Une tendance se dessine dans les intérieurs : décors opulents, armoires débordant de bibelots, animaux empaillés, touches dorées et souvenirs personnels abondent.

Le  » Wunderkammer  » est de retour. Les signes précurseurs de cette tendance avaient déjà été observés il y a quelques années au salon de l’art TEFAF à Maastricht, qui fait autorité en la matière. Le cabinet de curiosités de Georg Laue avait alors attiré tous les regards. L’antiquaire, qui se plaisait à dire à l’époque que  » les merveilles se collectionnent « , avait garni des pièces avec tout ce qu’un prince de la Renaissance aurait pu rêver posséder, tandis que Damien Hirst fascinait le monde avec ses animaux empaillés. Et le 16 octobre dernier, la maison de vente aux enchères Christie’s a mis en vente à Paris la collection inédite de raretés, évaluée à 5 millions d’euros, de Jacques et Galila Hollander, qui ont acquis sur une période de trente ans de splendides objets sur des marchés aux puces et dans des ventes aux enchères. Parmi ceux-ci : de l’argenterie, des ivoires, des cristaux de roche, des porcelaines, des tableaux et des statues. À l’image des princes collectionneurs du Siècle d’Or, le couple belge a acheté aussi bien des artificialia (oeuvres d’art), que des naturalia, comme des crânes et des coquillages, des scientifica, objets scientifiques, et exotica, comme des animaux empaillés.  » Il y a cinq ans, nous n’aurions jamais mis en vente cette série, car ce genre de cabinet de curiosités ne rencontrait qu’un intérêt limité. Aujourd’hui, nous constatons que les objets insolites suscitent un engouement parmi les jeunes collectionneurs « , confirme Lionel Gosset, expert chez Christie’s.

Les magazines de décoration se font l’écho de cette tendance : les cabinets de curiosités sont désormais incontournables. Les créatifs en sont particulièrement friands, à commencer par les couturiers : il suffit de se remémorer la collection d’Yves Saint Laurent, mise en vente il y a quelques années. C’est précisément cette vente emblématique qui a provoqué ce revirement de situation, cette rupture dans le goût du public. On a ainsi pu voir que le créateur français et son compagnon Pierre Bergé avaient, toute leur vie durant, constitué une collection variée, faisant fi de tout minimalisme ou conceptualisme. Leur intérieur formait un délicieux chaos d’objets et renvoyait une image de richesse décomplexée faite d’or massif, de kitsch, de fauteuils luxueux et d’un amalgame d’art moderne et ancien.

De nos jours, on ne doit pas forcément habiter une maison minimaliste aux lignes épurées pour être  » moderne « . On peut l’être tout autant en vivant dans un joyeux fatras de jolies choses. L’art suit lui aussi, inconsciemment peut-être, la tendance. En témoignent les installations de l’artiste belge Koen Vanmechelen, qui jouent sur cette mode de la taxidermie, ou le  » musée portatif à l’échelle  » que Ronny Van de Velde, célèbre marchand d’art du pays, présente en ce moment aux Musées royaux des beaux-arts de Bruxelles (lire par ailleurs).

On peut donc à nouveau collectionner à l’envi, pour faire de son intérieur le reflet de son imagination.

PAR PIET SWIMBERGHE

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