Dans leur atelier parisien, Daniel et Véronique Pallas créent une collection Femme pensée autour du smoking. Avec eux, le grand soir, c’est tous les jours. Beyoncé, en fan, ne démentira pas.

La question  » smoking/no smoking  » n’a pas lieu d’être avec eux : ils ont choisi leur camp et ne tomberont pas la veste, pour la simple et belle raison qu’elle est à leur exacte mesure, mieux, elle est leur essence. Celle de Véronique Bousquet, qui ne porte presque jamais de robe, et qui, en parfaite modéliste, sait reconnaître les yeux fermés le savoir-faire. Celle de Daniel Pallas, qui est tombé dedans quand il était petit, son père était tailleur pour homme, sa mère couturière, il a grandi en gambadant dans l’atelier-appartement du IXe arrondissement où pratiquement rien n’a changé depuis les débuts parisiens de Pallas en 1970. Aujourd’hui, dans son ancienne chambre d’enfant, les deux coupeuses ont trouvé place. L’équipe n’est pas pléthorique, ils sont six à faire vivre la maison. Plus ceux et celles qui gravitent autour, avec leur talent propre – stylistes, attaché de presse, photographe, mannequins – qui font désormais partie de la famille. Pas moyen de faire autrement avec ce couple d’enragés du smoking, ce n’est pas un gros mot.

Ils se sont rencontrés au début des années 80, à l’Ecole supérieure des arts et techniques de la mode, à Paris, elle était en troisième année, lui en première, il avait commencé par étudier la médecine mais il n’était  » pas fait pour ça « , il avait juste tenté de s’écarter du chemin tout tracé, surtout ne pas faire comme ses parents, prendre ses distances avec l’histoire familiale, on voit le résultat. En 2001, leur histoire de duettistes prend véritablement forme, Véronique quitte Esmod et l’enseignement, ils se retrouvent à deux aux manettes de Pallas que Daniel a réussi à préserver de la disparition parce qu’il a eu l’intelligence de ne pas casser  » l’outil de production « . Ils réalisent les prototypes de Karl Lagerfeld et de Balenciaga – dont la direction artistique est alors assumée par Nicolas Ghesquière – qui leur font prendre conscience de leur maîtrise technique et de leur singularité talentueuse.  » Tout à coup, on s’est dit que notre savoir-faire, on pourrait l’utiliser pour nous, pour nous faire plaisir, se rappelle Véronique. Et on a aimé ça.  » L’hiver 2012 s’annonce, leur première collection aussi, une variation autour d’un même thème, le smoking.  » Cela nous ressemble « , dit-elle tandis qu’il ajoute :  » On propose une alternative à un produit de créateur excentrique qui, pour se différencier, doit toujours être à l’avant-garde, du haut de gamme qui n’est pas complètement dingue et importable la saison d’après.  » Et en la matière,  » l’amplitude est énorme « , puisqu’il est permis de casser les codes, de les adapter, de passer du soir au jour, avec Yves Saint Laurent comme référence, son noir et son marine.

Le premier smoking Pallas Paris prendra vie sur Hannelore Knuts, top model belge qui joue les bons génies –  » On était en train de pondre notre collection, elle est arrivée au studio, elle s’est prise d’amour pour ce que l’on faisait, elle a passé l’après-midi à tout essayer avec Véro et le lendemain, elle nous écrivait un mail de trois pages où elle disait ce qu’elle en pensait. On n’a pas un ego démesuré, on a trouvé que ce qu’elle nous partageait était cohérent.  » Depuis, ils privilégient les collaborations, avec les stylistes Allegria Torassa et Niki Pauls, notamment, histoire  » d’avoir un apport extérieur, un peu d’air frais, afin d’éviter de rester replié et finir par ressasser « . Elles font partie de ces  » femmes Pallas  » qui comptent, tout comme les mannequins Violetta Sanchez et Aymeline Valade, laquelle osa le mini noeud pap’ et le smoking pour monter les marches à Cannes en 2014, avec l’équipe du Saint Laurent de Bonello où elle avait prêté ses jambes interminables à la Betty Catroux de cinéma, Daniel s’en souvient :  » Vous n’avez pas idée de ce que cela fait, c’est incommensurable.  » Qu’elle soit l’un des visages de leur automne-hiver est de l’ordre du naturel, avec eux, l’amitié est de mise, et la fidélité aussi. Elle est même parfois royale, ils pourraient s’amuser à faire du name-dropping, la liste de celles qui portent leurs vêtements uniques made in Paris est longue et enluminée mais ils s’en gardent, ils ont inscrit en eux le conseil du père de Daniel :  » Attention à la ceinture dorée.  » Que Beyoncé s’instagramme en total look Pallas – 1,1 million de likes – n’y changera rien.

PAR ANNE-FRANÇOISE MOYSON

 » LE SMOKING, CELA NOUS RESSEMBLE. « 

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