Le contemporain est-il l’ennemi du rustique? Non, répondent les propriétaires d’une demeure typiquement bruxelloise. Démonstration.

 » Divers ouvrages qualifient d’éclectique le style de notre maison « , affirment d’emblée les propriétaires de cette maison unifamiliale construite en 1889 par Ernest Delune, près des étangs d’Ixelles, à Bruxelles. La configuration  » trois pièces en enfilade « , typiquement bruxelloise, a été transformée en living. Dans ce séjour résolument intimiste, où dominent les poteries africaines, le couple n’a pas hésité à  » importer  » le bois d’un parquet patiné et le marbre d’un corps de cheminée datant du XIXe siècle. Des interventions très contemporaines. Au rez-de-chaussée, une singulière arcade à quatre baies a été dressée là où on ne l’attendait pas.  » Purement décorative, elle crée une sorte d’alcôve qui rythme l’espace et rompt la répétition des trois pièces en enfilade « , explique le maître des lieux qui a choisi cet abri semi-ouvert pour ranger ses milliers de CD.

Le même esprit d’éclectisme a guidé les occupants à  » sacrifier « , selon leurs termes, la pièce intermédiaire du rez-de-chaussée pour y installer un escalier menant à la cuisine et à la salle à manger, idéalement situées au niveau du jardin.  » Pour rejoindre le sous-sol, précise le propriétaire, nous avions d’abord pensé construire un escalier en colimaçon plutôt discret. Nous ne savions pas jusqu’où aller dans l’audace formelle, nous hésitions beaucoup. L’architecte Alain Borgers nous a suggéré de maximiser la percée, de donner une vraie présence, une vraie direction à l’escalier. Il a balayé nos doutes.  » Directement inspiré par l’escalier du pavillon chinois du musée du Cinquantenaire à Bruxelles, qu’il avait précédemment réalisé, Alain Borgers imagine un tracé épuré en bois et en ferronnerie non ouvragée. Un projet très sobre mettant la matière en valeur de superbe façon.

Il restait encore à optimiser la lumière, peu abondante en cet endroit reculé de la maison.  » Nous avions naturellement songé à installer une verrière mais c’est l’architecte qui a eu l’idée de concevoir une « imposte » dans le plancher du rez-de-chaussée « , confie le propriétaire. Ce bandeau transparent de plusieurs mètres de longueur permet de communiquer visuellement entre les deux niveaux.

La cuisine, récemment achevée, restera pendant plusieurs années le lieu de toutes les hésitations stylistiques.  » Elle était assez rudimentaire, ce qui ne nous déplaisait pas d’ailleurs, se rappelle le propriétaire. D’un autre côté, nous avions envie d’un grand espace, sans trop de fioritures.  » L’architecte Etienne Vandenberg proposera un aménagement assez radical en optant pour une extension vers le jardin dotée d’une large porte-fenêtre intégralement vitrée. Grâce à cette astuce, l’intérieur se prolonge tout naturellement à l’extérieur. L’architecte conçoit aussi un plan de travail central, rectangulaire et massif, pour asseoir les lieux.  » C’est dans la cuisine que nous prenons tous nos repas, que nous travaillons et que nous recevons les amis, signale le maître des lieux. Nous voulions donc une pièce qui nous ressemble. Au début des travaux, nous redoutions que l’espace ne devienne trop austère, trop rangé. C’est la raison pour laquelle nous tenions à garder quelques éléments assez bruts comme le sol en pierre totalement irrégulier ou le radiateur en fonte. « 

C’est également Etienne Vandenberg qui a signé la salle de bains disposée sur deux niveaux et intégralement réalisée en carreaux de grès vert d’eau. Sous les toits, le couple a décoré les combles réaffectés en chambre à coucher dans un esprit  » world « . Des objets décoratifs, ramenés, entre autres, d’Asie et d’Afrique sont nichés sous les poutres apparentes et les Velux. Un espace zen malgré lui si l’on en croit le maître des lieux qui compte bien meubler davantage l’ex-grenier.  » Je possède encore des réserves de vieilles affiches publicitaires que je voudrais accrocher un jour aux murs, ici ou au salon. Le genre d’activité que je remets indéfiniment au lendemain. En fait, je n’aime pas beaucoup l’idée d’une maison  » finie « … C’est comme l’ordre, point trop n’en faut « , plaisante le propriétaire.

Texte et photos: Antoine Moreno

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