Cap ou pas cap ?

DELPHINE KINDERMANS RÉDACTRICE EN CHEF © frédéric raevens

Il y en a, paralysés à l’idée du grand saut, qui s’accrochent mais s’étiolent. Ou, pire, pestent et râlent, accusant leur job de tous les maux et n’hésitant pas à mettre leur mal-être sur le compte de leur boss ou de leurs collègues – bonjour l’ambiance. D’autres, moins nombreux mais plus courageux, acceptent de réfléchir hors du cadre et arrivent à la conclusion que, s’ils sont désormais malheureux dans l’open space où ils se sont posés huit heures par jour pendant si longtemps, c’est qu’il est temps de partir. Peu importe finalement ce qui, lassitude face à la routine, surcroît – réel ou supposé – de travail ou modification des conditions dans lesquelles il doit être effectué, est à l’origine de cette évidence. Prenant leurs responsabilités et leur audace à deux mains, ils donnent leur démission et se lancent dans cette activité qu’ils rêvaient déjà d’exercer enfant ou ce projet échafaudé au fil de leur première carrière, souvent avec l’envie de se reconnecter à davantage d' » utilité  » ou de concret. Pour son dernier numéro de l’année, Le Vif Weekend est parti à la rencontre de Tiffany, qui a tourné le dos au recrutement pour ouvrir son épicerie fine, Simon, passé de la finance à la boucherie, ou Daniel, ex-trader aujourd’hui brasseur.

En cette fin 2017, on recense 11 millions de hashtag #namaste sur Instagram.

Une quête de sens en phase avec l’époque, dont on sait qu’elle est à l’épanouissement personnel. Ce n’est pas pour rien qu’en cette fin 2017, on recense quelque 11 millions de hashtag #namaste sur Instagram. Censé accompagner une salutation spirituelle, ce mot venant du sanskrit chapeaute, sur le réseau social, un gloubi-boulga d’images traduisant une certaine définition du bien-être et dans lequel on retrouve, pêle-mêle, poses de yoga, assiettes vegan, galets alignés ou bougies allumées invitant à la pleine conscience.  » Le paradoxe de notre monde, confiait récemment le biologiste Pablo Servigne à L’Obs, c’est que nous sommes devenus des experts en compétition tout en cherchant fébrilement les moyens de  » faire société  » dans un bain idéologique totalement contraire.  » Alors que la vision des eighties, nourries à la compétition extrême et à la survalorisation du profit, a montré ses limites en tant que philosophie de vie, le modèle économique néolibéral, lui, n’est pas mort. Mais libre à chacun, pour autant qu’il soit prêt à renoncer à son petit confort de salarié, de faire un pas de côté. Ceux qui ont osé ne l’ont pas regretté. Et certainement pas Pablo Servigne, lui qui a quitté son poste d’universitaire pour être chercheur indépendant et auteur. Son troisième ouvrage, L’entraide, l’autre loi de la jungle, vient de paraître aux éditions Les liens qui libèrent. Encore un parcours à méditer, à l’approche des bonnes résolutions de la nouvelle année.

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