le regard embrasse alors un vaste espace, meublé dans un esprit minimaliste et pavé de carrelages de céramique sérigraphiée. Le patio, aménagé derrière de généreuses baies vitrées, s’offre également à la vue.  » C’est un lieu, un espace à vivre, précise Georges Ollinger. Selon les occasions, il sert de piste de danse, de salle de restaurant ou encore de pièce de réception pour un cocktail dînatoire. Pour nous, la maison n’est pas un geste égoïste. Nous voulions l’ouvrir, ne pas figer les choses. Ici, chacun s’approprie l’espace. On change et déplace le mobilier selon les circonstances et les besoins. C’est ainsi que nous écrivons le roman du 125, digue des Peupliers.  » Une attitude nomade, donc.

Jacqueline Bertrand et Georges Ollinger, administrateur de Grand-Hornu Images, sont très ouverts sur la vie culturelle. Les artistes et leurs £uvres sont toujours les bienvenus. Actuellement, Jean-Marie Mahieu profite de ce bel espace et y a accroché ses tableaux les plus récents. L’accueil et la convivialité se prolongent vers l’extérieur. Les maîtres des lieux souhaitaient une séparation entièrement vitrée qui matérialise bien le concept  » dehors-dedans « . En été, on ouvre tout et on vit dehors. En hiver, on peut éclairer le patio pour profiter d’un grand volume ou encore rétrécir l’espace avec un éclairage plus intime.

La cuisine, ouverte et aérée, participe à cet art de vivre. Pierre Bauwens a dessiné son aménagement original et confortable, en associant les bois d’aniègre et de padouck. Georges Ollinger souhaitait  » un mobilier qui ne ressemble pas à du mobilier de cuisine  » et le designer a parfaitement rempli ce contrat. La table de la salle à manger, en padouck, a été réalisée par un autre artiste  » du coin « , le céramiste Francis Behets. Dans le mur  » technique  » de la cuisine qui réunit le plan de travail et les éviers, Marc Mawet a percé une fenêtre bandeau ainsi qu’une frise vitrée sous le plafond. Une manière de dématérialiser les arêtes des volumes et laisser fuir l’espace.

Dans le fond, les maîtres des lieux ont installé un petit  » salon intime « , meublé d’un seul canapé, pour méditer, se reposer ou bouquiner. C’est la partie rénovée de l’habitation, l’ancien atelier de verrerie.  » Ici, nous avons réalisé très peu d’interventions, commente Marc Mawet. Juste cet évidement pour accueillir le salon intime et l’escalier, un agrandissement important de l’unique fenêtre, ainsi que le percement de plusieurs ouvertures dans la toiture, de façon à éclairer au maximum ce volume, à l’origine très sombre.  » L’étage est donc baigné d’une très belle luminosité, encore amplifiée par un jeu de cloisonnements de la chambre et de la salle de bains, tout en semi-transparence, ainsi que par une palette de coloris très raffinée qui habille les murs : le blanc, le gris et le vert très pâle. La chambre d’amis est délimitée par un mur bas,  » interrompu « , en quelque sorte. Histoire de gagner encore plus de lumière. Dans la salle de bains, conçue elle aussi par l’Atelier Matador, l’habillage de la baignoire et des lavabos, avec du padouck, a été confié à Pierre Bauwens. Le con- traste du blanc et du bois foncé est joliment souligné par un mur tapissé de mosaïque vert menthe. Les détails sont irréprochables, les finitions extrêmement soignées. La compétence et l’enthousiasme de tous les corps de métier se remarquent, eux, à chaque instant.

Barbara Witkowska

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