avec ses lignes pures habillées d’un bois chaleureux, la maison-boîte dessinée par jean-françois crahay, signe, au cour de la campagne verviétoise, une admirable synthèse entre les idées modernes et la nature séculaire. découvrez-en tous les ressorts secrets.

Carnet d’adresses en page 72.

Dans les environs de Verviers, la campagne est belle et sereine. Les prairies ondulent. Ici et là, des maisons traditionnelles protègent jalousement leurs secrets. Volumes de pierre, toitures à deux pans, baies à dominante verticale : c’est ainsi que l’on construit, ici, depuis toujours. Soudain, on aperçoit de loin une longue  » boîte « , bardée de bois et soulignée par une longue fenêtre-bandeau. Les proportions sont magnifiques, l’intégration dans le paysage est irréprochable. Cette maison moderne, d’une pureté époustouflante, Jean-François Crahay l’a dessinée pour sa s£ur et sa famille. L’architecte est très jeune. Son souffle créatif est à l’affût d’idées nouvelles, en phase avec l’air du temps. Cela dit, cet  » enfant du pays « , respecte le passé, la tradition et l’environnement. Mais, plutôt que de partir d’un schéma traditionnel, qu’intégrerait la maison dans le contexte bâti, il a préféré intégrer la maison dans le paysage. D’où ce parti pris d’un bâtiment bas et très étiré, qui trace une ligne dans le paysage. Le concept est ultrasimple. Deux lames de moellons de pierre, provenant de la carrière Nelles à Malmédy, ancrent le bâtiment dans le site. Sur ces deux lames est posé un volume léger en bois. La couleur fauve du bardage, le gris des moellons et la toiture plate dialoguent parfaitement avec les tonalités et les gabarits de la nature environnante.  » La parcelle, délimitée par les haies d’aubépines, est étroite et particulièrement profonde, 25 mètres sur 120 mètres, et se situe au sommet d’une colline, explique Jean-François Crahay. La maison a été poussée le plus loin possible à l’intérieur de la parcelle pour vivre avec le jardin, au c£ur d’un paysage dégagé. Elle est bâtie sur une légère pente de 10 % et le niveau inférieur û comprenant les garages, la buanderie, la cave à vins et la zone des enfants û est en partie enterré.  »

Pour atteindre la porte d’entrée, il faut marcher un peu. On emprunte une passerelle qui monte légèrement. Réalisée avec un caillebotis en bois, elle évoque les sentiers de promenade balisés des Fagnes. En franchissant le seuil, on découvre, sur un vaste plateau de plain-pied, un espace conçu comme une seconde  » boîte  » gigogne ; donc plus petite. Dedans, on a disposé, à la queue leu leu, la salle à manger, la cuisine et le séjour. Les propriétaires voulaient rompre le schéma classique selon lequel le séjour est la pièce la plus importante où l’on pénètre en premier lieu. Ici, c’est l’inverse. On est accueilli d’emblée dans la salle à manger, la pièce où l’on se restaure et bavarde autour d’une table ronde. La convivialité est à l’honneur ! Il y règne une belle ambiance lumineuse, amplifiée par une généreuse ouverture dans le plafond. C’est un cylindre tronqué, coupé suivant une oblique plutôt qu’à l’horizontale et peint, à l’intérieur, d’un jaune orangé. La lumière s’y réfléchit et se teinte en un halo très chaleureux. Plus loin, la cuisine est nette, moderne et fonctionnelle.  » Ce n’est pas une cuisine à vivre, souligne l’architecte, mais elle permet de garder toujours un contact auditif et visuel avec la salle à manger et le salon.  » Ce dernier se trouve donc tout au fond. Dans cet espace cubique, clair et simple, toutes les conditions sont réunies pour se détendre et se reposer face à la nature. Il n’y a pas de fenêtres. C’est carrément un immense  » trou dans le mur « , protégé par une baie vitrée sans châssis qui donne l’impression de vivre dehors.

Le soir, les parents retrouvent leur intimité à l’autre extrémité de la maison. Leur chambre est la zone la plus privée : on y accède par un étonnant hublot, fermé par une porte coulissante. Le lit est placé face à une grande baie. Ici aussi, le contact avec la nature est privilégié. La zone des enfants (chambres, salles de bains et salles de jeux) a été aménagée en bas, dans les  » moellons « . Presque partout, le mobilier, dessiné par Jean-François Crahay, est intégré et rehausse la simplicité et la netteté des espaces. Pour respecter ce parti pris de pureté, il y a très peu de luminaires. Les spots sont encastrés à fleur de murs, de sols et de plafonds. Une gorge d’éclairage indirect, à la jonction avec le plafond, délimite la  » boîte  » gigogne dans le volume bois.

Adepte de la bioconstruction, Jean-François Crahay a opté pour des matériaux  » sains « . La laine de roche sert d’isolant. A l’intérieur, les murs sont recouverts de panneaux de gypse renforcé. L’avantage ? Une excellente résistance mécanique, une grande rigidité, ainsi qu’une très bonne absorption acoustique. La maison est chauffée au mazout, par le système de rayonnement : dans le sol et dans les murs, un circuit en serpentin laisse circuler l’eau chaude.  » A la base, il s’agit d’un système assez onéreux, reconnaît Jean-François Crahay. Cela dit, par la suite, on fait une économie de 30 % par rapport au chauffage classique. En effet, l’eau qui alimente les radiateurs doit avoir habituellement une température de 70 °C. En revanche, ici, l’eau qui circule dans les murs est chauffée à 40 °C et celle qui circule dans le sol à 20 °C – 25 °C.

Le réglage se fait automatiquement par deux sondes, l’une à l’extérieur et l’autre à l’intérieur. C’est un système de chauffage qui comporte pas mal d’avantages. Il offre une grande pureté visuelle et apporte beaucoup de confort aux habitants. L’ambiance dans la maison est plus saine, car l’air ne bouge pas et il n’y a pas de mouvement de poussières. L’atmosphère n’est pas asséchée. En été, une circulation d’eau froide à la place de l’eau chaude offre la possibilité de climatiser les espaces.  »

Le système électrique est relativement classique. Pour supprimer les champs électriques dans les zones de repos, l’architecte a choisi les bio-rupteurs. Lorsque dans une chambre, il n’y a plus de demande de courant, le biorupteur coupe le courant au compteur. Ainsi, tous les câbles qui vont vers les chambres ou présents dans les chambres sont-ils dépourvus de courant.

L’ensemble, d’un esthétisme pointu et raffiné, est très plaisant à l’£il. Il synthétise également toutes les exigences de l’art de vivre actuel : convivialité, cocooning, sérénité, intimité et contact avec la nature. Jean-François Crahay a signé une interprétation très réussie et moderne de la maison en bois.

Barbara Witkowska – Photos : Laurent Brandajs

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